Le ferry entre la France et l’Algérie est le moyen privilégié par les binationaux algériens pour leur voyage estival au « bled ». Mais sur le navire, les agents de bord sont parfois débordés par le comportement des passagers.
Après avoir acquis votre billet pour 200 euros environ, vous voilà dans la queue pour installer votre voiture sur le bateau. Trois heures d’attente plus tard, une fois passés les différents contrôles de sécurité, vous pénétrez sur le car-ferry Méditerranée (dit « le Med »), l’un des immeubles flottants de Corsica Linea, leader sur les voyages Marseille-Alger. 486 cabines, 2800 passagers, 173 membres d’équipage, 165 mètres de long et une coque rouge pimpante. On ne peut pas le louper.
À l’intérieur, vous n’échappez pas à la cohue que génère l’accueil de tout ce monde et la distribution des chambres. Autour de vous, beaucoup de familles. Les mamans s’agitent. Certains enfants crient. Un long couloir de moquette rouge vous conduit à votre cabine, tarif medium. Vous n’aviez pas les moyens pour la chambre luxe mais vous vouliez éviter les cabines low cost en fond de coque, réputées infestées de puces et de « squatteurs » (passagers clandestins). 22 heures de périple vous attendent. Par le hublot, Marseille s’éloigne et l’on ne distingue bientôt plus que la tour CMA-CGM.
Un retour vers son pays d’origine
« 80 à 90 % des passagers sont des résidents en France qui se rendent en Algérie pour un voyage aller-retour, » nous indique Corsica Linea. Ces résidents sont pour la majorité franco-algériens. Ils vont au pays pour rendre visite à leurs proches ou dans une moindre mesure pour des raisons professionnelles. Rien d’étonnant si la moitié des trajets concerne la période estivale. On retrouve ainsi beaucoup de familles à bord.
Historiquement, le transport maritime est l’option préférée des Algériens de France pour se rendre au Maghreb, en particulier via le port de Marseille. « L’importance du marché algérien est allée en augmentant » avec les années, nous confie l’entreprise de transport. En 2022, ils étaient 450.000 à se rendre en Algérie depuis la France via Corsica Linea, soit l’équivalent de la population de Toulouse.
D’après un douanier de Marseille contacté par Epoch Times, le Méditerranée est aussi le vecteur d’un trafic de cigarettes de très grande ampleur : « 90 % des gens venant d’Alger transportent plusieurs cartouches illégalement. » À la marge, certains en ont fait leur métier et importent ainsi en France jusqu’à 900 cartouches, en espérant passer sous les radars.
Un échantillon des quartiers sensibles
Ces 2800 passagers font vivre un enfer à leurs compatriotes et aux agents de bord qui subissent une ambiance proche de celles des banlieues françaises.
D’abord, ces derniers pointent la saleté d’une grande majorité des familles. Léa (prénom modifié), valet de cabine, raconte à Epoch Times : « En une nuit et une journée, elles (les familles, ndlr) arrivaient à recouvrir le sol de chips. Beaucoup de noyaux de dattes sont retrouvés dans les salles de bain, à côté de la poubelle. Trop de déchets ne sont pas jetés et laissés sur les bureaux des cabines, ou un peu partout. Des raisins entiers sont fréquemment retrouvés dans la tuyauterie des lavabos. »
Une négligence qui se transforme parfois en destruction avec des cabines retrouvées saccagées, sans raison identifiable. Les dépôts d’ordures atteignent même les espaces communs, provoquant des plaintes de la part des voyageurs. « Ce genre de situation n’arrive jamais sur les bateaux qui vont en Corse, » se désole l’employée de Corsica Linea, qui exploite également des trajets vers Ajaccio. Le Méditerranée avait été entièrement rénové pour accueillir des réfugiés ukrainiens en 2022 mais il n’a fallu qu’un an pour qu’il retrouve son état d’origine, délabré.
À cette crasse s’ajoutent les trop fameuses « incivilités ». Elles commencent par un manque de politesse envers le personnel : « Ils fuient totalement le regard, ne disent pas bonjour, ne sourient absolument jamais, disent rarement merci. » Jusqu’à l’insulte. « Excédée, une collègue d’origine algérienne m’a dit qu’elle avait honte de ses compatriotes, » raconte Léa. Cet incivisme provient surtout des plus jeunes voyageurs et ne vise pas particulièrement les femmes. La violence, bien présente, concerne plutôt les passagers entre eux : « Ces deux dernières semaines, il y a eu deux bagarres qui ont chacune mené à un KO. »
Enfin, le vol est généralisé. Rouleaux de papier toilette, serviettes et oreillers disparaissent en nombre à chaque traversée. Déjà en 2021, un député algérien relayait sur Facebook les plaintes de voyageurs qui évoquaient la perte d’objets à l’intérieur du navire.
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