Un rapport révèle le coût des investissements mondiaux de la Chine en matière de droits de l’homme

Par Rita Li
18 août 2021 20:19 Mis à jour: 19 août 2021 08:00

Un groupe de défense des droits de l’homme a recensé plus de 600 violations qui auraient été commises par des entreprises chinoises à l’étranger entre 2013 et 2020.

Un rapport (pdf) du Business and Human Rights Resource Centre (BHRRC, Centre de ressources des entreprises et des droits de l’homme) répertorie 679 allégations relatives à des entreprises chinoises d’outre-mer par secteur, région et problème.

Le rapport du 11 août intitulé Going Out Responsibly : The Human Rights Impact of China’s Global Investments (Devenir responsable : l’impact sur les droits de l’homme des investissements mondiaux chinois), énumère les conséquences là où les des droits de l’homme ne sont pas respectés, comme, entre autres, le vol des terres, la dégradation de l’environnement avec les risques qui en découlent ou l’effondrement des moyens de subsistance.

Il fait également état des abus rapportés, comme l’indemnisation insuffisante des autochtones, les sous-salaires, les mauvais traitements infligés aux travailleurs ou les dangereuses conditions de travail.

« À mesure que les entreprises chinoises – en particulier celles des secteurs de l’énergie, de la construction, des mines et des métaux – continuent de s’aventurer à l’étranger, la société civile et les médias voient une augmentation regrettable des violations des droits sociaux, environnementaux et humains, notamment en Asie, en Afrique et en Amérique latine. »

C’est dans les pays où le « gouvernement est plus faible » ou qui dépendent des investissements chinois que les taux d’abus rapportés sont les plus élevés, constate le BHRRC.

La Birmanie (Myanmar) détient le plus grand nombre d’allégations d’abus, près de 100, viennent ensuite le Pérou (60), l’Équateur (39), le Laos (39), le Cambodge (34) et l’Indonésie (25).

En mai, le régime militaire birman a approuvé une quinzaine de projets chinois, dont une centrale électrique de 2,5 milliards de dollars soutenue par des entreprises chinoises.

Alors que les autres investisseurs se tiennent à l’écart de ce pays en proie à des troubles civils depuis le coup d’État du 1er février, « il est possible que d’autres projets gérés par des entreprises chinoises soient approuvés par la junte militaire à l’avenir », peut-on lire dans le rapport.

Les données montrent également que les violations des droits de l’homme sont particulièrement élevées dans les industries métallurgiques et minières, qui représentent à elles seules un tiers des plaintes, suivies par les industries de la construction et de l’énergie fossile.

Un villageois se tient là où se trouvait sa maison avant qu’elle ne soit rasée pour faire place au barrage Sesan Two à Stung Treng, au Cambodge, le 7 mai 2015. (Jason South/Fairfax Media/Getty Images)

 

D’autres groupes de défense – tels que Human Rights Watch (HRW) – ont exprimé des préoccupations similaires.

Au début du mois, HRW a signalé qu’une coentreprise dirigée par la Chine a rasé au bulldozer des maisons ancestrales dans le nord-est du Cambodge pour faire place à un barrage dans le cadre de l’Initiative ceinture et route (ICR ou Nouvelle route de la soie), et ce malgré une grande opposition. Selon une déclaration du 10 août du groupe de défense, environ 5 000 villageois ont été déplacés de force sans recevoir de compensation équitable.

HRW a précisé que les autorités ont demandé aux habitants de se réinstaller plus haut, en leurs disant : « Sinon, nous ne prenons aucune responsabilité pour les morts. »

Les réponses à l’enquête

Pendant les huit années que couvre le rapport, le BHRRC a interrogé plus d’une centaine d’entreprises. Plus de 50 % des entreprises asiatiques ont accepté de répondre mais les entreprises chinoises ne l’ont fait qu’à 24 %.

Le rapport indique une réticence de la part des entreprises chinoises à communiquer en anglais ou dans les langues locales, et les enquêteurs ont généralement reçus des réponses intégralement rédigée en chinois.

« [Cela pourrait affecter] les communautés et la société civile des pays d’accueil qui souhaitent s’engager avec les entreprises chinoises », ont ajouté les enquêteurs.

La moitié des retours évitaient également de répondre directement aux questions, et les entreprises se contentaient « souvent » de rappeler les lois locales, leur permettant de détourner les normes internationales.

« Cela peut poser des problèmes », souligne le rapport, expliquant que certaines réglementations locales sont faiblement rédigées ou appliquées.

Des Cambodgiens attendent sur des motos pendant que deux ouvriers chinois travaillent sur un site de construction à Sihanoukville, au Cambodge, le 13 décembre 2018. (Tang Chhin Sothy/AFP via Getty Images)

La politique d’extension

Pékin a lancé une « politique d’extension » en 1999 pour promouvoir les investissements chinois à l’étranger et le BHRRC affirme que depuis lors « l’empreinte des entreprises chinoises s’est considérablement étendue ».

Cette politique a été renforcée par le dirigeant actuel Xi Jinping en 2013 avec l’Initiative ceinture et route, un projet pour lequel plusieurs milliards de dollars ont été investis. Il s’agit de relier la Chine à l’Asie, l’Europe et au-delà, via un réseau de ports, de chemins de fer et de routes.

Les contestataires estiment que l’objectif de la Chine avec l’ICR est de mettre à profit sa surcapacité industrielle et ouvrière tout en concrétisant des ambitions géopolitiques.

Au 30 janvier 2021, selon la Chine, 205 accords de coopération liés aux projets (chemins de fer, ports et autoroutes) de l’ICR ont été signés avec 140 pays et 31 organisations internationales.

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