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Sport en Chine: pas de compétition sans corruption

décembre 11, 2017 18:32, Last Updated: décembre 11, 2017 22:08
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Tian Liang a été une vedette. Après avoir remporté la médaille d’or pour le plongeon de 10 mètres aux Jeux olympiques de Sydney de 2000, il est devenu l’objet d’une adoration nationale. Il a de nouveau remporté l’or aux Jeux olympiques d’Athènes en 2004.

Il a commencé à signer de nombreux contrats auprès de sponsors et à remplir les pages des tabloïds chinois. Mais cela n’a pas plu aux autorités sportives chinoises, donc en 2005, Tian Liang a été expulsé de l’équipe nationale pour motif « d’avoir enfreint le règlement ».

L’approche des Jeux nationaux de 2005 – un événement sportif majeur qui permet de sélectionner les athlètes pour les Jeux olympiques – représentait pour Tian Liang l’occasion de rétablir sa réputation et de rejoindre son équipe.

Malheureusement pour lui, il n’avait pas les faveurs du haut responsable de la plongée sportive chinoise. Avant la compétition, ce fonctionnaire a fait passer la consigne suivante aux juges : peu importe sa performance, vous ne pouvez pas lui donner une note plus élevée que 8,5. Tian a tout de même pu remporté la médaille d’or, mais cela n’a pas suffi pour qu’il soit sélectionné dans l’équipe nationale aux J.O. de Pékin de 2008.

Un membre de l’équipe de plongée Chongqing Sports Technique School Diving Team s’entraîne à Chongqing, le 25 octobre 2007. Le champion olympique de plongeon Tian Liang s’est également entraîné à Chongqing. (Photos de la Chine / Getty Images)

Selon un récent article du magazine Fangyuan, géré par le Parquet populaire suprême, la plus haute instance du régime chinois en matière de poursuites judiciaires, ce genre de comportement non éthique est typique du système sportif chinois.

L’article cite des exemples de pots-de-vin, de truquage des résultats sportifs et de connivence entre les autorités publiques et les entreprises – des preuves de corruption rampante dans l’industrie du sport chinois, étroitement contrôlée par le régime.

L’Administration générale des sports de Chine (GASC) est le principal organe en charge du sport du pays. Toutefois, des nombreux centres sportifs, des fédérations et des entraîneurs de toutes sortes et éparpillés à travers tout le pays font partie du même système. Le Comité olympique chinois est également dirigé par le patron de la GASC.

L’article souligne que la GASC englobe tout : elle agit en tant qu’administration, club sportif et entreprise. Cette entité a le pouvoir « d’établir des règles de compétition, de sélectionner des athlètes et des entraîneurs, de superviser et d’organiser des compétitions, de trancher en cas de différends et de décider combien d’argent verser aux vainqueurs ». Les compétitions basées sur les réelles performances n’existent donc plus.

Les plongeurs chinois Tian Liang et Jia Hu lors des préliminaires du plongeon masculin synchronisé au 10e championnat du monde de natation à Barcelone, en 2003. (LLUIS GENE / AFP / Getty Images)

Fonctionnaires corrompus

Les fonctionnaires des domaines sportifs, occupant souvent plusieurs postes qui seraient normalement considérés comme des conflits d’intérêts, sont soudoyés pour promouvoir certains athlètes ou assurer leur victoire. Ils perçoivent également des pots-de-vin de la part des sponsors. Xiao Tian, l’ancien vice-dicteur de la GASC et l’un des grands « tigres » (surnom des fonctionnaires tout puissants), a été démasqué par l’agence anti-corruption du régime chinois. En effet, après son arrivée au pouvoir, l’actuel dirigeant chinois Xi Jinping a lancé une vaste campagne visant à expulser les fonctionnaires corrompus du Parti communiste chinois (PCC).

Xiao Tian a commencé sa carrière en tant qu’escrimeur dans la province d’Anhui. Lors de son mandat de vice-directeur de la GASC, il a profité de son poste pour « aider » à obtenir des contrats et des promotions. D’après le tribunal qui l’a condamné à 10,5 ans de prison pour corruption, il a reçu au total 7,96 millions de yuans (plus d’un million d’euros) illégalement.

Yu Li, ancienne directrice du département de natation synchronisée de la GSAC, a été placée sous enquête judiciaire pour corruption en octobre 2014. Lors des Jeux nationaux de 2013, elle a truqué les résultats de la compétition de natation synchronisée, afin d’assurer la victoire de la province Liaoning où se tenait les jeux. Pour cette tractation, Yu Li avait reçu 200 000 yuans (environ 26 000 euros) du directeur du centre de natation de Liaoning.

