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Turquie: procès des figures de proue des manifestations anti-Erdogan de 2013

juin 24, 2019 5:37, Last Updated: juillet 12, 2019 14:26
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Plusieurs figures de la société civile turque, dont le philanthrope Osman Kavala, sont jugées à partir de lundi, accusées d’avoir tenté de « renverser le gouvernement » de Recep Tayyip Erdogan lors d’un vaste mouvement de contestation en 2013.

Les 16 accusés risquent la prison à vie dans cette affaire suscitant l’inquiétude des défenseurs des droits humains qui dénoncent une « chasse aux sorcières » et soutiennent qu’il n’existe « pas l’ombre d’une preuve » pour appuyer l’accusation. Parmi les personnes jugées figure l’homme d’affaires et philanthrope Osman Kavala, dont l’incarcération depuis plus de 600 jours est devenue le symbole de la répression contre la société civile en Turquie, en particulier depuis une tentative de putsch en 2016.

M. Kavala, une figure connue et respectée dans les cercles intellectuels en Europe, est accusé d’avoir financé les gigantesques manifestations contre M. Erdogan en 2013, connues sous le nom de « mouvement de Gezi ». Celui-ci a commencé avec un sit-in de militants écologistes pour défendre le parc de Gezi, l’un des rares espaces verts au cœur d’Istanbul. Après une répression brutale, il s’est transformé en mouvement plus global contre M. Erdogan, qui était alors Premier ministre.

La répression contre les sympathisants de Gezi a connu un regain d’intensité à l’automne 2018, soit plus de cinq ans après les manifestations, avec l’arrestation de plusieurs universitaires et figures de la société civile proches de M. Kavala. La Turquie est régulièrement pointée du doigt par les organisations de défense des droits humains qui s’inquiètent de la dégradation de l’état de droit ces dernières années.

Dans son acte d’accusation de 657 pages, le procureur présente le mouvement de Gezi comme une opération pilotée de l’étranger pour nuire à la Turquie. « Rien de tout cela n’est arrivé par coïncidence. Il y avait un soutien de l’étranger dans le cadre d’une opération visant à mettre la République de Turquie à genoux », peut-on ainsi lire dans ce document aux accents complotistes.

Pour Andrew Gardner, chercheur d’Amnesty International en Turquie, l’acte d’accusation « ne comporte pas l’ombre d’une preuve attestant que (les accusés) étaient impliqués dans une quelconque activité criminelle, encore moins qu’ils ont conspiré pour renverser le gouvernement ». « Au lieu de cela, il s’efforce d’une manière absurde de présenter des activités associatives banales comme des crimes », ajoute M. Gardner, dénonçant une « chasse aux sorcières ».

Parmi les éléments de l’accusation, figure une carte de la répartition des abeilles sur le territoire turc, trouvée dans le téléphone de M. Kavala. Le document est présenté comme une preuve que le mécène entendait redessiner les frontières du pays. La première audience de ce procès a lieu dans la prison de Silivri, près d’Istanbul.

Six des 16 accusés seront jugés par contumace, ayant fui le pays. C’est le cas par exemple du comédien Mehmet Ali Alabora et du journaliste d’opposition Can Dündar. En ce qui concerne M. Alabora, l’accusation relève qu’il a joué dans une pièce de théâtre mettant en scène une révolte contre le dirigeant d’un pays fictif.

Mais le personnage central de cette affaire, celui contre qui M. Erdogan concentre ses attaques, est M. Kavala. Accusant M. Kavala de « financer les terroristes », le président turc a plusieurs fois comparé l’homme d’affaires au milliardaire et philanthrope américain d’origine hongroise George Soros, bête noire des dirigeants autoritaires de plusieurs pays.

L’an dernier, M. Erdogan avait ainsi qualifié M. Kavala de « représentant » en Turquie du « célèbre juif hongrois Soros ». La fondation Open Society de M. Soros, qui a cessé toute activité en Turquie l’an dernier, a qualifié le procès de « simulacre politique » dont le but est de « réduire au silence toute voix critique en Turquie ».

« Le fait qu’ils soient maintenant en procès, risquant potentiellement la prison à vie, c’est une tragédie », a déclaré le président de la fondation, Patrick Gaspard, dans un communiqué.

D.C avec AFP

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