DÉCRYPTAGE – Un mois et demi après les résultats des élections législatives, les Français ne savent toujours pas qui va succéder à Gabriel Attal à Matignon. L’Élysée a indiqué en fin de semaine dernière que le chef de l’État ne choisira pas de nouveau Premier ministre avant le 23 août, jour où il reçoit les différents chefs de partis et présidents de groupes à l’Assemblée nationale pour tenter de débloquer la situation. Pour l’heure, le NFP a déjà sa candidate et des noms de personnalités issues des rangs de la gauche, de la droite et du bloc central sont évoqués.
Lucie Castets, Bernard Cazeneuve et Karim Bouamrane à gauche
Concernant la gauche du spectre politique, plusieurs noms sont cités dans la course à la succession de Gabriel Attal. À commencer par celui de Lucie Castets.
La haute fonctionnaire âgée de 37 ans et directrice des finances et des achats à la ville de Paris a été propulsée candidate du Nouveau Front populaire à la fin du mois de juillet après de longues négociations entre les différents partis qui forment la nouvelle union de la gauche et l’incapacité de ces derniers à se mettre d’accord sur les noms d’Huguette Bello et Laurence Tubiana. Celle qui a cofondé en 2021, le collectif « Nos services publics », pourrait bénéficier de la dynamique du NFP qui est arrivé premier à l’issue du second tour des élections législatives et de son profil se situant en dehors des partis.
Cependant, les Jeux olympiques ayant capté toutes les attentions ces dernières semaines ont pu être un obstacle pour Lucie Castets, l’empêchant de mieux se faire connaître auprès du grand public. Et Emmanuel Macron ne semble pas avoir été convaincu par celle qui a été la conseillère économique d’Anne Hidalgo. À l’occasion d’une interview télévisée donnée le 23 juillet, l’actuel locataire de l’Élysée a déclaré que « la question n’est pas un nom, mais quelle majorité peut se dégager à l’Assemblée ». En outre, il serait prêt à la rencontrer à l’occasion des échanges avec les autres formations politiques prévus ce vendredi 23 août.
Toujours à gauche, un autre nom s’est frayé un chemin. Celui de l’ancien Premier ministre de François Hollande, Bernard Cazeneuve. Selon nos confrères du Monde, il a été évoqué par les députés socialistes pendant une réunion de groupe le 16 août et son nom « ne rencontrerait pas d’opposition de principe chez les députés PS ». Plus politique et farouche opposant à la France insoumise, son profil tranche avec celui de Lucie Castets. En 2022, le président du mouvement « La Convention » avait fustigé le parti de Jean-Luc Mélenchon qui « fabrique des votes d’extrême droite en quantité industrielle ». Ce dernier avait d’ailleurs quitté le PS plusieurs mois auparavant après l’accord passé entre les Socialistes et les Insoumis en vue des législatives.
Si sa personnalité est appréciée d’une partie de la droite, des macronistes et des socialistes « canal François Hollande » pour ses positions en matière de laïcité et de sécurité, sa possible nomination provoque l’ire à la gauche de la gauche. « Ce n’est pas une solution qui est possible pour les écologistes », a lancé Marine Tondelier sur le plateau de France Info ce lundi. « Ce serait une trahison totale des millions d’électrices et d’électeurs du Nouveau Front populaire qui n’ont jamais voté pour un retour aux années Hollande », a quant à lui publié sur X le député LFI du Val-d’Oise, Paul Vannier.
Enfin, le nom du maire de Saint-Ouen, Karim Bouamrane circule également. Moins connu des Français, cet élu local enraciné a d’abord été communiste avant de rejoindre les rangs du PS en 2014 et d’être élu maire en 2020. Sur le plan des idées, l’homme de 51 ans n’est pas très éloigné de Bernard Cazeneuve. Il n’a pas hésité à mettre en œuvre dans sa ville des mesures de sécurité fortes à l’instar de l’augmentation du nombre d’agents de police municipale ou un couvre-feu pour les mineurs non-accompagnés à partir de 22 heures. Il est aussi un fervent critique de la France insoumise. Dans un récent portrait du Figaro, il disait que les « chefs de file de LFI sont souvent des enfants d’aristocrates ou de bourgeois qui veulent tuer le père et se chargent de distribuer les bons ou les mauvais points de gauche ». Des propos qui ne seraient pas sans plaire à la droite, au bloc central et à une partie de la gauche, mais pour l’heure, il n’y a pas plus d’éléments concernant sa possible nomination.
