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Turquie: des ex-ouvriers d’une marque du groupe Rocher mobilisés depuis quatre mois

octobre 6, 2018 12:53, Last Updated: octobre 6, 2018 12:56
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Plusieurs dizaines d’ex-ouvriers de l’usine Flormar, marque du groupe français Rocher, manifestent chaque jour depuis plus de quatre mois devant leur ancien lieu de travail, situé près d’Istanbul, pour récupérer leur emploi qu’ils affirment avoir perdu en raison de leur activité syndicale. Lorsque le syndicat Petrol-Is a entamé des procédures pour se constituer à l’usine de cosmétiques en janvier, la direction « a commencé à mettre la pression sur les employés qui nous soutenaient », explique l’un des responsables du syndicat, Sivan Kirmiziçiçek.

Fin mars, douze des membres de Petrol-Is ont été licenciés. L’une d’entre eux, Pinar Koca a travaillé 8 ans dans l’usine, située à Gebze, près d’Istanbul. Elle explique que le motif qui lui a été officiellement fourni était une « baisse de performance ».  Mais, pour elle, cette raison n’est qu’une excuse, puisqu’elle a perdu son travail deux jours seulement après avoir rejoint Petrol-Is.

Mi-mai, 85 des quelque 400 salariés de l’usine ont été licenciés, dont une grande majorité de femmes, et la décision a été prise de manifester quotidiennement devant l’usine jusqu’à leur réembauche. Plus de quatre mois plus tard, 47 autres salariés ont perdu leur emploi et les manifestations se poursuivent, sous des bannières appelant au boycott d’Yves Rocher, principale marque du groupe Rocher, actionnaire majoritaire de Flormar depuis 2012.

« Leur employeur reproche à une majorité d’entre eux d’avoir participé à une manifestation illégale », explique à l’AFP l’avocat des ouvriers, Murat Özveri.  Or « l’employeur considère comme des manifestations illégales les réactions démocratiques des ouvriers, comme rendre visite aux collègues (manifestants) pendant les pauses-thé », ajoute-t-il.

Une soixantaine de personnes se retrouvent tous les matins devant le portail de leur ancienne usine, et enchaînent danses traditionnelles et pauses sur des petits tabourets en plastique installés sur le trottoir d’en face, sous une grande bannière clamant « ce n’est pas Flormar, mais la résistance qui embellit ». « Je n’ai rien fait d’illégal », insiste Tugçe Güler, qui a travaillé un an dans cette usine et dit avoir été renvoyée pour avoir « applaudi » ses collègues pendant sa pause.

Interrogé, le groupe Rocher a démenti toute motivation antisyndicale.  « C’est totalement faux parce que, de ce que le groupe a pu identifier en échangeant avec le management local, il n’y a eu aucun licenciement qui a été opéré sur la base d’appartenance à un syndicat ou sur la base d’avoir soutenu différentes actions », assure à l’AFP Marion Moulin, directrice de la communication du groupe.

Elle évoque « des manifestations illégales et des situations qui ont mis en cause la sécurité des personnes et des biens là-bas ». « On laisse évidemment la justice faire son travail et on attend les résultats pour mettre en place les actions décidées par la justice », poursuit-elle. Une délégation d’ouvriers licenciés s’est rendue fin septembre à Paris, où certains syndicats français sont également mobilisés pour les soutenir.

Il ont été reçus par le groupe Rocher, qui, après cet échange, a à nouveau discuté avec Flormar de la mise en place de mesures visant à apaiser les tensions, affirme Mme Moulin, insistant sur le fait que le groupe Rocher « fait toujours confiance aux équipes locales » pour éviter toute « ingérence depuis Paris ». Parmi les problèmes qui ont poussé les ouvriers à rejoindre Petrol-Is, figure la question des salaires, certains gagnant, selon eux, toujours le salaire minimum (environ 1.600 livres turques net, soit un peu plus de 220 euros) après 15 ans de services.

Mais ils dénoncent aussi un manque de mesures de sécurité dans l’usine, une forte pression et des horaires très lourds.  « J’ai deux enfants, je ne les ai pas vus grandir. Je rentrais chez moi il était 21h, ils dormaient. Je partais le matin pendant qu’ils dormaient encore », raconte Nurhan Güler, qui y a travaillé pendant 14 ans.  « L’entreprise a grandi, d’autant plus quand elle a été rachetée par les Français mais nous n’avons pas touché la moindre part de tout cela », poursuit-elle.

L’avocat, Me Özveri, espère que les ouvriers obtiendront gain de cause, mais met en garde contre la possibilité pour l’employeur de ne payer que des compensations décidées par le tribunal pour ne pas réembaucher les ouvriers. Devant leur ancien lieu de travail, les ouvriers sont toutefois déterminés à se battre: « Que ce soit l’été, l’hiver, sous la neige, peu importe, nous resterons ici », promet Mme Koca.

D.C avec AFP

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