La Russie a récemment ouvert son port de Vladivostok, qu’elle occupe depuis 1860, à la Chine pour le transport maritime. Les observateurs considèrent cela comme un échange stratégique entre les deux pays, alors que leurs actions en Ukraine, autour de Taïwan et de la mer de Chine méridionale continuent d’aggraver les relations internationales.
Le 4 mai, l’administration générale des Douanes du régime communiste chinois a publié un avis annonçant le port russe de Vladivostok comme port de transit pour les marchandises chinoises. Cette décision entrera en vigueur le 1er juin. Les marchandises chinoises passant par Vladivostok seront classées dans la catégorie « commerce intérieur » et ne seront pas soumises aux droits d’importation et d’exportation.
Selon les médias officiels chinois, les coûts de transport seront considérablement réduits grâce à ce nouvel itinéraire. Auparavant, les marchandises provenant des provinces chinoises du Jilin et du Heilongjiang devaient être transportées par camion jusqu’au port chinois de Dalian, soit une distance de plus de 1000 kilomètres, avant d’être acheminées par voie maritime. Grâce à « l’ouverture » de Vladivostok, les camions n’auront plus qu’à parcourir environ 200 km de la ville de Suifenhe, dans le Heilongjiang, et de la ville de Hunchun, dans le Jilin.
Vladivostok : « Qui possède l’Orient »
Vladivostok a été très longtemps connue en Chine sous le nom de Yongmingcheng. Cette ville portuaire et sa région faisaient partie du territoire chinois et figuraient en tant que telle sur les cartes officielles chinoises depuis le XIIIe siècle. Plus tard, cette ville a été baptisée Haishenwai – le nom qu’elle a gardé en Chine jusqu’à aujourd’hui, parallèlement au nom impérial russe de Vladivostok, qui signifie littéralement « Qui possède l’Orient ».
La ville et la vaste région qui l’entoure sont la terre natale de l’ethnie mandchoue qui a été au pouvoir en Chine sous la dynastie des Qing. Cependant, cette région, ainsi que l’immense territoire de l’angle sud-est de la Sibérie, a été annexée par l’empire russe tsariste en 1858-1860 à la suite des « traités inégaux » russo-chinois (traités d’Aigun et de Pékin) imposés à l’empire de Chine après sa défaite dans la seconde guerre de l’opium.
Pendant les 163 années qui ont suivi, les provinces chinoises du Heilongjiang et du Jilin n’avaient pas d’accès à un port maritime relativement proche.
Les gouvernements de la République de Chine (RC) qui se sont succédé en Chine à partir de 1912, après la chute du régime impérial, n’ont jamais reconnu la légalité et la validité de l’annexion territoriale par la Russie stipulée dans les « traités inégaux ».
Après la Seconde Guerre mondiale, en tant que pays du côté des vainqueurs, le gouvernement de la RC a demandé le retour de sa souveraineté sur Dalian, Vladivostok, Sakhaline et d’autres régions encore occupées par la Russie communiste (l’Union soviétique). Cependant, en 1949, ce gouvernement a été vaincu par les communistes dans la guerre civile chinoise et s’est retiré sur l’île de Taïwan. Les communistes ont établi la République populaire de Chine (RPC) en Chine continentale.
Le régime chinois de l’ancien chef du PCC, Jiang Zemin, avait également cédé des territoires à la Russie dans les années 1990. En 2001, Jiang Zemin a signé avec Vladimir Poutine le « Traité de bon voisinage, d’amitié et de coopération » qui a couronné une décennie de rapprochement entre les deux pays et différents accords signés dans le cadre de ce rapprochement.
