Ukraine: sur le site du massacre de Babi Yar, une frappe russe qui remue les symboles

Par Epoch Times avec AFP
2 mars 2022 13:17 Mis à jour: 2 mars 2022 13:18

Quatre-vingt ans après que le site de Babi Yar a servi de fosse commune à 30.000 Juifs assassinés par les occupants nazis en Ukraine, cinq corps gisent sur le sol, recouverts d’une fine couche de neige, après une frappe russe.

La frappe d’un missile russe contre la tour de télévision de Kiev s’est produite mardi après-midi. Depuis, personne n’a osé approcher les corps.

« On nous a dit de rester loin, les saboteurs russes pouvaient être présents pour finir le travail », explique à l’AFP Volodymyr Roudenko, un avocat de 50 ans et volontaire de la défense qui a passé la nuit de mardi à mercredi sur place, en attendant les légistes.

Une famille a été décimée père, mère, fille et fils adolescents

Selon les policiers, c’est a priori une famille qui a été décimée: père, mère, fille et fils adolescents. Mais les victimes n’ont pas pu être encore identifiées. Elles ont été tuées en sortant de l’épicerie où elles s’approvisionnaient juste avant le couvre-feu.

L’alarme du magasin, aux vitres et étagères pulvérisées par la frappe, sonne elle dans le vide.

Des policiers couvrent les corps des passants tués lors de la frappe aérienne d’hier qui a frappé la tour de télévision principale de Kiev à Kiev le 2 mars 2022. Photo Aris MESSINIS/AFP via Getty Images.

La cinquième victime est un journaliste de la télévision d’Etat, selon une carte de presse retrouvée sur lui et présentée à l’AFP.

Une camionnette militaire estampillée « morgue » est arrivée dans la matinée, et les soldats chargés d’évacuer les corps calcinés luttent maladroitement dans le froid et la stupeur, pour déplier la bâche de plastique grise qui servira à les recouvrir.

« C’est notre vérité qu’ils veulent attaquer »

La tour de la télévision, une structure de métal haute de 300 m qui disparaît dans le brouillard, est noircie par le souffle de l’explosion, mais tient debout. Une autre antenne de la télévision d’Etat a pris le relais de la diffusion.

Au pied de la grande dame de fer rouge et blanche, un champ de débris pulvérisés sur la route est visible sur plusieurs dizaines de mètres.

« Cette tour, c’est notre symbole de vérité, d’informations libres, de vraies nouvelles, c’est notre vérité qu’ils veulent attaquer », affirme M. Roudenko, l’avocat-volontaire, armé.

Mais le site est aussi celui d’un autre symbole.

Tout autour, et sous leurs pieds, s’étend sur plusieurs kilomètres le site hautement symbolique de Babi Yar, un charnier contenant les restes de 33.000 Juifs qui ont été massacrés par balles à cet endroit en 1941, alors que la ville était sous occupation nazie.

Le mémorial en leur mémoire, un parc aménagé situé à un kilomètre de la tour de la télévision, n’a pas été directement touché par les frappes.

Volodymyr Zelensky accuse Moscou de chercher à « effacer » l’Ukraine et son histoire

Au milieu des bouleaux, dans un silence ouaté par la neige, soudainement interrompu par le hurlement inquiétant d’une sirène antiraid aérien, les sculptures en mémoire des victimes, dont une immense Menorah, candélabre juif, sont bien intactes, a constaté une journaliste de l’AFP.

e site de la frappe aérienne d’hier qui a frappé la tour de télévision principale de Kiev à Kiev le 2 mars 2022. Photo de Dimitar DILKOFF / AFP via Getty Images.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, qui est lui-même juif, a néanmoins accusé mercredi Moscou de chercher à « effacer » l’Ukraine et son histoire, appelant les Juifs « à ne pas rester silencieux ». 

« Crime de guerre »

Pour le grand rabbin d’Ukraine, Moshe Asman, qui organise l’évacuation de la communauté juive locale de la ville de Kiev, la frappe russe contre des civils sur ce site relève du « crime de guerre ».

« Je n’arrive pas à croire ce que je vois », a réagi mardi soir auprès de l’AFP le grand rabbin, qui lors de la dernière cérémonie mémorielle organisée il y a un mois à Babi Yar avait averti : « une guerre est facile à commencer mais très difficile à terminer ».

 

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