La cour d’appel a estimé que l’ancienne employée de l’entreprise de prêt-à-porter avait fait l’objet d’une « discrimination fondée sur les convictions religieuses ».
Les faits remontent à 2015. Narimène, vendeuse d’une boutique toulousaine de l’enseigne de prêt-à-porter féminin Camaïeu, part en congé parental au mois de janvier.
De retour six mois plus tard, la jeune femme de confession musulmane se présente avec un foulard islamique « qui lui couvre les oreilles, le cou et les cheveux, mais pas son visage », rapporte Le Point.
Son employeur exige alors que Narimène, salariée de la société depuis près de trois ans, retire son voile qu’elle n’avait jamais porté dans le cadre de son travail avant son départ en congé parental.
La jeune femme refuse. Deux jours plus tard, elle est dispensée d’activité et l’entreprise lui propose un compromis : porter son foulard islamique uniquement lorsqu’elle se trouve dans la réserve de la boutique. Nouveau refus de Narimène qui est licenciée le 28 août 2015.
Une disposition qui sera validée par le conseil des Prud’hommes de Toulouse, celui-ci estimant que son licenciement n’est pas imputable à une quelconque discrimination.
Laïcité : Camaïeu condamnée pour avoir licencié une salariée voilée https://t.co/wfB159ayGU @MarcLeplongeon
— Le Point (@LePoint) October 16, 2019
L’ancienne salariée décide d’interjeter appel
L’ex-salariée de Camaïeu décide de faire appel de la décision. La société de prêt-à-porter considère qu’elle est en droit d’imposer des contraintes vestimentaires à ses employés si celles-ci « sont justifiées par la nature des tâches à accomplir ».
Selon l’enseigne, la décision de licencier Narimène a été motivée par le fait qu’elle était en contact avec la clientèle et que le port du voile portait par conséquent atteinte à l’image de marque de la société et à son positionnement commercial.
Camaïeu ajoute que la « liberté religieuse n’a pas vocation à bénéficier uniquement au salarié qui prétend exprimer ses convictions religieuses […], mais qu’il est tout aussi légitime de prendre en compte la liberté religieuse des tiers (collègues, clients ou partenaires commerciaux), notamment afin de faire prévaloir une politique de neutralité religieuse ».
Le CCIF s’en mêle
Mais l’ex-employée ne l’entend pas de cette oreille, affirmant que sa tenue ne portait pas préjudice à l’entreprise et à ses valeurs. Elle fait notamment valoir que Camaïeu est implantée au Moyen-Orient et dans plusieurs pays arabes où de nombreuses femmes portent le voile.
Des arguments qui agacent l’entreprise de prêt-à-porter, celle-ci n’hésitant pas à souligner que le voile ne correspond ni à « la conception qu’elle se fait de la féminité » ni à l’image d’une « femme moderne » et « séduisante ».
Camaïeu pointe également le fait que son ancienne salariée a fait intervenir le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) dans le litige, dénonçant une instrumentalisation de l’affaire. Le CCIF publiera notamment une tribune intitulée L’enseigne participe à la banalisation et à l’expansion de l’islamophobie sur son site Internet.
Le 6 septembre 2019, la cour d’appel de Toulouse a condamné Camaïeu à verser la somme de 10 000 euros à son ex-employée, considérant que Narimène avait bien fait l’objet d’une « discrimination fondée sur les convictions religieuses ».
Si le règlement interne de la société indique que les salariées doivent représenter Camaïeu par leur « look (tenue vestimentaire, coiffure, maquillage) », les magistrats ont toutefois considéré que ledit règlement ne mentionnait aucun principe relatif à la neutralité religieuse.
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