À l’arrivée de la saison froide, les intérieurs ont tendance à se transformer selon la mode du cocooning. Les plantes, si elles font partie des éléments d’intérieur indispensables, sont pourtant difficiles à entretenir. Pariant sur ce créneau, de jeunes startupeurs ont lancé leurs boîtes, avec pour mission de verdir votre domicile. Tour d’horizon du « faire pousser » avec les créateurs de Prêt à Pousser, La Grande Serre et Groww.
1-Prêt à pousser : une expérience tech du room growing
Romain Behaghel et Jérôme Devouge se sont rencontrés sur les bancs de l’INSEEC Business School. Sous le préau, ils ont vu des champignons qui se développaient dans des conditions extrêmes, et cela les a inspiré à produire un kit pour faire pousser des champignons. En 2014, ils remportent le prix Ciel innovation, qui donne un gros coup de projecteur sur leur société. Il crée par la suite un nouveau produit, Lilo, un jardin d’intérieur fonctionnant en autogestion qui ne requiert que la surveillance du niveau d’eau. La start-up, qui marie innovation et expérience de plantation, continue de franchir les étapes et envisage d’exporter son concept en Europe.
Romain Behaghel, vous êtes co-fondateur de Prêt à Pousser. Comment résumeriez-vous votre concept ?
Rendre la culture à domicile accessible à tous, et innover sans cesse. C’est ce que nos amis anglais appellent le room glowing, le fait de faire pousser ses plantes chez soi. C’est un peu une niche, quelque chose d’encore anecdotique, nous sommes les premiers à amener cela sur le marché, mais il y a vraiment énormément de choses à faire. C’est une tendance de fond, se rapprocher de ce que l’on mange, une façon d’être plus en contact avec la nature. Nous y parvenons avec des produits qui permettent aux utilisateurs de récolter à coup sûr toute l’année. Nous garantissons la pousse de tous nos produits. Pour cela, il faut travailler sur la technologie, être toujours en avance et très innovant car ce n’est pas facile de faire pousser du basilic en intérieur.
Le Smart Lilo, c’est un objet connecté ?
Cette nouvelle version de Lilo possède une application mobile gratuite qui vous accompagne dans votre expérience de pousse. D’abord, elle s’assure que les différentes étapes de croissance de la plante se déroulent correctement. On fournit également des recettes pour avoir des idées originales pour cuisiner ses plantes. Comme on en cueille toutes les semaines, au bout d’un moment, on a fait le tour du basilic mozza, il faut d’autres idées. Cela, c’est la fonction d’accompagnement.
Ensuite, il y a la possibilité de régler la puissance et le cycle de la lumière. Nous avons fait cela pour répondre aux besoins de certains clients qui utilisent le produit comme une lampe d’appoint pour travailler le soir ou pour lire. Ils aiment bien avoir un éclairage un peu plus doux, moins puissant que ce que l’on a en pleine journée pour faire grandir les plantes. C’est ce type de fonction que l’on rajoute.
Sur quoi portent ces recherches ?
Ce programme comprend deux axes. D’abord, le développement de la gamme des capsules : dans le Lilo, les plantes germent et grandissent depuis une capsule, et nous en proposons onze de types différents. Il y a les plantes aromatiques les plus connues, quelques fleurs, mais nous aimerions étendre ce choix et proposer aussi des petits fruits et légumes. Les possibilités sont quasi-infinies. Le deuxième axe, c’est de travailler sur d’autres configurations de produits. Le Lilo se plaît bien sur un comptoir de cuisine. Maintenant on travaille sur d’autres versions aux fonctions un peu plus spécifiques, selon que l’on préfère plus ou moins produire, ou avoir du décoratif.
Prêt à pousser vient de lever 1,7 million d’euros. Quels sont vos objectifs de croissance ?
Nous avons levé cet argent pour accélérer les choses. Nous sommes arrivés là où nous sommes par nos propres moyens. Le premier produit, le kit à champignons, nous a permis de rentrer dans une phase où l’entreprise était pérenne. Nous réussissions à vivre. Nous avons alors embauché une équipe qui a travaillé sur le développement du produit Lilo, le potager intérieur.
Puis, il nous a fallu accélérer les choses. L’équipe, la communication/marketing et la R&D sont les trois lignes d’investissements de cette levée. L’équipe, ayant une ambition grandissante, il faut du monde pour faire ce que l’on veut faire. Le marketing et la communication, c’était, notamment, pour avoir une présence plus forte sur la fin de l’année 2016. On a des produits qui font de très bons cadeaux. La R&D, c’est pour soutenir notre programme qui s’étale sur plusieurs mois.
