Le Conseil constitutionnel a rejeté mercredi une deuxième demande de référendum sur les retraites que la gauche avait déposée in extremis, avant la promulgation de la très contestée réforme gouvernementale, privant ainsi les oppositions d’un de leurs derniers recours contre le projet phare d’Emmanuel Macron.
Sans surprise, les Sages ont jugé que la proposition de référendum d’initiative partagée (RIP) portée par quelque 250 députés et sénateurs ne remplissait pas les critères requis. Le Conseil a notamment estimé que la demande de référendum « ne porte pas, au sens de l’article 11 de la Constitution, sur une réforme relative à la politique sociale », ce qui est le principal point qu’il devait vérifier.
Pour les partis de gauche, l’un des derniers espoirs passe par l’Assemblée nationale qui, le 8 juin, examinera une proposition de loi du petit groupe Liot (Libertés, Indépendants, Outre-mer et territoires) visant à abroger cette réforme qui recule l’âge légal de départ en retraite de 62 à 64 ans.
Soutien de la plupart des groupes d’opposition
Le texte inquiète le camp présidentiel, car il a le soutien de la plupart des groupes d’opposition. Le député Aurélien Pradié, en pointe dans la contestation de la réforme chez Les Républicains (LR), a indiqué mercredi qu’il le voterait, « par cohérence ». Son groupe politique, très divisé, détiendra une fois de plus la clé du scrutin. Une adoption par l’Assemblée nationale ne serait que le début d’un parcours parlementaire, mais la gauche prévoit de demander en pareil cas la suspension de la réforme.
Le groupe RN emmené par Marine Le Pen a aussi déposé mercredi sa propre proposition de loi pour « empêcher la retraite à 64 ans », un texte qui servira aux députés d’extrême droite de point d’appui pour le 8 juin. Les syndicats ont donné rendez-vous le 6 juin pour une nouvelle journée d’action, afin de « se faire entendre » des députés en amont.
Des actions de protestation ont été organisées mercredi après la nouvelle décision du Conseil constitutionnel. Quelques dizaines de personnes étaient rassemblées à proximité de la rue de Montpensier, où siègent les Sages. « On est là pour protester contre le déni démocratique qui a marqué l’ensemble du circuit de cette ‘contre-réforme’ des retraites », a déclaré à l’AFP Nicolas Bouchouicha, cheminot CGT.
Interdiction de tout rassemblement nocturne
Le préfet de police de Paris avait publié un arrêté pour interdire de 17h00 à 2h00 du matin tout rassemblement non déclaré ainsi que le port et le transport de feux d’artifices dans un large périmètre autour du Conseil constitutionnel.
Des rassemblements ont également eu lieu à Rennes et à Nantes, deux villes à la pointe de la contestation. « On n’attend rien du Conseil constitutionnel, ils ont déjà montré ce qu’ils représentaient, c’est-à-dire les intérêts du patronat et les intérêts du pouvoir », s’insurgeait Fabrice Lerestif, secrétaire départemental FO en Ille-et-Vilaine. « Le gouvernement prend acte de la décision », s’est contenté de réagir Matignon.
Le « chemin démocratique » de cette réforme est terminé, avait encore affirmé mardi la Première ministre Élisabeth Borne, qui a fixé avec le président Emmanuel Macron une nouvelle feuille de route et veut continuer d’« agir ».
D’autres étapes difficiles attendaient le RIP
Le deuxième RIP avait été initié le 13 avril à la veille de la décision très attendues du Conseil constitutionnel qui, sous la houlette de Laurent Fabius, avait validé l’essentiel de la réforme des retraites. Il avait parallèlement rejeté une première demande de RIP.
La loi avait été promulguée dans la foulée par M. Macron, mais la bataille s’est poursuivie. Toujours unie après 12 journées de mobilisations, l’intersyndicale a organisé un 1er mai « combatif » qui a rassemblé 800.000 personnes selon la police et 2,3 millions selon la CGT, mais a été marqué par des violences.
Dans le détail du RIP version 2, les parlementaires voulaient par une consultation populaire « interdire un âge légal de départ à la retraite supérieur à 62 ans », soit ce qu’ils avaient proposé dans la première demande retoquée par les gardiens de la Constitution.
Pour accroître leurs chances de succès, ils avaient complété leur proposition en prévoyant de demander également par référendum une « contribution significative des revenus du capital » au financement des retraites. Si d’aventure le RIP avait été validé, la course d’obstacles n’aurait fait que commencer, avec le recueil nécessaire de 4,8 millions de soutiens citoyens en neuf mois. D’autres étapes d’une procédure extrêmement complexe auraient suivi, avant un éventuel référendum.
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