L’art automobile a-t-il atteint son apogée ? Ou le manque d’audace dans le design est-il une stratégie ? La question peut se poser en parcourant le salon de Francfort, où l’on peine parfois à distinguer les nouveaux modèles des anciens.
Loin d’être un signe de paresse, la tendance à adapter légèrement le style à chaque nouvelle génération de voitures permet aux marques de soigner leur image, fidéliser leur clientèle et préserver leur rentabilité, assurent professionnels et experts.
Ce sont les constructeurs allemands qui ont été les pionniers de ce principe d’évolution en douceur. « Chez Audi et Volkswagen, même les amateurs de voitures en arrivent à être perdus pour identifier les différentes générations », s’amuse un professionnel du secteur préférant garder l’anonymat.
Ce phénomène se retrouve au sein des segments et des marques du groupe VW : le nouveau gros 4×4 Porsche Cayenne, présenté cette année à Francfort, ressemble comme deux gouttes d’eau à l’ancien.
La marque de Stuttgart, il est vrai, a lancé la tendance avec son coupé 911 qui garde le même profil depuis… 1963.
« La notion d’image est extrêmement importante (…) le produit en soi devient une marque, et c’est très juteux pour une entreprise automobile », indique à l’AFP Alexandre Malval, chef du design de Citroën.
Quelle stratégie du design
Pour lui, en design, « les Latins aiment bien, c’est dans leur culture, essayer de repartir d’une feuille blanche, parfois de manière excessive ». En revanche, « l’approche germanique est beaucoup plus conservatrice ».
BMW, après une révolution stylistique controversée lancée par le designer Chris Bangle sur ses grosses berlines série 7 de 2001 et série 5 de 2004 toutes en angles torturés, est rentré dans le rang.
Et sur les stands du salon de l’automobile, qui ouvre ses portes au public samedi après les médias et les professionnels, le phénomène semble faire tache d’huile à tous les niveaux de prix : Bentley Continental GT, Honda CR-V et Dacia Duster flambants neufs gardent un furieux air de famille avec leurs prédécesseurs.
« La voiture est connue et reconnue sur les marchés et très appréciée, on n’a pas voulu du tout repartir d’une page blanche, mais plutôt capitaliser sur le côté robuste, sympathique » du Duster, qui s’est vendu à deux millions d’exemplaires sous les marques Renault et Dacia depuis 2010, indique à l’AFP le chef du design de cette dernière marque, David Durand.
« Pourtant, on a tout redessiné, il n’y a pas une pièce commune », promet-il.
« Une marque va être capable de vous dire, ‘elle ressemble à l’ancienne mais on a changé 90% des composants' », remarque Marc Mechaï, responsable du secteur automobile chez Accenture.
Limiter les risques
Flavien Neuvy, directeur de l’Observatoire Cetelem de l’automobile, identifie une « volonté de limiter les risques » de la part des constructeurs qui jouent gros sur chaque nouvelle voiture, surtout en cœur de gamme où les volumes se comptent en centaines de milliers d’unités.
« Il peut y avoir soit une frilosité marketing, soit une volonté délibérée de préserver un succès, ou peut-être des contraintes techniques qui nous empêchent finalement d’aller aussi loin qu’on le souhaiterait », complète M. Malval.
Ces évolutions parfois timides répondent aussi à un impératif économique dans un secteur où de plus en plus de voitures passent par des canaux de location longue durée.
« On sait que le design est quand même un des principaux critères d’achat avec le prix et la fiabilité », rappelle M. Neuvy. « Quand on retouche la silhouette, les modèles de la série précédente prennent un coup de vieux qui se retrouve dans la valeur du parc existant ».
Or, cette « valeur résiduelle » constitue un élément déterminant dans le calcul des mensualités de location. Si elle résiste mieux, les loyers calculés en début de leasing seront plus bas.
Du coup, « le véhicule, y compris sur les nouvelles générations, devient plus attractif parce qu’on sait que la valeur résiduelle va mieux tenir », souligne M. Mechaï.
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