La start-up s’est beaucoup développée en trois ans d’existence. Quel regard portez-vous sur votre parcours ?
Nous sommes fiers d’en être arrivés là aujourd’hui. L’équipe compte presque 15 personnes. On a fait une belle levée de fonds, on a des produits de qualités qui sont très innovants, originaux, et cela nous permet de bien nous démarquer dans le paysage des start-up.
C’est un peu l’alliance entre une boîte très tech, avec des chercheurs qui travaillent sur le produit, et une belle marque que nous souhaitons construire. Notre créneau n’est pas le plus facile. Nous sommes un peu le mouton à cinq pattes, mais c’est ce qui fait peut être notre motivation tous les jours et la puissance du concept sur le long terme.
Le fait de travailler dans le vivant, nous en sommes fiers. Car nos champignons et plantes démarrent d’une graine ou d’un mycelium. Ce sont des produits vivants qu’il faut adopter et savoir entretenir.
Vous comptez vous développer à l’international ?
Oui, tout à fait, nous nous concentrons sur la France pour 2016 et pour la première moitié de 2017. À partir de fin 2017 et 2018, nous allons nous étendre en Europe, dont les principaux marchés seront l’Angleterre, l’Allemagne et l’Italie.
2- Groww, le coach jardinage
Groww, application pour smartphone, vous invite à sélectionner vos plantes dans une base de données qui vous expliquera par la suite les gestes d’entretien à effectuer. La start-up lilloise s’associe également à des pépiniéristes pour proposer une sélection de graines livrées à l’utilisateur.
Benoît Gryspeerdt, vous êtes créateur de Groww. Comment est né Groww ?
Il y a cinq ans, j’ai quitté Paris avec ma compagne. Nous avons déménagé dans une maison et sommes passés d’un balcon à un grand jardin. On s’est dit qu’on allait faire pousser des plantes, et comme beaucoup de personnes, on a essayé et on a lamentablement échoué ! Quand j’avais besoin d’infos, je devais aller chercher mes réponses sur les forums ou dans les livres de jardinage.
Étant versés tous les deux dans la techno, on s’est dit qu’on devrait pouvoir inventer un objet technologique qui permettrait d’avoir les infos sous les doigts au moment où on en a besoin. On a donc inversé le processus : l’information vient à nous, ce n’est plus à nous de chercher. C’est comme cela que l’idée est venue, au fond de mon petit jardin !
Aujourd’hui, notre application fonctionne comme un système de notification. Vous faites la liste de vos plantes et l’application met les tâches dans l’ordre et vous rappelle les plus importantes. C’est le premier des niveaux. Après, l’objectif est de donner un accompagnement qui soit de plus en plus personnalisé, permettre aux gens de progresser. Nous allons rajouter des couches de fonctionnalités au printemps prochain. Le travail est en cours.
Vous travaillez également avec des pépiniéristes. Quel est votre modèle ?
Le constat de base, c’est de dire que quand on ne sait pas jardiner, on ne sait pas non plus quoi acheter. On a tous un bout de balcon ou un bout de jardin et l’envie que ce soit joli, sans savoir forcément que mettre. Il faut être capable de proposer le produit qui convienne, la bonne plante à la bonne personne au bon moment. Arriver à conseiller, c’est aussi la fondation d’un business model.
Donc on aimerait aller vers quelque chose qui serait une « curated marketplace » où on choisit de travailler avec des pépiniéristes de manière à créer une gamme de produits de qualité qui puisse satisfaire nos utilisateurs. Pour l’instant, on le fait un petit peu nous-mêmes, on avance de plus en plus vers une sélection de partenaires pour arriver à une petite gamme de plantes.
Qui sont vos clients ?
Il y a cet autre constat : notre cible de clients, entre 30 et 40 ans, urbains et périurbains, achètent leurs plantes un peu au hasard chez le fleuriste, la jardinerie du coin ou Ikea.
On souhaiterait le développer parce que nos utilisateurs achètent beaucoup de choses sur les sites de la Fnac ou d’Amazon, mais jamais de végétaux. Les plantes, c’est un marché sous-numérisé et encore embryonnaire sur Internet : leur vente représente 1,5% du marché total de la Toile, contre 8% pour la vente d’objets courants de la maison, alors même que la vente à distance permet de raccourcir les intermédiaires, d’obtenir des produits plus frais, plus sains, et de raccourcir les circuits. C’est plutôt malin pour le producteur et le consommateur.
De fait, vous avez appris à jardiner ?
