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Raqa : les antijihadistes bricolent pour « sauver des vies »

octobre 16, 2017 11:30, Last Updated: octobre 16, 2017 11:26
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Pendant cette longue campagne qui touche à sa fin, dans le nord syrien, les Forces démocratiques syriennes (FDS) ont reçu un appui militaire « high-tech » de la part des États-Unis et de la coalition internationale qu’ils dirigent.

Dans tous les domaines, bombardements aériens, armes, collecte de renseignements, l’alliance de combattants kurdes et arabes a bénéficié de la technologie militaire pointue de ses partenaires.

Mais pour chasser les jihadistes de leur ex « capitale » de facto, il a aussi fallu en revenir au système D, comme débrouillardise.

Dans un vaste entrepôt près de la vieille ville de Raqa, des combattants des FDS sont assis en tailleur sur un tapis poussiéreux. Face à eux, un tas de piles cylindriques trois volts, rouleaux de ruban adhésif, paquets de cigarettes vides et fils électriques.

Ils vont bricoler des batteries de fortune pour recharger les talkie-walkies utilisés par leurs commandants, pour communiquer entre les différents fronts de la ville.

Dans un bruit de tirs d’artillerie et de frappes aériennes qui résonne non loin, la chaîne d’assemblage se met au travail. Un combattant assemble huit piles, un autre prépare le ruban adhésif qui va les entourer.

Pendant ce temps, un troisième combattant retire la feuille d’aluminium des paquets de cigarettes et commence à la fixer sur les fils électriques récupérés ou arrachés dans ce bâtiment délabré qui sert d’atelier.

« Il faut que nos talkie-walkies soient opérationnels 24 heures sur 24 mais ils ne sont vraiment pas terribles », explique le commandant Sevger Himo.

Leur batterie ne dure pas plus de trois heures, ce qui oblige à les changer souvent, parfois sous le feu, ou en pleine opération de secours de civils.

Mais avec les batteries que les FDS bricolent, ils ont jusqu’à deux jours d’autonomie.

Ces accessoires de fortune sont omniprésents sur le front de Raqa, notamment près de l’hôpital et du stade de la ville, les deux secteurs où des jihadistes résistent encore.

Les combattants des FDS engagés dans ces zones sont souvent coupés de leur base arrière pendant des jours. Le talkie-walkie est donc leur seul lien avec l’extérieur.

Ces batteries bricolées « ont sauvé plus d’une vie », explique Himo, jeune combattant au visage poupin. « De la nécessité naît l’invention, comme on dit ».

« Les armées nationales ont leurs propres usines (…) mais nous, nous appuyons sur les choses qu’on peut trouver et on s’ajuste », dit-il.

Fondées en 2015, les FDS sont composées de jeunes qui bien souvent n’ont jamais reçu de formations militaires préalables. A Raqa, certains se battent en baskets, voire en sandales en plastique.

Dans un bâtiment qu’ils utilisent comme base un peu en retrait du front, près de l’hôpital, les FDS ont installé un système primitif d’alerte.

Ces bouteilles en plastique écrasées disséminées dans un escalier menant au premier étage, explique le commandant Gabar Derek, ne sont pas des déchets.

« Si quelqu’un cherche à monter l’escalier la nuit, il va marcher sur ces bouteilles et faire du bruit, alertant ainsi les combattants de garde à l’étage », explique le commandant barbu. Ailleurs, ils ont utilisé un fil relié à une cloche pour le même usage.

Mais une des inventions préférées des FDS reste un engin explosif maison baptisé « la mèche ».

Ces paquets un peu difformes, de la taille d’un melon, sont remplis de TNT, entourés de gros scotch, pourvus d’une grande poignée en tissu et d’une longue mèche d’environ 20 cm.

« On utilise la poignée pour en porter quatre ou cinq en même temps », explique Mohammad, avec animation. Il porte quatre de ces engins autour du cou et explique fièrement qu’ils sont « faits maison, localement ».

Les FDS ont refusé à l’AFP la permission de visiter l’usine, dans la périphérie de Raqa, où sont fabriquées ces « mèches », l’arme parfaite pour contrer notamment les snipers de l’EI.

« On les lance dans les rues surveillées par les snipers, elles font plein de poussière et nous on peut traverser sans que les snipers nous voient », assure Mohammad.

Les explosifs plus conventionnels marchent moins bien parce qu’ils ne produisent pas un écran de fumée aussi efficace ou une explosion aussi bruyante.

« Et s’il y a un bunker ou un tunnel (de l’EI), on en jette une dedans. Et une deuxième si ça ne suffit pas », ajoute Mohammad.

« Ce truc sauve des vies », lance joyeusement le combattant FDS avant de partir, avec une « mèche » et un briquet, dans la rue pleine de gravats pour suivre l’avancée des siens.

 

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