Limité à l’est par la Russie et au sud par la Lettonie, l’Estonie est le pays balte le plus septentrional. Savez-vous que Lonely Planet a recommandé la visite de sa capitale Tallinn parmi les 10 meilleurs spots à découvrir en 2018 ? La vieille ville offre une incroyable plongée dans une ville médiévale au riche patrimoine classée à l’Unesco. Sans aucun doute, c’est par la mer qu’il faut découvrir l’Estonie. La baie de Tallinn, capitale du pays, s’étire tout en longueur et la promenade se prolonge d’îles en îles. Certaines boisées, d’autres plus petites abritent une ou deux maisonnettes aux couleurs vives installées sur leur promontoire rocheux.
Quand on pénètre dans le port intérieur de la ville, on s’étonne de remonter le temps face à cette multitude de cheminées, tours, clochers, flèches qui hérissent les toits rouges de la vieille ville. D’épais murs d’enceinte enserrent la ville haute dans un écrin de verdure, les maisons aux toits rouges dessinent un lacis de ruelles qui convergent vers plusieurs églises dont les flèches effilées semblent partir à l’assaut du ciel, comme si elles voulaient concurrencer les grues qui s’activent autour du port. Rien d’étonnant dès lors à ce que l’Unesco l’ait ajoutée à sa liste prestigieuse du Patrimoine Monumental de l’Humanité, peu de cités pouvant se targuer d’avoir préservé autant de vestiges du Moyen-Age. Depuis toujours, la vieille ville se divise en deux parties distinctes que sépare un mur d’enceinte appelé “ mur de la Haine ” en souvenir des serfs qui tentaient de le franchir pour rejoindre la ville basse et recouvrer leur liberté. A moins qu’il ne rappelle plutôt les nombreuses dissensions qui opposaient la noblesse balte de la ville haute aux artisans et commerçants de la ville basse ?
La vie se concentre dans la ville basse
La richesse de Tallinn a toujours tenu à la mer qui l’a nourrie. La Hanse Teutonique née en 1241 d’une alliance signée entre les ports allemands de Lübeck et de Hambourg ne tarda pas à s’annexer les cités maritimes de la mer Baltique. Son souvenir reste vivant dans la ville basse. Il ne s’y trouve pas une façade, un porche, une enseigne ou un escalier qui ne raconte la vie des guildes de jadis. En levant le nez, on découvre les ouvertures aménagées dans les frontons pour y fixer les poutres auxquelles étaient attachées les poulies permettant de manipuler les marchandises entreposées.
Les ruelles qui mènent au cœur de la vieille ville sont jalonnées d’échoppes qui vendent des lainages épais et des bouquets de fleurs fraîches. C’est ici aussi que nichent les boutiques de luxe qu’il faut parfois chercher au-delà d’un portail, dans une arrière-cour entièrement restaurée. Inévitablement, la promenade débouche sur une place animée, dominée par l’hôtel de ville, un bâtiment de pierres brutes surmonté d’un mince beffroi baroque.
Autrefois, c’est à l’ombre de ses arcades gothiques que se traitaient les affaires. Aujourd’hui, c’est le point de rendez-vous des Estoniens et des touristes, quelle que soit l’heure du jour ou de la nuit. Et chacun de savourer le charme ineffable de cette place médiévale chargée d’éternité. Au point que lorsque l’actuel propriétaire de la pharmacie qui fait face à l’hôtel de ville a émis le souhait de transformer en restaurant sa superbe officine du Haut Moyen-Age, il s’est heurté à un tel tollé de la population qu’il a accepté le compromis de sauvegarder la pharmacie au rez-de-chaussée, tout en aménageant un restaurant à l’étage.
La ville haute se déchiffre comme un livre d’histoire
S’il faut en croire la légende, c’est sous la colline de Toompea que serait enterré le roi Kalev, héros de l’épopée estonienne. Les rochers qui forment la butte y auraient été amenés par sa veuve, la belle Linda, dont les larmes furent si abondantes qu’elles donnèrent naissance au lac Ülemiste, source d’eau potable pour les habitants de Tallinn. La légende ajoute encore que le lac abrite un mauvais génie qui aurait jeté un sort sur la ville, la menaçant de la priver d’eau si elle achevait un jour sa construction. C’est pourquoi, dit-on, Tallinn est toujours en chantier.
Une fois passées les arches des anciennes fortifications, l’agitation de la vie moderne s’estompe et l’on pénètre dans un monde de pavés ronds, de ruelles sinueuses et d’escaliers dérobés. Rien de mieux que la marche à pied pour s’imprégner de l’histoire de la ville inscrite dans le tracé des ruelles et des édifices. De la redoutable fortification bâtie au 13ème siècle par les Chevaliers du Porte-Glaive, il ne reste que les tours nord et ouest. Un siècle plus tard, l’envahisseur germanique y ajouta une tour plus puissante, la Pikk Hermann, qui survécut aux bombardements de 1944. Un élégant palais s’élève dans la cour du château, souvenir de la Grande Catherine qui y logea la chancellerie du gouverneur russe de la province d’Estonie. En face du château se dresse une imposante cathédrale orthodoxe de style néo-byzantin. Curieusement surmontée de plusieurs croix traversées par un croissant de lune aux allures islamiques, elle affirme ainsi la suprématie de l’église orthodoxe sur l’islam.
En contournant la cathédrale, une ruelle étroite mène à l’Église du Dôme. Après le terrible incendie qui ravagea la colline en 1648, elle fut reconstruite sur le modèle d’une basilique gothique à trois nefs. La place de pavés ronds qui cerne l’église est bordée de maisons basses aux couleurs pastel. Assis sur un banc, à l’ombre de vieux tilleuls, on repère au-dessus du château le drapeau tricolore estonien qui claque au vent. Le bleu y symbolise le ciel et la confiance, le noir figure la terre et rappelle le sombre passé, le blanc représente la neige et la liberté. C’est ici que bat le cœur de Tallinn. Son passé est intimement lié au présent, il dessine les contours de la capitale et on y sent vibrer un air de liberté qui n’a ce parfum que dans les nations qui en ont été privées pendant longtemps.
Infos : www.visittallinn.ee
Y aller : Pour un city-trip, plusieurs compagnies d’aviation se font la concurrence pour se rendre à Tallinn. Une autre formule qui vous donnera l’envie d’y retourner est une croisière en mer Baltique qui vous promène de capitale en capitale.
Y aller en hiver : La vieille ville acquiert une magie particulière sous la neige fraîche et dans les longues nuits illuminées par des lampadaires. Patinoire en plein air, nombreux marchés de Noël, dégustation de vin chaud épicé, autant de plaisirs qui irradient les habitants de la ville, animés d’une énergie positive qu’ils partagent volontiers avec les rares touristes de l’hiver.
Écrit par Christiane Goor et Charles Mahaux
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