Je progresse, je suis moins pire qu’avant (rires) ! J’ai fait une école de commerce à la base, alors je suis allé chercher des personnes avec des compétences. Mon associé opérationnel, Thibaut Martini, est diplômé de l’école du paysage de Versailles. Il s’occupe de ces aspects en interne.
3- L’horticulture à domicile avec La Grande Serre
La Grande Serre, jeune start-up lancée en avril dernier, propose de garnir votre intérieur ou extérieur avec des plantes adaptées à vos besoins et désirs, et garantit leur installation et entretien chaque mois.
Maud Rey, vous êtes cofondatrice de La Grande Serre. Pourquoi l’avoir créée ?
Quand on est en ville, il est très compliqué de trouver des plantes de qualité et de les conserver en pleine santé. Nous avons mené une étude de marché et en avons déduit que 83% des citadins n’arrivent pas à maintenir leurs plantes en vie, ce qui est énorme ! 63% ne sont pas satisfaits par l’offre et la variété proposée. Avec mon associée et co-fondatrice de la boîte, Perrine Kermel, nous nous sommes dit qu’il fallait trouver la bonne solution qui permettrait à tout le monde d’avoir ces plantes chez soi et de pouvoir s’en occuper. Finalement, nous avons créé la Grande Serre.
De quoi s’agit-il ?
C’est un concept inédit, qui n’existe pas à notre connaissance à l’étranger ou sur d’autres secteurs. Il s’agit d’une offre temporisée de location qui comprend à la fois un service de sélection, le service de livraison, la mise en pot, l’entretien, la garantie et l’assistance dès qu’il y a un problème. Tout est intégré dans le prix.
Quand un client passe commande sur notre site Internet, nous lui posons une batterie de questions : a-t-il déjà des plantes, est-ce pour l’intérieur ou l’extérieur, quelle taille, la lumière dont dispose son domicile, quelles variétés il aime, s’il a des enfants en bas âge, des allergies ou des animaux qui grattent la terre…
Ensuite nous nous rendons chez nos horticulteurs pour faire une première sélection assez large sur la base de ses réponses et le jour de la livraison, nous apportons les plantes à son domicile. C’est un peu la boutique qui vient chez le client. Pour 25,90 euros par mois, il peut choisir entre deux grandes, trois moyennes ou quatre petites, avec la possibilité de choisir des plantes en supplément à 5, 7 ou 10 euros selon les tailles.
Il fait son choix et nous le conseillons. Cela nous permet d’apporter vraiment énormément de variétés et de faire découvrir des plantes aux gens. C’est vraiment très sympa. Ensuite, nous rempotons ses plantes sur place et revenons tous les mois pour l’entretien. Nous les accompagnons ainsi au fil des saisons. S’il y a des parasites ou un arrosage trop important, nous lui expliquons et prenons en charge les traitements plus complexes. À chaque entretien, on explique vraiment aux personnes ce que l’on est en train de faire, et quand ils nous ont vu agir sur une année entière, ils sont à peu près autonomes et nous leur proposons une solution d’achat.
Comment avez-vous trouvé les espèces rares que vous proposez ?
Cela nous a vraiment pris beaucoup de temps. Avant la création de notre société, nous avons passé deux ans à parcourir les campagnes françaises, à utiliser différents réseaux pour trouver de bons horticulteurs qui travaillent dans le bio avec les méthodes à l’ancienne. On a eu la chance de trouver des petits indépendants, la plupart sont collectionneurs de plantes. Cela nous a permis d’avoir accès à ces plantes rares. Pour nous, les rencontrer a représenté un coup de pouce du destin.
Vous mentionnez une éthique fondée sur la « revalorisation de nos terroirs », pouvez-vous expliquer ?
Nous venons toutes les deux de province, nous sommes passionnées par les plantes depuis toujours. Ce lien à la terre est vraiment quelque chose d’important pour nous. Il faut savoir que l’horticulture française n’est vraiment pas en bonne santé notamment en ce qui concerne les plantes d’intérieur. Arriver à travailler avec des petits horticulteurs, c’est aussi les aider à se développer et c’est une chose qui nous tient à cœur.
Quel profil ont vos clients ? Quels sont vos objectifs à moyen terme ?
L’âge moyen se situe entre 25 et 35 ans, avec des personnes plus jeunes ou plus âgées. On travaille aussi bien avec les particuliers qu’avec les entreprises. Actuellement, on travaille à Paris et dans la petite couronne, on s’étend petit à petit. Au départ, nous n’étions que deux, comme nous faisions tous nos entretiens à vélos, il y a des limites physiques qu’on ne peut pas dépasser. Nous avons lancé notre site Internet en avril dernier et notre objectif est de bien réussir à nous implanter à Paris.
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