Selon des experts, l’arrestation de hauts gradés de l’armée chinoise témoigne d’une crise politique

Certains analystes ont déclaré que la purge suggère que les luttes politiques intestines au sein du régime communiste se sont intensifiées

Par Lily Zhou
26 mars 2025 16:50 Mis à jour: 26 mars 2025 16:50

Dans ce qui a été décrit par un expert de la Chine comme étant potentiellement l’un des « développements les plus dangereux dans le monde aujourd’hui », le général He Weidong, troisième commandant de l’Armée populaire de libération (APL) de la Chine communiste, et plusieurs autres chefs militaires, auraient été arrêtés en pleine purge de l’armée par le régime chinois.

On ignore si le chef du Parti communiste chinois (PCC) Xi Jinping ou ses ennemis politiques sont à l’origine de la purge présumée de la clique de Fujian, l’un des deux groupes considérés comme ses alliés. L’éventualité du second scénario suscite des inquiétudes : Xi Jinping pourrait devenir plus agressif sur la scène internationale s’il estime qu’il est sur le point de perdre le pouvoir.

He Weidong, deuxième vice-président de la Commission militaire centrale (CMC) du PCC et membre du Politburo du Parti, n’a pas été vu en public depuis le 11 mars, quand il a assisté à la session de clôture du Congrès national du peuple (CNP), l’organe législatif du régime chinois et le plus haut organe du pouvoir de l’État.

Pendant ces deux semaines, M. He et le premier vice-président de la CMC, Zhang Youxia, ont tous deux été absents d’un séminaire marquant l’adoption par le PCC de la loi anti-sécession il y a 20 ans. Cette loi vise les soi-disant séparatistes de Taïwan. Ils n’ont pas non plus été vus aux côtés de M. Xi lors de sa visite dans la province du Yunnan, dans le sud-ouest de la Chine. Leurs absences ont été considérées comme inhabituelles, car ces événements étaient auparavant suivis par au moins l’un des deux vice-présidents de la CMC.

Zhao Lanjian, un ancien journaliste d’investigation chinois aujourd’hui installé aux États-Unis, a récemment déclaré à Epoch Times qu’au moins trois sources lui avaient confirmé que M. He avait été arrêté le 11 mars.

Selon Zhao Lanjian, qui a été le premier à signaler l’arrestation présumée de M. He sur le média social X le 13 mars, le général de l’APL a été emmené peu après la session de l’APN et a ensuite été victime d’une crise cardiaque avant d’être placé en détention à l’hôpital 301 – un des hôpitaux de premier plan de l’APL qui traite les hauts fonctionnaires du PCC. L’hôpital est souvent mentionné dans les rumeurs concernant les assassinats politiques au sein du régime chinois.

Zhao Lanjian a cité l’une des sources, affirmant que la CMC examinait les discours de M. He en sa qualité de vice-président de la CMC, ainsi que les documents, les photos et les vidéos le concernant, afin de supprimer son influence.

L’information a été corroborée par Cai Shenkun, un commentateur des affaires chinoises qui avait déjà révélé les révocations de l’ancien ministre de la Défense Li Shangfu et de l’amiral Miao Hua.

Dans une émission diffusée sur YouTube le 24 mars, M. Cai a indiqué que les chefs de commandement de théâtre de l’APL avaient été informés de l’arrestation de M. He.

Le ministre chinois de la Défense Dong Jun assiste à la cérémonie d’ouverture du 11e Forum Xiangshan au Centre de convention international de Beijing, le 13 septembre 2024. (ADEK BERRY/AFP via Getty Images)

D’autres rumeurs d’arrestations et d’absences

Selon Zhao Lanjian et M. Cai, outre M. He, d’autres commandants de l’APL appartenant à la faction de Fujian auraient également fait l’objet d’une enquête.

Zhao Lanjian a fait savoir que le secrétaire de M. He avait fait l’objet d’une enquête, peut-être pour avoir divulgué des informations. Zhao Lanjian a également indiqué que parmi les personnes arrêtées figuraient Zhao Keshi, ancien chef du département de la logistique générale de l’APL, et plusieurs autres commandants militaires de la province de Fujian, où Xi Jinping a passé 17 ans avant son ascension au pouvoir.

Le 25 mars, M. Cai a rapporté que Lin Xiangyang, commandant du Commandement du théâtre oriental, avait été arrêté le 24 mars pour avoir divulgué un « prétendu plan de bataille pour le détroit de Taïwan ». On ne sait pas exactement à qui les informations auraient été transmises.

