Les évacuations massives continuent mercredi dans le Sud de l’Ukraine après la destruction partielle dans une zone occupée par les forces russes du barrage de Kakhovka dont Moscou et Kiev se rejettent la responsabilité et qui a provoqué des inondations le long du Dniepr, laissant craindre un désastre humanitaire.
Pour le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, c’est « une nouvelle conséquence dévastatrice de l’invasion russe de l’Ukraine », lancée fin février 2022. « Les attaques contre les civils et les infrastructures civiles essentielles doivent cesser », a-t-il dit. Lors d’une réunion d’urgence du Conseil de sécurité mardi après-midi, le responsable de l’ONU pour les affaires humanitaires Martin Griffiths a décrit une catastrophe dont « l’ampleur ne pourra être pleinement évaluée que dans les prochains jours » mais dont les conséquences seront « graves et de portée importante » des deux côtés de la ligne de front. Il a évoqué le « fait de ne pas pouvoir fournir d’aide à des millions de personnes touchées » ainsi que le « coup porté à la production agricole » et les « risques de contamination par les mines et engins explosifs » qui pourraient être emportés dans les eaux « dans des zones évaluées sûres récemment ».
À Washington, un porte-parole de la Maison Blanche a estimé que la destruction partielle du barrage, qui fournit l’eau de refroidissement à la plus grande centrale nucléaire d’Europe, avait « certainement (fait) de nombreux morts, tout en précisant n’avoir « pas de conclusion définitive sur ce qui s’est passé ». Lors de cette réunion d’urgence, les représentants russes et ukrainiens se sont mutuellement accusés de cette destruction, comme l’avaient fait leurs capitales. Moscou parle d’un « sabotage délibéré » mené par Kiev qui dénonce un acte de « terrorisme écologique et technologique » en vue de « freiner » l’offensive de son armée. Selon les autorités ukrainiennes, 17.000 personnes ont été évacuées et 24 villages inondés à ce stade.
Les évacuations vont se poursuivre sur plusieurs jours
« La situation la plus difficile a lieu dans le district de Korabelny de la ville de Kherson. Jusqu’à présent, le niveau de l’eau s’est élevé de 3,5 mètres, plus de 1000 maisons sont inondées », dans cette cité reprise aux Russes par les Ukrainiens en novembre 2022, a déclaré mardi soir dans un communiqué le chef de cabinet adjoint de la présidence ukrainienne, Oleksiï Kouleba. Selon lui, les évacuations vont se poursuivre mercredi et dans les prochains jours par bus et par train. « Plus de 40.000 personnes risquent d’être en zones inondées », a prévenu le procureur général ukrainien Andriï Kostine. « Malheureusement, plus de 25.000 civils se trouvent sur le territoire sous contrôle russe », a-t-il ajouté.
Les autorités installées par les Russes dans les régions qu’ils occupent ont quant à elles dit avoir commencé l’évacuation de la population de trois localités, mobilisant une cinquantaine de cars. Vladimir Leontiev, le maire mis en place par Moscou à Nova Kakhovka, où se trouve le barrage, a indiqué que sa ville était sous les eaux et que 900 de ses habitants avaient été évacués.
Inquiétudes pour la centrale nucléaire de Zaporijjia
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a accusé la Russie d’avoir « fait exploser une bombe, causant des dommages environnementaux massifs ». En octobre, il l’avait accusée d’avoir miné le barrage. Pour lui, « la Russie est coupable d’un écocide brutal ». Plus de 150 tonnes d’huile de moteur ont été répandues dans le fleuve et des milliers d’hectares de terres cultivables vont être inondées, selon Kiev.
L’attaque du barrage a aussi suscité de nouvelles inquiétudes pour la centrale nucléaire de Zaporijjia, située à 150 km en amont et refroidie par l’eau retenue par le barrage. Mais il n’y a « pas de danger nucléaire immédiat », a estimé l’Agence internationale pour l’énergie atomique (AIEA). Comme le barrage, la centrale est située dans une zone occupée par les Russes après l’invasion qu’ils ont déclenchée le 24 février 2022.
« Il est physiquement impossible de (le) faire sauter d’une manière ou d’une autre de l’extérieur, avec des bombardements », la version donnée par Moscou, a ajouté M. Zelensky.
« Contre la vie, contre la nature, contre la civilisation »
« Le monde doit réagir. La Russie est en guerre contre la vie, contre la nature, contre la civilisation », a-t-il martelé, assurant toutefois que cela « n’affecterait pas la capacité de l’Ukraine à libérer ses propres territoires ». Si les lignes défensives russes le long du Dniepr vont être submergées, c’est surtout une potentielle opération militaire ukrainienne dans cette région qui risque d’être entravée. L’Ukraine avait affirmé lundi avoir gagné du terrain près de Bakhmout (Est) tout en relativisant l’ampleur des « actions offensives » menées ailleurs.
La Russie dit pour sa part repousser ces attaques d’envergure, tout en reconnaissant mardi que 71 de ses soldats étaient morts et 210 avaient été blessés ces derniers jours. Et ce alors que l’armée russe fait rarement état de ses pertes. Les Ukrainiens affirment préparer depuis des mois une vaste contre-offensive destinée à obliger les troupes russes à se retirer des territoires dont elles se sont emparées.
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