« Il a tué le père », juge une source Renaissance. En prenant rapidement la présidence du groupe à l’Assemblée, Gabriel Attal précipite une autonomisation, voire une « rupture » avec Emmanuel Macron qui, sans parvenir à imposer ses volontés, a jugé « désastreux » le « spectacle » donné par son ex-majorité.
Gabriel Attal a été élu, obtenant 84 voix sur les 98 députés inscrits à ce scrutin interne. 7 ont voté blanc et 7 autres se sont abstenus.
🇫🇷 Félicitations à @GabrielAttal, élu président du groupe @DeputesRE à l’Assemblée nationale ce matin ! pic.twitter.com/d6l7Aa81oo
— Renaissance (@Renaissance) July 13, 2024
Il n’y aura peut-être plus très longtemps de groupe « Renaissance » à proprement parler. Le chef du gouvernement – pour encore quelques jours – a fait savoir que sa première proposition serait de le renommer « Ensemble pour la République ».
Une page à tourner pour Gabriel Attal, qui promet dans sa profession de foi de tirer « toutes les leçons acquises depuis 2017 et plus encore depuis 2022 », et ne mentionne à aucun moment Emmanuel Macron.
Seul candidat, le député des Hauts-de-Seine sera formellement intronisé samedi matin, à l’issue d’un vote électronique auxquels sont conviés les députés rattachés au groupe (95 vendredi midi).
Un « spectacle désastreux »
Une formalité qui vient conclure une semaine tendue pour les macronistes, entre les rumeurs persistantes de candidatures d’Élisabeth Borne ou Gérald Darmanin face à Gabriel Attal, ou celle d’un baroque trio Attal-Borne-Darmanin entourant le président sortant Sylvain Maillard. Pour ne rien arranger, de nombreux députés sortants ont longuement pesé le pour et le contre avant de se rattacher au groupe.
De quoi courroucer le chef de l’État qui a déploré un « spectacle désastreux » lors d’une réunion à l’Élysée vendredi midi, où il a convoqué les principaux chefs de Renaissance, les rappelant à une « nécessité de loyauté au projet » entamé en 2017, selon un proche. « Le Président ne voulait pas de Gabriel au groupe. Mais il est plus fort et la force va à la force », estime un parlementaire Renaissance.
Un proche de M. Macron résume la semaine, acide : « avant de partir à Washington (mercredi), le président avait demandé d’attendre septembre pour désigner un successeur afin de préserver l’unité du groupe. À partir du moment où il avait un pied dans l’avion, Attal dit qu’il est urgent de faire des élections… »
Quant à Gérald Darmanin et Élisabeth Borne, « ils ont envisagé d’être candidats et ne l’ont pas été, c’est tout. Il n’y a pas eu d’arrangement », écarte un conseiller de l’exécutif, rejetant l’idée d’un président tirant les ficelles pour empêcher son Premier ministre d’avoir gain de cause. Mais de combien de ficelles dispose encore Emmanuel Macron, fragilisé par une dissolution qui a affaibli son camp au Parlement ? « On n’est plus dans une situation où l’Élysée peut promettre des postes de ministre », reconnaît le même conseiller de l’exécutif.
« Il va découvrir l’indépendance de son camp », prédit une source Renaissance. « C’est pas une autonomisation c’est une rupture », appréhende un député macroniste, soupirant devant la bataille de chefs pour la présidence du groupe au détriment, selon lui, de débats internes sur les « lignes programmatiques » ou la montée du RN. « Est-ce qu’on créé des rampes de lancement pour 2027 ? », s’inquiète-t-il.
Au cours de cette réunion, ont également été évoquées la démission du gouvernement avant le 18 juillet et la candidature au perchoir de la présidente de l’Assemblée sortante Yaël Braun-Pivet.
« Le règne des règlements de compte »
Gérald Darmanin a, lui, jeté un pavé dans la mare vendredi, minorant la portée de l’élection de son Premier ministre en tant que chef des files des députés. « Les élections au sein du groupe ne règlent en aucun cas » les « problèmes majeurs », a écrit l’élu du Nord à ses collègues députés, citant « la ligne politique », mais surtout « le fonctionnement du parti », alors qu’on lui prête des vues sur la présidence de Renaissance.
« Des députés supporteurs de Gabriel Attal avaient fait pression toute la semaine en disant qu’ils n’allaient pas venir au groupe et finalement se rattachent. C’est probablement ça aussi qui a énervé Gérald Darmanin », grince un député.
Les deux dirigeants réussiront-ils à cohabiter ? « L’unité, comme la vie de couple, ne se décrète pas : elle se construit chaque jour », a malicieusement glissé l’ancien maire de Tourcoing dans son message. « C’est le règne des règlements de compte. Ils vont avoir leur congrès au mois d’octobre. Ça va être le congrès de Rennes en pire », prédit un membre du parti allié Horizons, en référence au Congrès qui avait déchiré le Parti socialiste en 1990.
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