Par ailleurs, l’absence du ministre de la Défense, Dong Jun, lors d’une réunion plénière du Conseil d’État au début du mois a également suscité quelques interrogations.

Jusqu’à présent, Pékin n’a pas commenté les arrestations signalées ni fourni d’explication sur l’absence de M. Dong.

Le ministère chinois des Affaires étrangères n’a pas répondu à la demande d’information d’Epoch Times sur le lieu où se trouvent ces personnes avant l’heure de publication.

Le général Zhang Youxia, vice-président de la Commission militaire centrale, assiste à la session d’ouverture du Congrès national du peuple, ou CNP, au Grand Hall du peuple, le 5 mars 2025 à Pékin, en Chine. (Kevin Frayer/Getty Images)

Des luttes intestines sans précédent

Depuis son arrivée au pouvoir en 2012, le chef du PCC Xi Jinping a lancé une vaste campagne de lutte contre la corruption. Selon un document non classifié publié récemment par le Bureau du directeur du Renseignement National des États-Unis, près de 5 millions de fonctionnaires ont fait l’objet d’une enquête et ont été reconnus coupables en 2022.

Toutefois, la campagne « reflète plus profondément une sécurisation dirigée par le parti, ou un ciblage sur l’indiscipline politique et l’impureté idéologique, notamment aux plus hauts niveaux du gouvernement, dans un effort pour préserver le contrôle intérieur et la légitimité du PCC », a stipulé le rapport.

Les politiques de Xi Jinping, en particulier sa campagne anti-corruption et la centralisation du pouvoir, ont créé des ennemis au sein du régime, comme les anciens du Parti, les princes du PCC et certains hauts gradés de l’Armée populaire de libération (APL).

Au cours des deux dernières années, un certain nombre de hauts fonctionnaires du PCC et de commandants de l’APL ont été démis de leurs fonctions ou suspendus suite à des disparitions inexpliquées.

Certains analystes ont expliqué que M. Zhang, qui appartient à la bande de Shaanxi, une autre faction considérée comme alliée de M. Xi, pourrait être à l’origine des purges les plus récentes, qui visaient la clique de Fujian.

Gordon Chang, commentateur politique et spécialiste de la Chine, a estimé que les rumeurs d’arrestation de M. He et de Zhao Keshi « pourraient constituer les développements les plus dangereux dans le monde aujourd’hui », car l’APL « ne semble ni stable ni loyale au dirigeant suprême chinois », peu importe qui est à l’origine des purges et si les rumeurs sont fondées ou non.

« Le fait qu’elles circulent nous indique qu’il y a des éléments qui tentent de déstabiliser le dirigeant chinois », a écrit M. Chang dans un article publié dans The Hill le 19 mars.

« Un Xi assiégé pourrait décider de se déchaîner. »

Dans une interview accordée à Epoch Times, Zhao Lanjian a estimé que les derniers développements montrent que les luttes internes au sein du PCC ont atteint un niveau « sans précédent ».

Selon lui, soit Xi a « complètement abandonné » ses anciens subordonnés, soit des « forces anti-Xi au sein de l’armée » sont en train d’éliminer les collaborateurs de Xi.

Zhao Lanjian a souligné que l’instabilité au sein de l’APL ne lui permettra pas de lancer une invasion de Taïwan dans un avenir proche.

Shen Ming-Shih, chercheur à l’Institut taïwanais de recherche sur la défense et la sécurité nationales et directeur de la division de recherche sur la sécurité nationale de l’institut, a expliqué à Epoch Times que le pouvoir de M. Zhang semble s’accroître avec la chute annoncée des partisans de Xi et la présence des alliés de M. Zhang à des postes militaires clés.

M. Shen a ajouté qu’à l’heure où M. Xi s’oppose à ceux qui veulent l’évincer, le contrôle de l’armée « est devenu crucial ».

Chi Yue-yi, expert de l’APL à l’Institut de recherche sur la défense et la sécurité nationales, pense que Xi continue à maintenir son pouvoir.

Bien qu’il puisse y avoir « différentes voix » au sein des cliques du PCC et de l’APL qui s’opposent à Xi, elles ne semblent pas « suffisantes pour former une force anti-Xi », a-t-il expliqué à Epoch Times.

M. Cai a affirmé lors de sa diffusion en direct sur YouTube que si la position du dirigeant chinois était fortement menacée, il pourrait déclencher une guerre dans le détroit de Taïwan pour modifier le statu quo.

Luo Ya et Yi Ru ont contribué à la rédaction de cet article.

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