Nous ne savons pas comment se terminera l’invasion de l’Ukraine par la Russie mais, quelle qu’en soit l’issue, le monde sera changé à jamais.
D’ores et déjà, le consensus installé après l’écroulement du bloc soviétique – souvent appelé Pax Americana et qui a permis au monde de rester relativement pacifique en évitant les conflits entre les grandes puissances – s’effondre rapidement. La Chine, la Russie et l’Iran ont formé un triumvirat qui remet directement en cause ce consensus. Certains éléments, comme l’hégémonie du dollar américain, sont menacés, car la Russie et d’autres nations dans l’orbite chinoise acceptent d’utiliser le yuan chinois à la place du dollar. La sécurité mondiale des voies maritimes – principalement protégées par l’Amérique soutenue par ses alliés – est désormais menacée. L’invasion non provoquée de l’Ukraine souveraine par la Russie est une attaque directe contre l’ordre mondial.
La façon dont tout cela va se dérouler rend perplexes nos meilleurs génies géopolitiques, et nous, les simples mortels, pouvons être pardonnés si nous trouvons tout cela déroutant. Il y a tellement d’éléments périphériques dans cet événement épique – les jeux politiques en Amérique et en Europe, le « wokisme », etc. – qu’il est parfois facile de se perdre dans les détails. À cela s’ajoute la réaction impulsive des gens qui s’opposent à tout ce que leurs rivaux idéologiques soutiennent, comme, par exemple, dans le cas « si la gauche soutient l’Ukraine, alors les conservateurs doivent s’y opposer ».
Dans ce contexte, pour avoir une meilleure idée de ce qui est réellement en jeu, il serait peut-être utile de s’adresser directement aux réactions des pays les plus directement touchés par l’invasion russe. Il s’agit des nations qui ont été maintenues pendant un demi-siècle sous l’étreinte de l’ours russe.
La Pologne est le plus grand de ces anciens satellites soviétiques. Elle n’est certainement pas « woke ». Les pays d’Europe de l’Est sont résolument anti-woke. En ce qui concerne la politique américaine, les Polonais peuvent trouver que la lutte entre Biden et Trump n’est qu’un bon divertissement. Qui est président des États-Unis à un moment donné est important pour les Polonais uniquement pour savoir à quoi s’attendre de la part de ce président. Quant aux chefs d’État canadien ou japonais, la plupart des Polonais ne connaissent probablement même pas leurs noms.
Mais les Polonais sont certainement très attentifs à ce qui se passe à l’Est, en Russie. Cela s’explique par le fait qu’ils vivent à côté de l’ours russe – ou sous son étreinte – depuis environ 1000 ans. L’ex-Premier ministre canadien, Pierre Elliott Trudeau, a dit un jour que pour le Canada vivre à côté de l’Amérique était comme dormir à côté d’un éléphant – quand il bougeait, les Canadiens étaient affectés. Pour les Polonais, la comparaison avec l’ours russe serait probablement plus sinistre : lorsque l’ours russe devient grincheux, il vous dévore.
En effet, la Pologne a une longue et sanglante histoire avec cet ours. Il suffit de mentionner le fait qu’Hitler et Staline avaient conclu un pacte diabolique : les deux mégalomanes allaient se partager la Pologne. Le 1er septembre 1939, l’armée nazie d’Hitler a attaqué la Pologne de l’ouest en déclenchant la Seconde Guerre mondiale. Le 17 septembre, l’armée soviétique de Staline a poignardé dans le dos la Pologne affaiblie en l’attaquant de l’est et en annexant plus que la moitié de son territoire. L’année suivante, alors qu’Hitler envahissait l’Europe de l’Ouest, Staline a envahi et annexé de grandes parties de la Finlande et de la Roumanie, ainsi qu’englouti les trois pays baltes – la Lituanie, l’Estonie et la Lettonie.
Ce qu’Hitler a fait à la Pologne après son invasion est bien connu. Il a notamment organisé des rafles parmi les juifs du pays et en a assassiné la majeure partie.
Pourtant, le rôle de Staline dans la mutilation de la Pologne n’est pas aussi bien connu. Le massacre de Katyń, en 1940, de milliers d’officiers polonais prisonniers de guerre et d’autres membres d’élites polonaises, n’est que l’une des nombreuses atrocités commises par les forces d’occupation russo-soviétiques. Staline a ensuite abattu une grande partie de la classe moyenne polonaise et a placé le pays sous le joug communiste pendant le demi-siècle suivant. Il est donc juste de dire que la Pologne ne veut plus de domination russe.
L’invasion brutale de l’Ukraine par Poutine a provoqué une onde de choc dans toute la Pologne. Comme les Ukrainiens, les Polonais sont prêts à se battre jusqu’à la mort pour éviter que cela ne se reproduise dans leur pays. C’est pourquoi ils renforcent actuellement leurs armées de manière intensive et aussi rapidement que possible. Ils savent exactement ce qui les attend s’ils ne le font pas.
Et c’est essentiellement ce que font tous les anciens satellites soviétiques. Les trois pays baltes font tout ce qu’ils peuvent pour éviter de devenir la prochaine Ukraine. La Slovaquie, la République tchèque, la Roumanie et les autres (à l’exception de la Hongrie d’Orban qui joue son propre jeu) savent exactement quel sort les attend s’ils ne s’arment pas immédiatement et ne protègent pas leurs frontières orientales.
En Scandinavie, la sonnette d’alarme a été tirée lorsque Poutine a lancé son invasion à grande échelle de l’Ukraine. La Suède et la Finlande, qui avaient réussi à vivre depuis un bon moment dans un état de neutralité difficile avec la Russie, ont annoncé pratiquement le lendemain de l’invasion qu’elles chercheraient immédiatement à adhérer à l’OTAN – l’alliance qui prévoit une riposte collective à l’agression contre l’un de ses membres. Ces pays savaient exactement ce que cette invasion signifiait. Leur décision de demander l’adhésion à l’Alliance atlantique n’avait rien à voir avec la politique américaine, mais tout à voir avec la détermination d’éviter d’être aspiré dans l’étreinte russe. Mardi dernier, la Finlande est devenue officiellement le 31e pays membre de l’OTAN.
Il y a de nombreuses préoccupations concernant la guerre en Ukraine et des réponses à y apporter. Toutefois, le fait que les voisins de la Russie soutiennent fermement l’Ukraine, tout en se préparant à se défendre, prouve clairement que nous, en Occident, devrions également soutenir l’Ukraine, quelles que soient nos orientations politiques.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.
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