Un « simulacre de procès » : le journaliste américain Evan Gershkovich jugé pour espionnage en Russie

Par Epoch Times avec AFP
26 juin 2024 18:35 Mis à jour: 26 juin 2024 18:36

La première audience dans le procès à huis clos du journaliste américain Evan Gershkovich, détenu en Russie depuis 15 mois pour des accusations d’espionnage qu’il rejette, s’est déroulée mercredi dans un tribunal d’Ekaterinbourg, dans l’Oural.

Les autorités russes n’ont jamais étayé leurs accusations contre ce correspondant du Wall Street Journal et ont gardé secret le contenu du dossier. Washington a dénoncé un « simulacre » de procès.

M. Gershkovich, 32 ans, a été interpellé en mars 2023 en plein reportage à Ekaterinbourg par les services de sécurité russes (FSB), devenant le premier journaliste occidental depuis l’époque soviétique à être accusé d’espionnage en Russie.

Le reporter est apparu mercredi dans un box vitré du tribunal régional de Sverdlovsk, le crâne rasé, souriant aux journalistes qu’il reconnaissait et leur adressant un « salut » à peine audible, selon une équipe de l’AFP.

Après cette première comparution, une porte-parole du tribunal, Irina Tochtcheva, a précisé que la prochaine audience aurait lieu le 13 août et que la presse ne serait pas autorisée à filmer à nouveau le journaliste avant l’énoncé du verdict, à une date encore indéterminée.

Contacté par l’AFP, le service de presse du service fédéral des prisons (FSIN) a refusé de dire où M. Gershkovich – jusqu’alors en détention provisoire à Moscou, à 1400 km d’Ekaterinbourg – serait détenu d’ici à cette nouvelle audience. Seuls son avocat ou ses proches « peuvent fournir cette information ».

Il a aussi affirmé ne pas savoir pourquoi M. Gershkovich avait désormais le crâne rasé, s’il s’agissait de la coupe réglementaire des prisonniers ou d’une décision personnelle.

« Aucune preuve corroborant les accusations »

La Maison Blanche a dénoncé un « simulacre de procès », répétant que M. Gershkovich n’avait « jamais travaillé pour le gouvernement » américain, n’était « pas un espion » et « n’aurait jamais dû être arrêté ».

Le porte-parole du Conseil de sécurité nationale John Kirby a indiqué que Washington « continue à faire tout son possible » pour libérer le journaliste.

L’ambassade des États-Unis à Moscou a affirmé que ses représentants avaient pu assister mercredi à une courte partie de l’audience.

« Pendant ce laps de temps, les autorités russes n’ont présenté aucune preuve corroborant les accusations », a-t-elle dénoncé, réaffirmant que le journaliste était utilisé comme « monnaie d’échange » par la Russie « pour atteindre des objectifs politiques ».

Les enquêteurs assurent que M. Gershkovich, qui a aussi travaillé pour l’AFP à Moscou en 2020-2021, a collecté des informations sensibles pour la CIA sur l’un des principaux fabricants russes d’armements, l’entreprise Ouralvagonzavod. Ouralvagonzavod produit notamment des chars T-90 utilisés en Ukraine et ceux de nouvelle génération Armata, ainsi que des wagons de marchandises.

Échanger le journaliste contre des Russes détenus par les Occidentaux

M. Gershkovich, son employeur et ses proches rejettent fermement ces accusations, tout comme Washington, estimant que Moscou a fabriqué l’affaire afin d’échanger le journaliste contre des Russes détenus par les Occidentaux.

Le Wall Street Journal a écrit mercredi que le reporter, arrêté selon lui pour avoir « simplement fait son travail » et qui encourt jusqu’à 20 ans de prison, faisait face à « des accusations montées de toutes pièces » et à « un simulacre de procès ».

« Evan est un journaliste et le journalisme n’est pas un crime », a quant à elle martelé la famille de M. Gershkovich dans un communiqué diffusé le même jour.

Ce dernier a passé sa détention provisoire dans la prison moscovite de Lefortovo, administrée par le FSB, mais est jugé à Ekaterinbourg, où il a été arrêté.

Le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, a, pour sa part, une nouvelle fois refusé, mercredi, de s’exprimer sur un éventuel échange de prisonniers. Un haut responsable diplomatique russe, Sergueï Riabkov, avait affirmé la semaine dernière que Moscou avait fait une proposition à Washington en vue d’un tel échange, sans révéler le contenu de cette offre.

Mercredi, M. Riabkov, cité par l’agence de presse Interfax, a appelé les États-Unis à étudier « sérieusement » les « signaux » envoyés par Moscou à ce sujet.

Le Président russe Vladimir Poutine a déjà reconnu que des négociations étaient en cours et sous-entendu qu’il exigeait la libération de Vadim Krassikov, condamné à la prison à vie en Allemagne pour avoir assassiné à Berlin en 2019, pour le compte de la Russie, un ex-commandant séparatiste tchétchène.

La Russie détient plusieurs autres Américains, dont la journaliste russo-américaine Alsu Kurmasheva, arrêtée en 2023 pour une infraction à la loi sur les « agents de l’étranger », et l’ex-marine Paul Whelan, qui purge une peine de 16 ans de prison pour espionnage, une accusation qu’il conteste.

M. Gershkovich travaillait en Russie depuis 2017 pour plusieurs médias. Il avait dit en 2023, dans une lettre à son journal, « ne pas perdre espoir ».

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