Yu Li, ancien directrice du département de natation synchronisée de l’Administration générale des sports de Chine. (Capture d’écran / Sina.com.cn)

L’article de Fangyuan fustige le football chinois comme un sport particulièrement corrompu, dénonçant les fonctionnaires et les arbitres qui s’entendent pour manipuler les résultats des matchs. Plusieurs hauts responsables ont été déjà soumis à une purge, notamment l’ancien président de l’Association de football Nan Yong, qui a été condamné à 10 ans de prison en 2012 pour avoir accepté environ 1,5 million de yuans (environ 200 000 euros) pour assurer la victoire de certains clubs de football.

Même pour organiser une compétition, des « frais d’approbation et de gestion » sont prélevés par la GSAC, alors qu’ils ne correspondent à aucun service réel.

« Au cours de nombreuses années, la GSAC et les départements locaux de gestion des sports ont créé une immense chaîne lucrative qui profite des compétitions sportives », a martelé l’article.

Procédure de sélection

La procédure de sélection des athlètes pour les compétitions est souvent opaque et se déroule sans aucun règlement, permettant aux fonctionnaires de recevoir des pots-de-vin en échange de la sélection de tel ou tel athlète. Certains sports ont un entraîneur principal qui rédige personnellement la liste des membres de l’équipe nationale, tandis que d’autres sports accordent cette tâche au centre sportif. L’article Fangyuan souligne que cela ne se passe généralement pas de la même manière dans d’autres pays, où une organisation tierce prépare une compétition ouverte afin de sélectionner les athlètes qui sont qualifiés pour telle ou telle équipe.

Tang Na, une joueuse de ping-pong prometteuse qui avait remporté le premier championnat junior de Chine en 1996, était largement considéré comme l’une des meilleurs candidate à l’équipe nationale. Mais elle n’a pas été retenue, ni dans l’équipe du championnat du monde ni dans celle des Jeux olympiques.

Plus tard, Tang Na a été naturalisée par la Corée du sud, où elle a participé aux J.O. de Pékin de 2008 en tant que membre de l’équipe sud-coréenne. Elle y a remporté le bronze. La même année, Tang Na avait confié dans un entretien qu’on ne lui avait pas laisser l’occasion d’aller plus haut en Chine. « L’Association chinoise de tennis de table n’organise pas de compétitions pour désigner des candidats, mais sélectionne à l’avance ceux qui sont prometteurs et s’occupe de leur formation », a-t-elle déclaré au journal chinois Oriental Sports Daily.

Tang Na, qui porte aujourd’hui le nom de Dang Yeseo, joue en tant que membre de l’équipe féminine de tennis de table de la Corée du Sud contre Tie Yana de Hong Kong, lors des Jeux olympiques de Londres, le 4 août 2012. (Saeed Khan / AFP / Getty Images)

Médailles d’or

Le système des sports chinois met également trop l’accent sur les médailles d’or. En fonction du nombre de médailles d’or gagnées, les fonctionnaires des départements sportifs reçoivent des promotions, les athlètes assurent leurs carrières et les primes sont attribuées aux entraîneurs. « En tenant compte du prestige politique et des avantages économiques apportés par les médailles d’or, certains départements sportifs locaux veulent les obtenir à tout prix », souligne l’article de Fangyuan. Cela se manifeste d’une façon particulièrement intense lors des Jeux nationaux, lorsque différentes provinces et villes s’affrontent sur les terrains de sport.

Par le passé, l’industrie du sport chinois a été critiquée pour le dopage sanctionné par l’État et le mauvais traitement des athlètes à la retraite. Des milliers d’anciens athlètes, sélectionnés à un jeune âge pour être soumis à un entraînement exténuant, n’ont pas eu de formation autre que sportive. Quand ils ne gagnent plus les compétitions ou s’en retirent, le régime chinois ne leur accorde pas de compensation pour traiter leurs éventuelles blessures physiques ni ne les aide pour poursuivre leur carrière.

Après la publication de l’article de Fangyuan, un site officiel du régime chinois a révélé que Yang Shu’an, vice-directeur de la GSAC, avait été démis de ses fonctions. Radio Free Asia (RFA) a rapporté que son nom figure sur la liste des fonctionnaires limogés, publiée le 8 décembre dernier.

Annie Wu

Version anglaise

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