François Bayrou a commencé lundi à consulter les forces politiques en même temps qu’il compose son gouvernement, en quête d’un chemin qui lui permettrait de faire passer, sans majorité, un budget, après le gel du précédent par la censure.
Le nouveau Premier ministre reçoit les groupes parlementaires de l’Assemblée nationale « par leur ordre d’importance » numérique dans cette chambre. À eux, ensuite, de décider de la composition de leur délégation.
Dans la soirée, il se rendra à Pau, la ville des Pyrénées-Atlantiques dont il est le maire depuis 10 ans, pour présider le conseil municipal, avec l’idée de conserver son mandat local.
Une « méthode plus positive »
Première reçue, la présidente du groupe des députés Rassemblement national, Marine Le Pen, accompagnée du chef du parti Jordan Bardella, a salué une « méthode plus positive » que son prédécesseur Michel Barnier, accusé de l’avoir reçue trop tardivement.
Marine Le Pen dit avoir « été écoutée » par le Premier ministre. « Il est tôt pour dire si nous avons été entendus », affirme-t-elle néanmoins, précisant être « trop expérimentée en politique pour être rassurée par une conversation. »
Elle a souhaité à cette occasion que le chantier du mode de scrutin à la proportionnelle, revendiqué aussi par François Bayrou, soit engagé « juste après le budget ». Elle a associé la proposition de la gauche de ne pas censurer le gouvernement si celui-ci n’utilise plus le 49.3, à des « tractations indignes ».
Marine Le Pen a également indiqué avoir « exprimé au Premier ministre les réserves » que le RN avait « sur un certain nombre de personnalités » susceptibles d’entrer au gouvernement.
François Bayrou s’est entretenu aussi avec Gabriel Attal, à la fois chef de file des députés macronistes et président du parti Renaissance, qui est ressorti sans un mot, son entourage expliquant qu’il souhaite être « une force facilitatrice, en soutien ».
Ressorti « sur (sa) faim »
Le Premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure, accompagné par les chefs de groupe, Boris Vallaud pour l’Assemblée et Patrick Kanner pour le Sénat, est ressorti « sur (sa) faim » du rendez-vous, lors duquel ils ont « beaucoup parlé » du pacte de non-censure, sans que l’échange soit « conclusif ».
« Si c’était pour avoir la même politique, nous le censurerions de la même façon », a-t-il prévenu.
L’ancien Premier ministre socialiste Lionel Jospin leur a recommandé de « rester dans l’opposition », mais de ne pas faire un « usage mécanique de la censure » pour que le gouvernement Bayrou « dure ».
La France insoumise, qui a déjà promis la censure, a refusé de rencontrer François Bayrou, par « crainte » selon Jean-Luc Mélenchon « que tout ça soit à nouveau une comédie ».
Parallèlement à ces consultations, qui se poursuivront mardi, le Premier ministre constitue son cabinet et peaufine son gouvernement qu’il veut resserré et dominé par des « personnalités » d’expérience.
François Bayrou, qui a revu dimanche soir le président, s’est défini comme « un Premier ministre de plein exercice et de complémentarité » avec le chef de l’État qui avait hésité jusqu’à la dernière minute à le nommer.
Il a choisi comme directeur de cabinet un proche, Nicolas Pernot qui a dirigé les services de la ville de Pau, dont M. Bayrou est maire. Son adjoint sera Pierre-Emmanuel Portheret, qui connaît bien aussi le chef du MoDem qu’il avait secondé à la Justice.
Les postes régaliens, domaine « réservé » au président
François Bayrou n’a toutefois pas l’intention de batailler sur les postes régaliens, qui relèvent du domaine dit « réservé » au président, selon une source gouvernementale.
Le MoDem détient actuellement le ministère des Affaires étrangères, avec Jean-Noël Barrot.
Reste à savoir si Sébastien Lecornu, un fidèle d’Emmanuel Macron que le chef de l’État a hésité à nommer à Matignon, souhaite rempiler à son poste.
M. Bayrou a reçu vendredi le ministre de l’Intérieur sortant Bruno Retailleau (LR), à qui il a laissé le pilotage de la crise à Mayotte, touchée par un ouragan meurtrier, comme un gage de la poursuite de sa mission au gouvernement. Mais le maintien de ce ministre divise.
L’ancien ministre de l’Industrie Roland Lescure, dont le nom avait aussi circulé pour Matignon, plaide lui pour « élargir » l’exécutif à des ministres socialistes, estimant que le pacte de non-censure « ne peut fonctionner que s’ils décident d’entrer au gouvernement ».
La France insoumise met en balance l’union de la gauche : « toute personne qui rentrera dans ce gouvernement se mettra à distance de manière irrémédiable du Nouveau Front populaire », a prévenu son coordinateur Manuel Bompard sur TF1.
Le temps presse pour la formation du gouvernement car c’est lui qui portera le nouveau projet de loi de finances pour 2025, interrompu par la censure, alors que le déficit s’aggrave et que les agences de notation froncent les sourcils.
L’ex-commissaire européen Thierry Breton et le premier président de la Cour des comptes Pierre Moscovici, dont les noms circulent pour entrer dans l’exécutif, se sont tous deux inquiétés lundi « d’une France à l’arrêt » et réclamé un gouvernement pour s’attaquer au désendettement sans lequel « il n’y a pas d’avenir ».
En l’absence de budget adopté dans les temps, les députés s’apprêtent à adopter une loi spéciale autorisant l’exécutif à prélever l’impôt et à emprunter pour financer l’État et la Sécurité sociale.
Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?
Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.