La promesse de la réforme régionale était l’un des premiers engagements forts de Manuel Valls, prononcé en 2014. « La France est prête à ces réformes et notamment celle du mille-feuille territorial », affirmait-il alors. À l’heure où les nouvelles capitales régionales sont presque définitivement acquises, de nombreux élus et observateurs politiques déplorent l’incohérence du projet, encore loin de remplir ses promesses.
Au départ, la réforme prévoyait la suppression des départements et la division par deux du nombre de régions. Suite à la levée de bouclier d’élus refusant la disparition des départements pour des raisons d’« identité », le Premier ministre a mis de l’eau dans son vin. Un débat-fleuve s’est amorcé ensuite pour le choix du redécoupage ; après une nuit de délibération douloureuse pour les députés présents, le premier volet de la réforme voyait le jour. La France sera divisée en 13 régions, une mesure « mieux à même de peser, d’agir sur le développement économique et la cohésion des territoires », soutenait Manuel Valls.
Une réorganisation touchant 27 000 fonctionnaires
Les nouvelles capitales de régions désignées récemment par le Premier ministre entreront en fonction dès le 1er janvier 2016. À ce jour, le gouvernement a confirmé Lille (Nord-Pas-de-Calais-Picardie), Dijon (Bourgogne-Franche-Comté), Rouen (Haute-Normandie et Basse-Normandie), Lyon (Auvergne-Rhônes-Alpes), Toulouse (Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées) et Bordeaux (Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes) pour prendre ce rôle. À noter, ces capitales qui seront les prochaines préfectures ne sont pas forcément les sièges de régions. Manuel Valls a signalé en Conseil des ministres que la liste doit encore être validée « avant le 1er octobre 2016, après avis des conseils régionaux issus du renouvellement de fin 2015 ».
L’un des objectifs poursuivis par l’exécutif est de ne léser ni fonctionnaires ni élus en place. Si l’on compte quelques suppressions de postes (9 postes de préfet de région, 9 postes de directeur d’agence régionale de santé et 63 postes de directeur régional de l’État), Manuel Valls a assuré que « ces fonctionnaires feront toujours partie des effectifs. On ne les pousse pas dans l’escalier ». Sur les 27 000 fonctionnaires en poste dans les directions régionales, 2 000 à 3 000 seront concernés par des mesures de mobilité professionnelle.
Le redéploiement sera donc complexe. Pour que les effectifs « demeurent stables », le gouvernement envisage de se donner trois ans pour redéployer les directions régionales. Pour exemple, en Alsace-Champagne-Ardennes-Lorraine, la direction régionale de l’alimentation siègera à Châlons-en-Champagne alors que la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement sera à Metz.
« Aucun des objectifs n’est rempli »
« Lorsque la réforme territoriale avait été lancée, les mots d’ordre étaient : simplifier, économiser l’argent public, rationaliser les structures. Aujourd’hui, aucun de ces objectifs n’est rempli », déplore Jean Luc Lebœuf, directeur général des services de la ville et de la communauté d’agglomération de Quimper. Une analyse confirmée par le changement de ton dans les déclarations successives: alors que le gouvernement pariait sur une économie de 25 milliards réalisée sur la simplification du mille-feuille administratif, puis révisé ce montant à 10 milliards, on n’entend plus aucune promesse à ce jour.
La création d’entités administratives plus grosses, ainsi que la réorganisation des effectifs vont coûter plus que prévu. « Plus les ensembles administratifs territoriaux ou non-territoriaux sont gros, plus ils génèrent des frais généraux. On l’a vu avec l’intercommunalité : pour la mettre en place, il a fallu recruter 200 000 fonctionnaires, qui sont venus s’ajouter aux fonctionnaires communaux », relève Jean-Luc Lebœuf. De plus, on note que certains budgets communaux ont déjà été réaffectés pour supporter le coût des fusions ; c’est le cas de communes d’Alsace-Lorraine.
Pour finir, la réforme peine à démontrer le fait qu’elle puisse rendre compétitives les nouvelles régions, car elle ne s’appuie sur aucun modèle existant ailleurs, et tend à gommer des inégalités peu marquées au regard de ce qui se voit dans d’autres pays. Même si à ce jour il semble quasi-impossible de faire marche arrière dans le processus du projet, le redécoupage peine toujours autant à s’imposer dans les esprits.
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