POLITIQUE

Retraites, censure, destitution: quand la gauche compte sur les voix du RN, sans le dire

août 21, 2024 3:00, Last Updated: août 21, 2024 16:41
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Depuis sa victoire relative aux législatives, la gauche assure être en mesure d’abroger la réforme des retraites, de renverser un gouvernement de centre-droit, voire de destituer le président. Ce qui ne serait possible qu’avec le soutien, ou a minima la bienveillance du Rassemblement national.

La dernière initiative en date a tout d’un coup de poker. Dégainée par La France insoumise (LFI), la menace d’une destitution d’Emmanuel Macron est quasi impossible à mettre à exécution.

Simple question d’arithmétique: pour aboutir, cette procédure doit être votée par les deux tiers des députés, soit 385 élus. Avec ses 72 sièges, LFI est loin du compte, et même avec ses alliés du Nouveau Front populaire (NFP), la gauche n’en rassemble que 193, soit tout juste un tiers des voix. Ce qui semble déjà hors de portée, vu les premières réactions mitigées sinon hostiles des socialistes, écologistes et communistes.

Pourtant Manuel Bompard assure que sa proposition constitue « une possibilité crédible » car « les députés qui soutiennent le président de la République représentent moins d’un tiers des députés à l’Assemblée nationale ». Et de fait, les trois groupes de l’ex-majorité (EPR, Modem, Horizons) totalisent 166 élus.

Précédemment snobé, le soutien du RN devient incontournable

Mais pour parvenir à leur fin, les Insoumis auraient dans tous les cas besoin des 126 voix du RN, éventuellement complétées par leurs 16 associés ciottistes – ou par les 22 insaisissables indépendants du groupe Liot. Il leur faudrait de surcroit l’improbable appui des 47 députés de la Droite républicaine, d’autant plus indispensable qu’elle détient la majorité au Sénat – où la gauche ne détient qu’un gros quart des sièges.

A défaut de destitution, les patrons du NFP ont un autre moyen de pression pour imposer au chef de l’Etat leur candidate à Matignon, Lucie Castets. Ainsi, pour le socialiste Olivier Faure, « la réponse à une nomination d’un Premier ministre qui ne serait pas conforme à la tradition républicaine » – c’est-à-dire au choix d’une personnalité issue du camp arrivé en tête aux législatives – « est la censure ».

Encore faut-il pouvoir la mettre en œuvre. Ce qui nécessite de trouver une majorité absolue à l’Assemblée, soit 289 voix. Un chef de gouvernement étiqueté macroniste ou de droite pouvant a priori compter sur le soutien d’un bloc central plus ou moins large, le seul moyen d’atteindre ce seuil serait là aussi d’obtenir le soutien du RN.

Ce qui ne serait pas inédit, puisque l’extrême droite a déjà voté 9 des 26 motions déposées ces deux dernières années par la gauche contre Elisabeth Borne puis Gabriel Attal, sans succès. A l’inverse, les sept tentatives du RN n’ont reçu aucun soutien des membres de l’ex-Nupes.

Etincelles entre LFI et RN

Mais la dissolution a changé la donne. Désormais Marine Le Pen promet de censurer « tout gouvernement où des LFI et des écologistes auraient des responsabilités ministérielles ». Une ligne rouge largement partagée chez les députés macronistes et de droite, assez nombreux avec le RN pour faire tomber un éventuel gouvernement NFP.

Avec ou sans censure, la gauche espère tout de même marquer le coup sur le dossier emblématique des retraites. A l’instar de leur collègue Aurélie Trouvé la semaine dernière, les députés Insoumis martèlent depuis des semaines qu’il leur est possible « d’avoir une majorité pour abroger la réforme » honnie qui a repoussé l’âge légal à 64 ans.

Cette fois-ci, il suffit simplement d’obtenir davantage de voix « pour » que « contre ». La partie s’annonce toutefois serrée face au camp présidentiel qui a défendu ce texte l’an dernier et à une droite emmenée par un Laurent Wauquiez qui ne s’y était pas opposé – tout comme Eric Ciotti.

Une position décisive

L’attitude du RN, qui a également promis l’abrogation de cette réforme, sera donc décisive. Son porte-parole Laurent Jacobelli a fait savoir fin juillet que le parti à la flamme voterait la proposition de loi déposée par LFI, quand elle arrivera dans l’hémicycle.

Entre temps, les rôles pourraient bien être inversés, et la gauche plongée dans un cruel dilemme: en effet, Marine Le Pen et ses troupes ont l’intention d’inscrire leur propre texte à l’ordre du jour de leur « niche » parlementaire, le 31 octobre.

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