Un monde sur mesure: le globe « made in France » fait sa renaissance

Par Epoch Times avec AFP
11 mars 2023 16:00 Mis à jour: 11 mars 2023 17:54

En ligne droite de la Renaissance : à Besançon, un atelier fabrique de A à Z des globes terrestres à partir de techniques héritées du XVIe siècle, pour le plus grand bonheur de clients qui peuvent se dessiner un monde à leur guise.

Cécile Blary, collègue d’Alain Sauter et globetière à la marque « Globe Sauter », fabrique une sphère en plâtre. (Photo SEBASTIEN BOZON/AFP via Getty Images)

Teintes pastel roses, jaunes ou bleutées… Les sphères d’Alain Sauter composent une douce symphonie de couleurs dans l’atelier de ce géographe de formation, fou de voyages et de cartographie, qui a pris sur lui de relancer la fabrication de globes « made in France » après la disparition de cet artisanat dans les années 1960. « Il n’y avait plus personne pour nous enseigner les gestes de la fabrication du début à la fin », raconte cet ancien enseignant chercheur en géographie à la Sorbonne, qui s’est lancé dans son projet fou en 2016. « Il a fallu retrouver les gestes, les matériaux, les techniques, faire des tests… »

Pas question de recourir à du plastique ou à des techniques industrielles. Comme à la Renaissance, on utilise donc du plâtre, appliqué sur un moule, afin de créer deux demi-sphères qui seront assemblées en une seule. Une course contre la montre, car le plâtre sèche en 15 minutes ! « L’été, ça ne marche pas, le plâtre sèche trop vite », remarque le fondateur de Globe Sauter et Cie. « Quand il fait trop froid ça ne marche pas non plus… ». Impératif : produire une sphère parfaitement lisse, sans quoi le monde ne sera pas tout à fait rond. « La moindre erreur est multipliée par pi », explique-t-il. « Un millimètre d’erreur sur notre moule se traduit par 3,14 mm d’erreur à l’équateur ».

Une fabrication précieuse et des gestes au millimètre

On trace sur ce globe vierge un méridien, l’équateur et les deux tropiques, autant de point de repère qui permettront d’apposer méticuleusement 12 bandes de papier sur lesquelles a été imprimé un fond de carte en noir et blanc. Ces fuseaux reliant les pôles doivent parfaitement s’aligner les uns aux autres, faute de quoi on risque la faille au milieu du Pacifique ou un tsunami cartographique dans l’océan Indien. « Je fais le tour du monde trois fois par jour », s’amuse Alain Sauter, 39 ans et une allure d’éternel étudiant.

Cécile Blary, globetière de la marque « Globe Sauter », peint un globe à l’aquarelle dans l’atelier de Besançon, le 2 mars 2023. (Photo SEBASTIEN BOZON/AFP via Getty Images)

« La difficulté, c’est de trouver les bons matériaux », observe-t-il. La structure principale du globe est faite en staff, un « plâtre armé », c’est-à-dire renforcé par des fibres végétales. La technique était déjà connue des Romains, assure l’artisan. Le papier, lui aussi, est hautement spécialisé : il doit conserver exactement ses dimensions d’origine malgré la colle, sans gonfler ni se déformer. Arrive l’étape reine de la fabrication : la peinture. Alain et sa collègue Cécile Blary, graphiste de formation, apposent délicatement leur aquarelle sur le papier, selon les teintes choisies par le commanditaire. Un travail minutieux à l’aide de deux pinceaux, l’un pour poser la couleur, l’autre pour absorber l’eau excédentaire. « Le plâtre n’a qu’une envie, c’est de boire de l’eau », explique-t-il.

Cerise sur la planète

Il est possible de se créer un monde à sa façon, en inscrivant par exemple le nom de son village natal. « On ajoute villes ou villages à la demande des clients, ou encore des monstres marins dans les océans, des îles imaginaires, des trajets autour du monde comme le Vendée Globe ou bien des sites comme les temples d’Angkor… », résume M. Sauter. On l’aura compris, face à la concurrence de la cartographie en ligne, les globes qui sortent de son atelier n’ont plus guère de fonction encyclopédique, mais plutôt une valeur poétique. « Ce sont des globes pour faire voyager », observe-t-il.

Son projet le plus fou, c’est d’avoir été choisi en 2020 par le château d’Amboise pour livrer un globe façon 1550, comme aurait pu en posséder François Ier à l’époque des grandes découvertes. « C’était comme si on travaillait pour François Ier, comme si nous étions les cosmographes du roi », frémit-il encore. À seulement deux personnes dans l’atelier, la manufacture ne produit qu’une centaine de globes par an, avec une dizaine d’heures de travail pour les petits modèles (21 cm de diamètre) et deux semaines pour les gros (80 cm). Le prix s’en ressent : de 350 à 9000 euros selon les tailles.

Pour ceux qui trouveraient la Terre trop petite, l’atelier fabrique aussi des globes lunaires et célestes.

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