Un bilan positif du télétravail pour les cadres, mais avec des bémols

Par Germain de Lupiac
2 avril 2025 06:29 Mis à jour: 3 avril 2025 19:04

Mis en place à grande échelle au printemps 2020 pour ralentir la progression du Covid-19 tout en permettant la continuité de l’activité, le télétravail est considéré aujourd’hui comme un acquis.

Le passage en distanciel est soudainement devenu possible pour des métiers qui ne l’avaient pas envisagé jusque-là, grâce aux nouveaux outils de l’information, comme les  logiciels de conférence en ligne et l’internet haut débit.

Le travail à distance a apporté également un confort aux salariés, leur économisant des temps de trajet et de sommeil. Autre avantage, il a permis d’étendre le recrutement à toute la France.

Selon une étude de l’Association pour l’emploi des cadres (Apec) parue le 24 mars, 82 % des cadres, dont les deux tiers sont en télétravail au moins un jour par semaine, seraient farouchement opposés à sa suppression.

Cependant des questions se posent sur un environnement de travail passé à communiquer via les outils numériques ou sur l’intégration des jeunes recrues cherchant à prendre leurs marques.

Le télétravail, majoritairement plébiscité 

Après avoir atteint des pics autour de 30 % durant la crise du Covid, la pratique du télétravail s’est ancrée dans les entreprises, selon une récente étude de l’Insee et de la Dares. Il ne concerne cependant pas tous les postes de travail, le télétravail concernant 63 % des cadres, 1 % des ouvriers et 10 % des employés, d’après la même source.

Plébiscité, le télétravail fait aussi peser des questions sur la séparation entre le travail et la vie privée, l’augmentation du temps passé devant les écrans et leur impact sur la santé mentale et physique.

La présidente de l’Association nationale des directeurs de ressources humaines (ANDRH), Audrey Richard, estime qu’il serait aussi intéressant d’aller regarder le lien entre le télétravail et la dégradation de la santé mentale des salariés.

« C’est davantage la surcharge d’informations, de mails qui arrivent, de notifications… » via Teams, WhatsApp, Zoom, etc…, dit-elle, observant que « le télétravail a amené à changer les outils, qu’on soit à la maison ou en entreprise », en s’éloignant des contacts directs avec des collaborateurs.

Cependant cinq ans après le Covid, il y a consensus sur le fait que deux jours par semaine est « le mieux, le plus approprié pour le collectif ».

Plus d’un salarié du privé sur cinq concerné, selon l’Insee

Au premier semestre 2024, 22 % des salariés du privé en France (hors Mayotte) ont ainsi été en télétravail au moins une fois dans les quatre semaines précédentes, indique une étude de l’Insee parue début mars.

L’organisation du travail est « essentiellement hybride », avec en moyenne 1,9 jour hebdomadaire de travail à distance. Près de sept salariés sur dix qui considèrent leur poste comme « télétravaillable » y recourent, indique également l’étude.

La fréquence du télétravail augmente avec la taille des entreprises : 18 % des salariés télétravaillent au moins une fois par mois dans les petites et moyennes entreprises (PME), 26 % dans celles de taille intermédiaire (ETI) et 34 % dans les grandes entreprises, qui comptent une forte proportion de cadres.

L’Insee rappelle qu’avant la crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19, le télétravail était peu répandu en France: « Seuls 4 % des salariés le pratiquaient de façon régulière en 2019 ».

Le télétravail serait bon pour la santé

Le plus souvent réservé aux cadres, le télétravail permet aux salariés d’améliorer leurs conditions de travail et leur santé, selon deux études publiées en novembre 2024.

Entre 2021 et 2023, la part des cadres chez les télétravailleurs est passée de 45 % à 61 %, tandis que celle des professions intermédiaires a perdu dix points, de 36 % à 26 %. Elle est de 12 % chez les employés et seulement de 1 % chez les ouvriers.

Quelque 2,2 millions de salariés sur des postes télétravaillables ne télétravaillent pas mais souhaitent le faire, selon l’étude, qui précise que ce vivier « est concentré au sein de métiers où la pratique du télétravail est le plus souvent bien établie », comme les secrétaires, les comptables ou les employés des banques et assurances.

Au total, un tiers (34 %) des salariés souhaite travailler à distance, dont la majorité entre deux et quatre jours par semaine, seuls 8 % voulant le faire à temps plein.

« Les télétravailleurs ont davantage d’autonomie et travaillent de manière moins intense lorsqu’ils sont à distance plutôt que sur site », relève par ailleurs une deuxième étude de la Dares, basée sur les réponses de plus de 38.000 personnes à une enquête.

Le lieu principal du télétravail est à 98 % le domicile, et dans seulement 2 % des cas dans un espace spécifique, par exemple de co-working, et 45 % des télétravailleurs ont une pièce consacrée au télétravail à la maison.

Plus de concentration mais moins de communication

Par rapport à l’exercice du métier au sein d’une équipe, le travail à distance diminue les interruptions des tâches et la pression ressentie, les revers de la médaille les plus souvent cités étant l’absence de discussions ou de soutien des collègues, ou encore le manque de moyens adaptés mis à disposition.

Au niveau de la santé, la situation a radicalement changé en quelques années. « Les télétravailleurs comptaient une plus forte proportion de salariés à l’état de santé altéré, en situation de handicap ou avec un risque dépressif élevé », rappelle l’étude de la Dares.

Mais en 2023 « les télétravailleurs sont globalement en meilleure santé que les autres salariés qui ne pratiquent pas le télétravail, même s’ils estiment que leurs fonctions le leur permettraient ».

D’après les déclarations des salariés, le travail à domicile permet « une meilleure articulation entre vie professionnelle et privée au sein des couples en télétravail, surtout pour les hommes » qui consacrent davantage le temps gagné dans les transports « aux loisirs et aux soins des enfants, tandis que les femmes le réservent plutôt au travail domestique ».

Un acquis pour un cadre sur deux, mais problématique pour les jeunes 

Le télétravail régulier est « désormais bien installé dans l’organisation du travail des cadres », selon une étude de l’Apec publiée le 11 mars, qui montre que près d’un cadre sur deux (45 %) démissionnerait si l’accès au télétravail leur était supprimé.

L’enquête de l’Association pour l’emploi des cadres rapporte qu’aucun « retour en arrière n’est envisageable pour les cadres » et souligne que 69 % seraient mécontents en cas de réduction du télétravail (82 % en cas de suppression).

Un cadre sur deux (51 %) considère même que le recours au télétravail n’est plus une option mais un acquis, rejoindre une entreprise sans accès au télétravail étant devenu rédhibitoire.

Cette pratique permet à sept cadres sur dix d’organiser leurs tâches en fonction du lieu de travail, favorisant le travail sur site pour les tâches collectives (61 %) et optant davantage pour le travail à domicile pour les tâches individuelles (51 %).

Les cadres identifient toutefois certains points de vigilance pour optimiser la pratique du travail hybride : ils pointent notamment une moindre intégration des nouveaux salariés dans l’équipe (48 %), un brouillage des frontières entre vie personnelle et professionnelle (40 %) ou encore la peur de rater des communications importantes (39 %).

Ces limites du télétravail sont ressenties en particulier par les cadres les plus jeunes, particulièrement concernés par les enjeux d’intégration et d’évolution professionnelle, selon l’étude. La volonté de pérenniser la pratique du télétravail n’est pour autant pas remise en cause et sept cadres sur dix jugent que le télétravail présente plus d’avantages que d’inconvénients.

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