Transports: faire grève pour les vacances, une « habitude » de la SNCF qui pourrait ne plus passer

Par Anais Duroy
15 février 2024 12:56 Mis à jour: 15 février 2024 15:19

Face à une énième annonce de grève de la SNCF pendant les vacances scolaires, de nombreuses voix s’élèvent contre cette « habitude » prise par les grévistes de la compagnie ferroviaire.

« Trop c’est trop » : la droite majoritaire au Sénat se saisit de la mobilisation à la SNCF en ce week-end de vacances scolaires pour s’attaquer au droit de grève sur certaines périodes, un discours qui bénéficie d’un certain écho dans les rangs macronistes. « Il faut dire stop à ceux qui prennent les Français en otages », a déclaré le président des Républicains Éric Ciotti sur TF1.

Les mêmes mots sont repris par les responsables de la droite qui n’hésitent plus à questionner le droit de grève dans les transports, constitutionnellement protégé.

« La grève doit être l’arme ultime », or elle est « devenue un instrument de la négociation », a pointé le président du Sénat Gérard Larcher, ouvert à la discussion sur des dispositifs pour encadrer ces mouvements sociaux, comme celui des contrôleurs de la SNCF.

Les initiatives législatives commencent à fuser : Éric Ciotti a promis de déposer un « texte législatif » pour faire face à cette « surenchère permanente », tandis que Gérard Larcher a souhaité faire inscrire au plus vite à l’ordre du jour du Sénat une proposition de loi centriste allant dans le même sens.

Faire concilier droit de grève et droit de circuler

Le texte déposé mercredi par le patron de l’Union des démocrates indépendants (UDI) Hervé Marseille, qui ne pourra pas être examiné avant le mois d’avril, prévoit ainsi d’octroyer au gouvernement un capital annuel de 60 jours d’interdiction de grève, réparti par décret dans une limite de quinze jours par période d’interdiction. « Trop, c’est trop », s’indigne l’influent sénateur auprès de l’AFP. « Si on avait affaire à des gens responsables, on ne serait pas obligés d’imaginer des dispositifs de cette nature mais il faut bien protéger les Français », reprend le sénateur.

Plusieurs propositions parlementaires ont déjà tenté, ces dernières années, de durcir la loi de 2007 sur le service minimum dans les transports, notamment après l’épisode du week-end de Noël 2022 qui avait laissé 200.000 voyageurs sur le carreau. Mais aucune n’a prospéré.

Un texte de la droite sénatoriale interdisant les préavis autour des jours fériés et sur « les deux premiers et les deux derniers jours » des vacances scolaires est ainsi déjà dans les tuyaux. « C’est un équilibre entre deux libertés fondamentales, celle de faire grève et celle de circuler », plaide le LR Stéphane Le Rudulier, auteur de cette proposition. Il craint que les Jeux olympiques de l’été fassent l’objet d’un « chantage des syndicats avec l’exécutif, ce qui serait catastrophique pour l’image de la France ».

La grève est un droit et travailler est un devoir

La droite n’a pas manqué de remarquer une certaine ouverture du gouvernement sur le sujet, après les déclarations de Gabriel Attal mercredi.

Le Premier ministre a déploré « une forme d’habitude, à chaque vacances qui arrivent, d’avoir l’annonce d’un mouvement de grève » des cheminots. « Les Français savent que la grève est un droit », mais « aussi que travailler est un devoir », a-t-il dit. En déplacement jeudi dans la Marne, il a encouragé le Parlement à s’emparer de ce débat.

Dans le sillage du chef du gouvernement, l’agacement commence également à pointer dans les rangs macronistes. « La question n’est pas le droit de grève, mais de savoir jusqu’où on n’en abuse pas », a estimé le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu sur Sud Radio.

Le président des sénateurs macronistes François Patriat a reconnu qu’il réfléchirait à « toutes les évolutions » qui permettraient d’encadrer « ces grèves intempestives, redondantes et renouvelées », tandis que le député Karl Olive a prôné, sur X, « des lois d’exception sur le sujet ».

Quelques voix, à gauche et au Rassemblement national, ont dénoncé ces remises en cause. Le vice-président du RN Sébastien Chenu s’est dit sur franceinfo « pas favorable à ce qu’on interdise le droit de grève dans notre pays », assurant qu’il « ne reprochera jamais à des gens qui se lèvent tôt d’essayer de défendre leur pouvoir d’achat ». Au Sénat, où le débat est déjà bien enclenché, le patron des écologistes Guillaume Gontard a rappelé que « faire grève est un droit ». Avant de marteler : « Les grévistes ne sont pas des preneurs d’otages. »

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