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Roumanie : « La Cour constitutionnelle a bien fait d’annuler le scrutin », estime Nicolas Lecaussin

décembre 12, 2024 12:08, Last Updated: décembre 12, 2024 14:35
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ENTRETIEN – Le directeur de l’Institut de Recherches Économiques et Fiscales (IREF), Nicolas Lecaussin, répond aux questions d’Epoch Times sur l’annulation de l’élection présidentielle en Roumanie. Il livre également son regard sur la situation en Géorgie.

Epoch Times : Nicolas Lecaussin, en Roumanie, le candidat prorusse Călin Georgescu est arrivé en tête du premier tour de l’élection présidentielle. Le second tour devait se tenir le 8 décembre, mais l’élection a été annulée par la Cour constitutionnelle sur fond de forts soupçons d’ingérence dévoilés par une note des services de renseignements. Călin Georgescu aurait bénéficié d’une vaste opération de promotion notamment via le réseau social chinois Tik Tok. La Russie est pointée du doigt. Que traduisent, pour vous, les révélations des services secrets roumains ?

Nicolas Lecaussin : Tout d’abord, je ne connaissais même pas ce candidat. Au départ, personne ne lui prêtait réellement attention. Les sondages le créditaient seulement de 4 % des voix en septembre. C’est un personnage étrange, sans parti, qui avait formulé tout au long de la campagne des propositions absurdes comme celles visant à lancer une industrie du cheval et des coopératives en Roumanie. Il avait même affirmé avoir parlé avec des extraterrestres et connaître la télépathie !

Mais ce dernier est arrivé en tête du premier tour de l’élection le 24 novembre en récoltant 22,9 % des suffrages. C’est à partir de ce moment-là qu’il a attiré l’attention et les services de renseignements roumains ont découvert qu’il avait bénéficié du soutien de milliers de comptes sur Tik Tok.

Il faut savoir qu’en Roumanie, ce réseau social est utilisé par tout le monde. En France, seuls les plus jeunes s’y inscrivent.Tous ces comptes ont enfreint la loi électorale. Huit pages sur dix sur Tik Tok s’ouvraient avec un message de ce candidat et, en plus, il n’était jamais précisé que c’était un message politique. Pourtant, la loi électorale l’oblige.

Par ailleurs, les services secrets roumains ont également découvert que Georgescu avait bénéficié de financements d’un montant de plus d’un million d’euros, alors qu’il n’avait pas déclaré d’argent dans ses comptes de campagne. La situation était donc assez louche.

Fallait-il annuler le scrutin ? Elena Lasconi, la candidate centriste opposée à Călin Georgescu a critiqué l’annulation de l’élection, estimant que le vote « aurait dû avoir lieu ».

La réaction de Lasconi est très maladroite. Je pense qu’elle a réagi de cette manière parce qu’elle a été mal conseillée et qu’elle pensait gagner.

À titre personnel, je pense, comme d’autres spécialistes, que la Cour constitutionnelle a pris la bonne décision.

Il est vrai que l’annulation de l’élection est arrivée un peu tardivement. La Cour aurait dû le faire quand Georgescu commençait à monter dans les sondages pour des raisons totalement obscures.

Quel serait aujourd’hui, l’intérêt pour la Russie de déstabiliser la Roumanie ?

Le même qu’elle a partout, notamment dans les pays limitrophes : soutenir et pousser des candidats qui lui sont favorables.

Une technique similaire d’ingérence via les réseaux sociaux a d’ailleurs été utilisée en Moldavie. Fort heureusement, grâce à la diaspora moldave qui a massivement voté pour la candidate pro-européenne Maia Sandu, cette tentative a échoué.

Mais en Roumanie, la problématique est plus complexe : il n’y a pas un, mais des candidats prorusses. C’est une autre technique employée par le Kremlin pour maximiser les chances de faire élire l’un de ses vassaux.

C’est ce qu’on appelle les « guerres hybrides ». Les services français en font régulièrement état dans leurs rapports.

Avons-nous, à l’heure actuelle, des éléments nous permettant d’affirmer que Pékin serait également derrière une campagne d’ingérence en Roumanie ?

J’ai lu les rapports des services secrets roumains. Il n’y a pas d’éléments concrets prouvant que Pékin est derrière cette ingérence. Mais, il est évident que Moscou n’aurait pas pu lancer cette opération sur Tik Tok sans l’aval de la Chine.

En Géorgie, des milliers de personnes manifestent régulièrement depuis l’annonce, par le parti au pouvoir « Rêve géorgien » de la suspension des négociations d’adhésion à l’UE jusqu’en 2028. La répression est violente. La semaine dernière, au moins trois leaders de l’opposition ont été arrêtés. L’un d’entre eux a même été violenté. Comment analysez-vous la situation dans ce pays du Caucase ?

À mon sens, la situation en Géorgie est encore plus difficile et grave qu’en Roumanie. 20 % du territoire du pays est occupé militairement par la Russie.

Ensuite, le parti au pouvoir « Rêve géorgien » est ancré depuis des années dans les sphères de l’administration et les commissions électorales. Ainsi, il peut aisément manipuler des administrations et des bureaux de vote. C’est ce qu’ils ont d’ailleurs fait.

Malheureusement, aujourd’hui, il met aussi en œuvre une répression féroce. Vous l’avez rappelé, des leaders de l’opposition ont été arrêtés. C’est une technique inspirée des Russes pour museler les voix dissidentes.

Heureusement que la présidente pro-UE de la Géorgie, Salomé Zourabichvili, par ailleurs franco-géorgienne, essaye de s’opposer à cette répression.

Pour être honnête, je ne sais pas comment cette révolution contre le pouvoir en place va se terminer. Ce parti s’oppose à la poursuite des négociations pour l’entrée de la Géorgie dans l’UE, alors qu’elles sont inscrites dans la constitution géorgienne, donc, la loi.

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