Sud-Ouest : La traditionnelle chasse à l’ortolan devrait bientôt disparaître

10 janvier 2018 19:48 Mis à jour: 10 janvier 2018 19:49

Longtemps pratiquée dans le Sud-Ouest de la France, notamment dans le département des Landes, la chasse à l’ortolan – un minuscule oiseau sauvage migrateur – est en passe de disparaître complètement. Cette pratique très controversée, une vieille tradition chère au cœur de certains aînés, est désormais strictement réprimée par la loi.

Après avoir été tolérée pendant des années par les représentants de l’État implantés au niveau des collectivités, et ce, malgré le fait que l’espèce soit protégée depuis une vingtaine d’années, la chasse aux ortolans est maintenant dûment réprimée par les autorités.

Capturés à l’aide de dispositifs appelés « matoles » – des pièges destinés à prendre les oiseaux vivants – et de spécimens captifs dont les chants doivent permettre d’attirer leurs congénères, les ortolans sont ensuite engraissés pendant plusieurs semaines avant d’être tués et consommés.

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Appréciés depuis des siècles et très prisés des gastronomes du fait de leur chair délicate, les ortolans étaient traditionnellement noyés dans de l’armagnac, une fois la période de gavage terminée – avant d’être rôtis et dégustés entiers, sans que les convives ne se donnent la peine de recracher les os.

La France, mauvais élève de l’Union Européenne

À l’échelle du Vieux Continent, la population de ces volatiles ne cesse de décliner. Selon la Commission européenne, elle aurait même chuté de 84 % entre 1980 et 2012.

Adoptée en 2009, une directive communautaire interdit d’ailleurs la chasse des représentants de cette espèce sur l’ensemble des territoires des pays membres de l’Union. Une mesure de protection que la France était pourtant bien décidée à ignorer, soucieuse de préserver une tradition chère au cœur d’un certain nombre de ses habitants.

Attaquée devant la cour de justice de l’Union Européenne par la Commission au cours du mois de décembre 2016, la France est maintenant contrainte de faire respecter la loi et de réprimer sévèrement celles et ceux qui continuent à braconner et à pratiquer la chasse aux ortolans.

La tolérance dont les autorités locales ont fait preuve pendant longtemps n’est désormais plus de mise et les contrevenants encourent de lourdes sanctions pécuniaires, ainsi que le retrait de leur permis de chasse au cas où ils en possèderaient un.

Dorénavant, la justice française fait appliquer la loi

L’été dernier, Nicolas Hulot – ministre de la Transition écologique et solidaire – donnait d’ailleurs de nouveau au préfet des Landes l’instruction de « renforcer toutes les mesures de surveillance, de contrôle et de verbalisation, tant à l’égard des braconniers que des intermédiaires qui se livreraient à un trafic, et n’accorder, comme l’an dernier, aucune tolérance aux pratiquants ».

Depuis 2 ans les inspections et les contrôles ont ainsi été renforcés et les braconniers interpellés ont fait l’objet de plusieurs sanctions. Ainsi, en octobre dernier, 11 chasseurs landais ont été condamnés par la Cour d’appel de Pau à des amendes de 1000 euros (dont une partie avec sursis) chacun, tandis qu’en décembre, onze autres étaient convoqués devant le tribunal de Mont-de-Marsan pour des prises remontant à 2016.

Crédit : Pierre Dalous | Wikimedia Commons

Âgés de 60 à 80 ans, les cassayrots (petits chasseurs en patois) disent avoir « été abusés », ignorant que la règle avait changé et que « la tolérance préfectorale » appliquée autrefois était maintenant terminée.

Une situation qui suscite pourtant chez Olivier Janson – le procureur de la République qui représente l’État dans l’affaire en question – « une forme de tristesse » vis-à-vis de ces citoyens « qui découvrent la justice à parfois 80 ans ».

Néanmoins, ces chasseurs à la retraite conservent encore quelques prestigieux soutiens, comme ceux des chefs étoilés Michel Guérard et Jean Coussau, des enfants du pays attachés à leurs traditions qui espèrent que ce plaisir transmis de génération en génération puisse perdurer en toute tranquillité.

Pour l’instant, les badauds se demandent toujours quelle cause finira par l’emporter : la « sacro-sainte protection de l’environnement » ou le respect de « l’identité landaise » face à « un monde uniformisé » ?

La justice devrait bientôt trancher.

(NICOLAS TUCAT/AFP/Getty Images)

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