Des milliers de personnes se sont rassemblées jeudi en Bosnie aux cérémonies marquant le 29e anniversaire du massacre des musulmans de Srebrenica, deux mois après la création à l’ONU d’une Journée internationale de commémoration de ce génocide.
La guerre inter-communautaire de Bosnie (1992-95) a fait près de 100.000 morts, mais le massacre de Srebrenica est le seul crime de ce conflit à avoir été qualifié de génocide par la justice internationale – le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et la Cour internationale de Justice (CIJ).
Après avoir pris le 11 juillet 1995 cette ville-enclave, déclarée « zone protégée de l’ONU » et dans laquelle vivaient plus de 40.0000 personnes, dont beaucoup de déplacés, les forces Serbes de Bosnie, dirigées par le général Ratko Mladic, s’étaient livrées à des exécutions de masse.
8000 personnes tuées en l’espace de quelques jours
En l’espace de quelques jours, environ 8000 hommes et adolescents bosniaques (musulmans) y avaient été tués. Tous les autres habitants en avaient été expulsés.
« C’est dur quand vient le mois de juillet. Ils ont connu ce sort pour la seule raison qu’ils avaient un nom (musulman) », dit Mevlida Hasanovic, qui prie sur la tombe de son cousin, qui avait 18 ans lorsqu’il a été tué. Cette femme de 54 ans a perdu une dizaine de membres de sa famille, tous des hommes, y compris son père et son mari, dont la tombe est à côté de celle de son cousin.
Les restes de son cousin ont été inhumés en deux fois, car des parties en ont été trouvées dans deux charniers différents. Elle espère toujours que soit retrouvé « au moins un os » d’un de ses frères, pour pouvoir lui donner une sépulture. « Leurs âmes savent que nous sommes là, tout près d’eux », dit-elle.
La cérémonie doit comporter les funérailles de quatorze victimes dont les restes ont été retrouvés et identifiés depuis le précédent anniversaire du massacre. Parmi elles, un mineur, Beriz Mujic, qui avait 17 ans, et dont le frère et le père ont également été tués, selon l’Institut bosnien pour les personnes disparues.
À ce jour, les restes – souvent retrouvés incomplets – de 6988 victimes ont été enterrés, dont 6751 dans un centre mémorial de Srebrenica et 237 dans d’autres cimetières, selon une porte parole de l’Institut bosnien pour les personnes disparues, Emza Fazlic. « Les restes de ces victimes ont été retrouvés dans 87 fosses communes, mais nous recherchons encore environ un millier de personnes », a dit Mme Fazlic à l’AFP.
Pour couvrir leur crime, les forces serbes de Bosnie avaient déplacé les corps vers d’autres fosses communes dans un second temps.
Kada Sikovic, accompagnée de ses deux filles et de son fils, se tient près du cercueil de son mari, Musan, des larmes coulant sur ses joues. Des morceaux de mâchoire avaient été retrouvés en 2010, mais elle avait refusé une inhumation, jusqu’à ce que soient retrouvés d’autres restes l’année passée.
« Grâce à Dieu nous avons retrouvé quelques os », dit-elle à l’AFP. Elle se remémore le moment où la famille s’est séparée à Srebrenica en 1995. « Il pleurait, il embrassait notre fille, prenait le petit dans ses bras et disait : ‘‘à bientôt’’. »
Un génocide nié par les autorités serbes
Les chefs politique et militaire des Serbes de Bosnie pendant le conflit, Radovan Karadzic et Ratko Mladic, ont été condamnés à perpétuité par le TPIY pour le génocide de Srebrenica, tout comme une cinquantaine d’autres coupables, par le TPIY et par la justice bosnienne.
La gravité de ce crime continue d’être relativisée par des dirigeants politiques de l’entité serbe de Bosnie et de la Serbie, qui rejettent la qualification de génocide.
« Il n’y a pas eu de génocide à Srebrenica », a encore répété le 23 mai le chef politique des Serbes de Bosnie, Milorad Dodik, peu avant l’adoption de la résolution créant une journée commémorative par l’Assemblée générale de l’ONU, fustigée par les dirigeants serbes de Bosnie et par la Serbie.
« En dépit de nos différences, nous devons faire preuve de respect pour la douleur et les souffrances qui ont frappé beaucoup de gens de toutes origines et religions en Bosnie et Herzegovine », a insisté jeudi M. Dodik sur X.
Le déni du génocide est passible depuis 2021 de six mois à cinq ans de prison. Aucune condamnation n’a été prononcée à ce jour.
« Il n’y a pas de place parmi nous pour ceux qui nient le génocide, essayent de réécrire l’histoire et glorifient les criminels de guerre », ont affirmé mercredi dans un communiqué le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, et le commissaire à l’Élargissement, Oliver Varhelyi.
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