Temu et Shein, soupçonnées de travail forcé, représentent 22 % des colis gérés par La Poste

Par Ludovic Genin
1 novembre 2024 04:09 Mis à jour: 1 novembre 2024 23:37

Shein, application fondée en Chine en 2012, est considérée comme un emblème des dérives sociales et environnementales de la mode à petits prix. Temu est la filiale occidentale de Pinduoduo, l’une des plus grandes plateformes d’achat en ligne de Chine.  En vendant des produits bon marché fabriqués principalement en Chine, Temu et Shein ont connu une croissance explosive depuis leur entrée sur le marché européen.

Les deux plateformes sont pourtant accusées d’avoir recours au travail forcé selon le Congrès américain et de détruire «l’environnement et les droits humains», selon des parlementaires français.

En juin, la Commission européenne avait réclamé des informations à Temu et Shein afin de vérifier leur conformité aux règles européennes en matière de protection des consommateurs, les questionnant notamment sur les mesures qu’elles mettent en œuvre afin de permettre le signalement de produits illégaux.

Les plateformes Temu et Shein représentent 22 % des colis gérés par La Poste 

Les plateformes Temu et Shein « représentent 22 % de nos colis », a déclaré le PDG de la Poste, Philippe Wahl, lors d’une audition le 30 octobre devant la commission des affaires économiques du Sénat – soit un point de plus que ceux gérés pour Amazon et alors qu’ils pesaient « moins de 5 % il y a cinq ans ».

Le PDG de La Poste, groupe détenu par les fonds publics de l’État et de la Caisse des Dépôts et Consignations, a évoqué la « montée des plateformes chinoises », Temu et Shein. La direction de l’entreprise a précisé que la part des colis gérés pour le compte des deux plateformes était beaucoup plus significative en France qu’en Europe.

Fin septembre, six pays de l’Union européenne, l’Allemagne, la France, l’Autriche, le Danemark, les Pays-Bas et la Pologne, ont demandé à l’Union européenne de serrer la vis contre ces sites de commerce en ligne, soupçonnés de vendre des produits parfois dangereux pour les consommateurs.

Temu et Shein accusées d’avoir recours au travail forcé

Selon un rapport du Congrès des États-Unis, intitulé « Fast Fashion et génocide des Ouïghours : Conclusions provisoires », publié en juin 2023, Temu et Shein sont accusées d’avoir exposé les consommateurs à des produits fabriqués en Chine dans des camps de travaux forcés, dans leurs chaînes d’approvisionnement en coton en Chine.

« Temu ne dispose d’aucun système permettant de garantir le respect de la loi sur la lutte contre le travail forcé des Ouïghours (UFLPA) », ajoute le rapport. L’UFLPA, qui est entrée en vigueur aux États-Unis en juin 2022, interdit les importations en provenance de la région du Xinjiang, à l’extrême ouest de la Chine, à moins que les entreprises ne puissent prouver que les produits n’ont pas été fabriqués en recourant au travail forcé.

Plus d’un million de Ouïghours et autres minorités musulmanes sont actuellement détenus dans des camps d’internement chinois, où ils sont soumis au travail forcé, à la torture, aux abus sexuels, à l’endoctrinement politique, à l’avortement forcé et à la stérilisation forcée, une persécution qualifiée de génocide par le gouvernement américain.

Shein accusé de détruire «l’environnement et les droits humains»

En novembre 2023, des députés français ont dénoncé les pratiques de l’entreprise chinoise de « fast fashion », qu’ils accusent d’être « l’emblème de la mode qui détruit l’environnement et les droits humains », après avoir engagé une procédure à son encontre.

« Chaque fois que l’on crée des objets jetables, on crée des êtres humains jetables », a déclaré le député PS Dominique Potier, qui a obtenu contre Shein la saisine du « point de contact national de l’OCDE », une instance adossée à l’Organisation de coopération et de développement économiques.

La procédure questionne plusieurs aspects de la chaîne de production de l’entreprise de vente en ligne. Parmi eux, « le respect par le groupe Shein des droits de l’homme », les conditions de travail de ses employés, mais également « les possibilités d’incidences négatives sur l’environnement » ainsi que sur « la santé des consommateurs », peut-on lire dans un communiqué publié par le point de contact de l’OCDE.

En juillet 2023, le gouvernement avait assuré « combattre avec détermination » le modèle économique de la fast fashion « destructeur pour notre planète », pointant du doigt la « responsabilité extrêmement forte » de Shein.

Temu et Shein dans le viseur de l’UE

La Commission européenne a demandé aux deux détaillants en ligne chinois de fournir des détails sur la manière dont ils respectent les obligations de modération de contenu de l’Union européenne, sur comment elles veillent à la protection des mineurs et s’assurent que leurs plateformes en ligne ne trompent ni ne manipulent les utilisateurs.

Dans un rapport publié en mai 2024, le Bureau Européen des Unions de Consommateurs (BEUC) a accusé Temu de ne pas respecter plusieurs règles de l’Autorité de régulation des marchés financiers, comme fournir aux consommateurs les informations nécessaires sur les commerçants opérant sur la plateforme et s’assurer que leurs produits répondent aux normes de l’UE.

Selon le rapport, Temu utilise des techniques « manipulatrices », comme des « dark patterns » de configuration qui incitent subtilement les consommateurs à prendre des décisions qui peuvent ne pas correspondre à leurs intentions initiales. Le manque de transparence dans la manière dont Temu recommande des produits aux consommateurs soulève d’autres inquiétudes, notamment en ce qui concerne les informations utilisées par le site et la conception de ses algorithmes.

Des associations européennes de consommateurs avaient déposé en mai une plainte contre Temu, l’accusant d’utiliser des interfaces trompeuses pour manipuler les consommateurs et les inciter à dépenser plus sur la plateforme.

Le BEUC a également accusé le site de ne pas fournir une protection suffisante aux mineurs, notant que les fonctions de jeu de la plateforme et les prix bas de ses produits sont susceptibles d’attirer les utilisateurs de moins de 18 ans. Une plainte soumise à la Commission le 16 mai précise que « Temu ne garantit pas à ses utilisateurs un environnement en ligne sûr, prévisible et digne de confiance, comme l’exige la loi ».

Interrogée sur les plaintes du BEUC et la dernière demande d’information de la Commission, Temu a déclaré à Epoch Times que l’entreprise « coopère pleinement » avec l’UE. « Nous aimerions également réitérer que nous sommes pleinement engagés à respecter toutes les lois et réglementations applicables sur les marchés où nous opérons », a affirmé un porte-parole de l’entreprise par mail. Shein, quant à elle, a confirmé à Epoch Times avoir reçu la demande d’information de la Commission et a assuré qu’elle « travaillait pour y répondre rapidement ».

En juin 2024, l’UFC-Que Choisir a demandé des sanctions accrues contre Temu, accusant la plateforme de créer un faux sentiment d’urgence, des prix barrés trompeurs ou des incitations répétitives, etc. pour influencer leurs clients, ce que la législation européenne interdit. Selon l’UFC, Temu « arrive en tête avec le plus grand nombre de ‘dark patterns’  » devant toutes les grandes plateformes de e-commerce.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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