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Un boxeur sud-africain dénonce la violence anti-blanc : « Des millions de personnes vivent dans la peur au quotidien »

août 20, 2023 22:20, Last Updated: août 20, 2023 22:20
By Billy Pan et Joshua Philipp

Le chant « Kill the Boer » (Tuez le Boer, en français) lancé par un homme politique de premier plan en Afrique du Sud est bel et bien un appel à tuer les fermiers blancs, a déclaré le boxeur professionnel sud-africain Chris van Heerden, qui a perdu son père lors de violences anti-blanches en 2018, et selon lui ils vivent en état de siège.

« Si nous, les Boers néerlandais, avions notre propre chanson similaire à celle-ci, je peux vous garantir qu’on nous tirerait dessus », a déclaré M. van Heerden dans une interview à l’émission « Crossroad » d’EpochTV.

Le 29 juillet, le président du parti de gauche radicale, les Combattants pour la liberté économique (EFF), Julius Malema, s’est exprimé devant une foule de 95.000 personnes et a scandé « Kill the Boer, kill the farmer » (tuez le Boer, tuez le fermier, en français) lors de la célébration du 10e anniversaire du parti dans un stade de Johannesburg.

Les Boers, également connus sous le nom d’Afrikaners, sont des Sud-Africains blancs dont les ancêtres remontent aux colons néerlandais qui se sont installés au Cap de Bonne-Espérance au XVIIe siècle.

Le New York Times a couvert l’incident à reculons, estimant que le chant ne devait pas être pris au pied de la lettre, et que ceux qui le font participent à relayer des informations erronées en provenance de l’extrême-droite.

« Des commentateurs de droite affirment qu’un vieux chant anti-apartheid est un appel à la violence anti-blanc, mais des historiens ainsi que l’homme politique de gauche qui l’a utilisé disent qu’il ne faut pas le prendre au pied de la lettre », indique un article du New York Times, qui accuse « des gens de droite … y compris l’ancien président Donald J. Trump » de prétendre « qu’il y a eu des massacres de masse » contre des fermiers blancs.

M. van Heerden, dont le père de 61 ans a été abattu devant caméra par un individu apparemment proche de l’EFF, rejette cette interprétation.

Non seulement les meurtres sont réels, a-t-il confié à l’animateur Joshua Philipp, mais les tueurs sont incités par la rhétorique génocidaire de « tuer le Boer ».

« Je vis en Amérique, mais j’ai toujours peur de recevoir un appel téléphonique me disant que j’ai perdu un autre membre de ma famille », a déclaré le boxeur.

« La vérité, c’est que c’est ce qui se passe en Afrique du Sud. Si vous suivez vraiment les informations sur ce qui se passe, vous verrez que les fermiers blancs sont assassinés par milliers », a-t-il poursuivi, notant que certains tueurs ont écrit le slogan « Kill the Boer » sur le mur des fermiers avec le sang de leurs victimes.

« Comment pouvez-vous dire que cela n’a rien à voir avec les chants de Julius Malema ? »

Chris van Heerden au Albert Hall à Manchester, en Angleterre, le 13 avril 2022. (Charlotte Tattersall/Getty Images)

Appel à la lutte contre l’apartheid ou discours de haine ?

Dans son article, le New York Times présente « Kill the Boer » sous l’angle de la lutte historique contre le régime de l’apartheid.

« [Le slogan] existe depuis des décennies », explique le journal à ses lecteurs. « C’est l’un des nombreux cris de guerre du mouvement anti-apartheid qui reste un trait caractéristique de la culture politique du pays. »

La chanson est certes ancienne, rétorque M. van Heerden, mais c’est l’EFF, dirigé par M. Malema, qui a poussé le message anti-blanc à l’extrême au cours des dix dernières années.

« L’EFF n’a que 10 ans. Ils viennent de fêter leur dixième anniversaire », a-t-il déclaré à M. Philipp. « Au cours des dix dernières années, lorsque Julius Malema a annoncé qu’il allait se lancer sérieusement dans la politique, il a commencé à chanter la chanson à un niveau beaucoup plus agressif. »

Le leader des Combattants pour la liberté économique (EFF), Julius Malema, fait un geste depuis la scène alors qu’il célèbre le 10e anniversaire du parti à Johannesburg, le 29 juillet 2023. (Guillem Sartorio/AFP via Getty Images)

Malema a été le leader de l’aile jeunesse du Congrès national africain (ANC) sous Nelson Mandela. Il s’en est séparé en 2013 après que le parti l’a suspendu pour avoir provoqué des divisions. Son nouveau parti, l’EFF, s’est depuis imposé comme un challenger majeur de l’ANC, le parti qui dirige le pays pendant près de 30 ans, depuis la fin de l’apartheid.

Ce n’est pas la première fois que Malema ou des membres de l’EFF scandent « Kill the Boer ». Quand il était président de la Ligue de la jeunesse de l’ANC, il chantait cette chanson lors des rassemblements.

En 2011, après que le groupe de défense des Blancs sud-africains AfriForum l’a poursuivi devant la Cour de l’égalité du pays, il a été reconnu coupable d’incitation à la haine.

Plus récemment, en 2020, lui et l’EFF ont de nouveau été poursuivis par AfriForum après que certains de leurs partisans eurent scandé la phrase à l’extérieur d’un tribunal, à la suite de la torture et du meurtre de Brendin Horner, un chef d’exploitation agricole blanc de 21 ans. Mais cette fois-ci, la Cour de l’égalité n’a pas jugé que le slogan « Kill the Boer » constituait un discours de haine.

Lors d’une conférence de presse tenue le 2 août au siège de l’EFF à Johannesburg, Malema s’en est pris à Elon Musk, propriétaire de X (anciennement Twitter) qui est né à Pretoria, après que celui-ci eut dénoncé le fait que l’homme politique « encourageait ouvertement le génocide des Blancs en Afrique du Sud ».

« Si Elon Musk veut en savoir plus sur la chanson, les enregistrements sont là, au tribunal », avait rétorqué Malema.

Une voix pour des millions de personnes vivant dans la peur

« Je suis rentré d’Afrique du Sud il y a deux semaines et j’ai côtoyé mes amis et ma famille. Ils vivent dans la peur », a expliqué M. van Heerden.

« Nous ne sommes pas assez nombreux. Nous ne pouvons pas nous défendre. C’est une bataille que nous ne gagnerons jamais, donc ce n’est même pas envisageable pour nous », a-t-il dit, ajoutant que quitter le pays n’est pas plus faisable, compte tenu de l’économie et de la difficulté d’obtenir des visas pour l’étranger.

« Ces personnes, y compris ma famille, vivent dans la peur. Ils vivent dans la peur au quotidien », a-t-il poursuivi. Des Boers sud-africains me contactent [sur les réseaux sociaux] en me disant : « S’il te plaît, Chris. Tu es en Amérique. Tu peux peut-être faire entendre notre voix ».

Le boxeur a ensuite précisé qu’il avait pardonné à l’assassin de son père et qu’il n’essayait pas de répandre la colère ou la haine. « Mais j’appelle à l’aide », a-t-il déclaré. « Je lance un appel pour que Julius Malema soit tenu responsable de ce qu’il incite à faire. »

« Ses partisans prennent [la chanson] au sérieux. Regardez-les. Ils disent : ‘Ouais, vous feriez mieux de partir parce que nous venons pour vous tous’. C’est ce qu’ils disent. »

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