Xavier Bertrand et Valérie Pécresse du côté de la droite
Au sujet des personnalités de droite pressenties pour être nommées Premier ministre, ce sont des noms plus connus du grand public qui sont évoqués, notamment ceux de deux anciens ministres de Nicolas Sarkozy : Xavier Bertrand et Valérie Pécresse.
Le président LR des Hauts-de-France est d’ailleurs « prêt à relever le défi », selon des propos des proches du président de « Nous France », rapportés par nos confrères du Figaro. Sa ligne politique chiraquienne et son intransigeance à l’égard du Rassemblement national sont des atouts non-négligeables qui pourraient l’aider à constituer une majorité solide allant d’une partie de la gauche aux LR, mais c’est sans compter les rapports plutôt tendus qu’entretient l’ancien ministre de la Santé de Jacques Chirac à la fois avec Emmanuel Macron, mais aussi avec l’un de ses principaux rivaux à droite, Laurent Wauquiez, qui n’est autre que l’actuel chef des députés LR à l’Assemblée nationale.
Quant à Valérie Pécresse, elle fait également partie des favoris pour devenir cheffe du futur gouvernement. En effet, la candidate malheureuse à l’élection présidentielle de 2022 s’est montrée assez proche d’Emmanuel Macron et du bloc central lors des Jeux olympiques. Le président de la République a d’ailleurs remercié son ancienne adversaire dans un entretien accordé à L’Équipe. De quoi éveiller quelques soupçons. Ce n’est pas la première fois que le nom de Valérie Pécresse est évoqué pour travailler avec Emmanuel Macron. Selon le média people Gala, lors d’une conférence de presse en mars 2022, une journaliste avait demandé au chef de l’État si « Valérie Pécresse, ou bien un autre candidat de droite, pourrait faire partie de son futur gouvernement s’il était réélu », ce à quoi l’intéressé avait répondu qu’il « n’excluait rien ». La nomination de l’ancienne ministre de l’Enseignement supérieur de Nicolas Sarkozy reste donc une hypothèse assez probable, mais ses positions libérales sur les questions économiques et administratives pourraient heurter la gauche.
L’hypothèse François Bayrou pour le bloc central ?
Du côté du bloc central, c’est le président du MoDem et maire de Pau François Bayrou qui n’exclut pas de prendre la relève de Gabriel Attal à Matignon. Au micro d’Apolline de Malherbe le 10 juillet dernier, le triple candidat à l’élection présidentielle avait fait savoir qu’il ne dirait pas « non » au poste de Premier ministre. « Personne n’écarte des hypothèses comme celle-là », avait-il déclaré.
L’homme désormais âgé de 73 ans et relaxé dans l’affaire des assistants des députés européens MoDem dispose d’une expérience politique solide pouvant renforcer l’hypothèse de sa nomination. Il a été député entre 2002 et 2012, il est maire de Pau depuis 2014, et a également été ministre de l’Éducation nationale sous les gouvernements d’Édouard Balladur et d’Alain Juppé. Le centriste est aussi le troisième homme de la présidentielle de 2007 avec 18,5 % des suffrages récoltés au premier tour.
Enfin, François Bayrou bénéficie d’une certaine popularité auprès des Français. Selon un sondage Ifop-Fiducial pour Paris Match et Sud Radio de juin 2024, 40 % d’entre eux ont une bonne opinion du président du MoDem. Son profil pourrait donc aider Emmanuel Macron à constituer une nouvelle majorité et à bâtir des compromis. Reste à savoir ce qu’il va décider à l’issue de la réunion avec les chefs de partis et de groupes parlementaires ce vendredi.
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