PRAGUE, République tchèque, la société de crédit tchèque Home Credit, qui appartient au milliardaire local Petr Kellner, a financé une campagne de relations publiques pour améliorer l’image du régime chinois dans le pays, selon des documents divulgués au quotidien tchèque Aktuálne.cz.
Le rapport d’Aktualne.cz, publié le 10 décembre 2019, était basé sur les factures de l’agence de relations publiques C&B Reputation Management, qui a été engagée par Home Credit.
L’agence avait pour mission d’influencer les médias, le débat public et les hommes politiques.
En plus de promouvoir des messages positifs sur la Chine, la campagne de relations publiques s’est également attaquée aux critiques du régime chinois.
Aktualne.cz a également découvert que la campagne de l’agence C&B Reputation Management – payée par Home Credit, la société du milliardaire tchèque Petr Kellner – ciblait aussi les politiciens. En septembre 2019, une conférence a été organisée par un membre du Parti démocratique civique tchèque, au cours de laquelle les législateurs de Prague ont critiqué le maire de la ville pour avoir annulé un accord de jumelage avec Pékin.
Le 14 décembre 2019, Home Credit a publié un communiqué de presse en réponse à l’article d’Aktualne.cz.
La société a nié les allégations, insistant sur le fait que ses activités étaient « commerciales et non politiques ».
« Home Credit déclare, en toute responsabilité, n’avoir jamais engagé ou demandé des services de lobbying ou de communication visant à promouvoir les intérêts d’un pays étranger en République tchèque », a indiqué le communiqué de presse.
Home Credit est la propriété du groupe d’investissement PPF, appartenant à Petr Kellner. Le groupe a fait son entrée sur le marché chinois du crédit en 2007.
Selon le magazine économique Ekonom, PPF a gagné plus de 2 milliards d’euros en Chine en 2017. Certains politiciens et experts tchèques estiment que PPF a subi des pressions politiques de la part du régime chinois pour promouvoir ses intérêts en République tchèque.
En octobre 2019, PPF a signé un accord pour racheter le groupe Central European Media Enterprises (CME), qui possède TV NOVA, l’une des plus grandes chaînes de télévision en République tchèque, en plus de chaînes de télévision en Bulgarie, Roumanie, Slovaquie et Slovénie. Elle a une audience de 45 millions de téléspectateurs. À la lumière des informations publiées par Aktualne.cz, l’achat de TV NOVA soulève la question de savoir si Petr Kellner et son groupe d’investissement PPF influenceront le contenu diffusé en faveur du régime chinois.
Ce contrat, d’un coût d’environ 1,9 milliard d’euros, doit être approuvé par les actionnaires du groupe de médias CME, la Commission européenne et les régulateurs nationaux de certains des pays où CME est présent.
Influencer le débat public
Selon les documents publiés par Aktualne.cz, pendant la période d’avril à août 2019, l’agence C&B Reputation Management a répertorié un total de près de 2 000 heures de travail.
La liste détaillée des services rendus comprend le travail de coordination secrètement réalisé par PPF, via la société Home Credit, pour la création du Sinoskop Institute for Contemporary China, un groupe de réflexion qui a promu des opinions minimisant les violations des droits de l’homme perpétrées par le régime chinois.
L’institut a été officiellement créé en juin 2019 par le sinologue Vít Vojta, qui a également travaillé comme interprète pour des politiciens et des présidents tchèques en voyage en Chine, notamment l’actuel président tchèque Miloš Zeman.
Dans le cadre de son travail pour Sinoskop, M. Vojta est apparu comme expert indépendant de la Chine dans les médias tchèques, donnant des interviews et écrivant des articles d’opinion.
L’agence de relations publiques a facturé Home Credit pour les activités de Vít Vojta et d’autres commentateurs tchèques sur les questions relatives à la Chine.
Le montant que Home Credit a versé à l’agence C&B Reputation Management reste incertain. Les documents publiés par Aktualne.cz contiennent le nombre d’heures de travail, mais pas le taux horaire.
Incitations financières
Le groupe PPF est présent dans cinq provinces chinoises. Le milliardaire tchèque Petr Kellner a accumulé sa richesse en acquérant des biens immobiliers lors de la chute du régime communiste dans l’ancienne Tchécoslovaquie en 1989 et dans les années 1990, pendant les premières années du pays.
Aujourd’hui, Petr Kellner est le plus riche des Tchèques et, selon le magazine économique Forbes, il est le 73e homme le plus riche du monde, avec une fortune d’environ 13,9 milliards d’euros (15,5 milliards de dollars).
Certains pensent que les intérêts commerciaux de PPF en Chine ont poussé le groupe à promouvoir une image positive du régime chinois.
« Home Credit peut perdre sa licence en RPC [République populaire de Chine] à tout moment », a écrit le député tchèque Jan Lipavsky dans un courriel adressé à Epoch Times.
Après 2014, la République tchèque a commencé à s’éloigner de la promotion des droits de l’homme pour se tourner vers des échanges économiques et politiques plus importants avec la Chine.
Par exemple, le pays fait partie de la plate-forme 17 + 1, un projet de Pékin visant à accroître les affaires et le commerce entre la Chine et 17 pays d’Europe de l’Est.
Home Credit se positionne lui-même en tant que facilitateur du rapprochement entre le régime chinois et la République tchèque.
En avril 2016, Jiří Šmejc, PDG et actionnaire minoritaire de Home Credit, a déclaré lors d’un forum d’affaires à Prague : « PPF, Home Credit et nous-mêmes sommes fiers d’avoir été à la naissance d’une initiative qui, je pense, a conduit à la relance des relations tchéco-chinoises ».
Lors d’une table ronde en octobre 2018, intitulée « Les activités croissantes de la Chine peuvent-elles être une menace pour la République tchèque ? », Martin Hála, sinologue de l’Université Charles, a déclaré : « Il est bon de prêter attention à ce que fait PPF en Chine. PPF est l’un des principaux moteurs du changement politique en République tchèque. La décision de changer de politique envers la Chine a été clairement prise par des politiciens influencés par PPF, ou par la Chine. »
Mais le responsable des relations publiques de Home Credit, Milan Tomanek, a nié les allégations selon lesquelles PPF aurait influencé la politique tchèque pour servir ses propres intérêts.
« Ce n’est pas vrai. On dirait que plusieurs personnes répètent ce mensonge encore et encore », a-t-il déclaré à Epoch Times dans un courriel datant de novembre 2019.
La République tchèque a récemment accru sa vigilance sur l’influence croissante du régime chinois. Dans un rapport de 2018, le chef des services de renseignement tchèques a déclaré qu’il considérait l’influence de la Chine comme l’une des plus grandes menaces pour la sécurité du pays.
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