Ce traité a servi à Jiang de base pour officiellement reconnaître que les territoires chinois annexés par la Russie depuis l’époque impériale, dont certains incorporés dans l’Union soviétique à la fin de la Seconde Guerre mondiale, appartenaient à la Russie. Il a cédé de manière permanente plus de 1,5 million de kilomètres carrés de territoire, y compris Touva (Tangnu Wulianghai), l’ensemble de la rive gauche du fleuve Amour (Mandchourie-Extérieure) allant jusqu’au port stratégique de Vladivostok (Haishenwai) et la frontière coréenne, ainsi que l’île de Sakhaline – l’équivalent de plusieurs dizaines de Taïwan (36.000 km2).
Les médias chinois pro-PCC de l’extérieur de la Chine ont commencé à se réjouir de cette récente annonce, affirmant que l’ouverture de Vladivostok à la Chine est le dividende apporté à l’État-parti par la guerre russo-ukrainienne.
Cependant, Song Guocheng, professeur de l’université nationale Chengchi de Taïwan, a expliqué à Epoch Times qu’il n’y avait pas vraiment de raison de se réjouir de la possibilité pour la Chine d’utiliser ce port : « À l’origine, il vous appartenait, et maintenant on vous laisse l’utiliser. »
Échanges stratégiques dans un contexte de tensions
Le commentateur Yang Ning a écrit dans son article pour Epoch Times : « Aujourd’hui, Haishenwai (Vladivostok) est devenu l’estuaire maritime du Jilin, ce qui montre que depuis le début de la guerre russo-ukrainienne en 2022, sous les fortes sanctions de l’Occident, la puissance de la Russie a été gravement endommagée, car elle a subi des revers dans la guerre et son développement économique est lent. La Russie a dû renforcer sa coopération politique, économique et même militaire avec le PCC, et a même fait quelques concessions pour ouvrir son territoire, comme faire de Vladivostok un port pour le PCC, afin d’alléger la pression de la communauté internationale. »
Yang Ning a ajouté que, du point de vue de l’État-parti chinois, l’ouverture du port de Vladivostok n’est pas seulement bénéfique pour son économie, mais a également une importance pour ses capacités militaires.
« En effet, une fois que le PCC aura envahi Taïwan, l’Occident imposera certainement des sanctions au PCC. Il est possible que l’armée américaine coupe l’approvisionnement du PCC sur les routes telles que le détroit de Malacca et le canal de Suez. Les navires du PCC pourront alors utiliser Vladivostok pour emprunter la route de l’Arctique », a-t-il précisé.
Après son invasion de l’Ukraine en 2022, la Russie a été sanctionnée par de nombreux membres de la communauté internationale, tandis que l’agression du régime chinois à l’égard de Taïwan et dans la mer de Chine méridionale a également conduit à une escalade des tensions. Cependant, le volume des échanges commerciaux entre la Chine et la Russie a considérablement augmenté depuis lors.
En mars de cette année, le chef du PCC Xi Jinping s’est rendu en Russie et a signé avec Poutine une déclaration commune qui mentionnait, entre autres, le développement et la coopération régionale dans la région « Nord-Est-Extrême-Orient ».
Yuan Hongbing, expert en droit basé en Australie, a déclaré à Epoch Times que l’ouverture de Vladivostok à la Chine et le renforcement des échanges sino-russes montrent que Pékin a toujours soutenu Moscou en coulisses. La communauté internationale ne doit pas s’imaginer que le régime communiste chinois va cesser de soutenir la Russie.
« Les relations entre le PCC et la Russie représentent en effet une alliance entre criminels qui n’a pas de limites. Le principal soutien à l’invasion de l’Ukraine par la Russie est le PCC », a-t-il souligné.
Dans une précédente interview accordée à Epoch Times, Yuan Hongbing a rappelé que la Russie est le pays qui a annexé et occupé la plus grande superficie de territoires chinois au cours de l’histoire.
« Aujourd’hui, le PCC a formé une alliance avec le pays agressif qui a causé le plus de tort à la Chine dans l’histoire, ce qui montre que le PCC peut complètement vendre les intérêts nationaux de la Chine au profit de son propre régime. »
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