Une centaine de médecins ont appelé mercredi à un « arrêt immédiat » du « fichage » par les autorités sanitaires des personnes blessées lors des mouvements sociaux, pointant une « dérive inacceptable » dans l’extension de cette pratique à des « gilets jaunes » lors de certaines manifestations.
Depuis le début du mouvement des « gilets jaunes » il y a cinq mois, le fichier « SI-VIC » – système d’information pour le suivi des victimes, mis en place après les attentats de 2015 -, est « détourné par l’administration hospitalière et les agences régionales de santé (ARS) », notamment à Paris et en Île-de-France, accusent les signataires de cette tribune publiée sur le site web de L’Express.
« L’existence même d’un fichier parallèle renseigné après sélection de nos patients pour n’y entrer que les ‘gilets jaunes’ est parfaitement anti déontologique », s’alarment ces médecins, d’autant que les patients concernés ne reçoivent aucune information sur ce fichier et que leur consentement n’est pas recueilli.
« Nous sommes face à l’institutionnalisation d’une dérive inacceptable : le fichage de patients à des fins possibles d’exploitations politiques ou judiciaires. Cette dérive constitue une faute pénalement répréhensible », fustigent encore les signataires qui entendent répondre à des « demandes illégales » par un « devoir de désobéissance éthique ».
Ils demandent « l’ouverture d’une enquête parlementaire pour faire toute la lumière sur l’utilisation dévoyée du logiciel SI-VIC ».
Parmi les médecins signataires figurent le cofondateur de Médecins du monde Jacques Bérès, celui de Médecin sans frontières Xavier Emmanuelli, l’ancien ministre et député Bernard Debré (LR), l’urgentiste Patrick Pelloux, le pionnier des greffes du visage Laurent Lantieri, ou encore le chirurgien Philippe Denormandie, père du ministre du Logement Julien Denormandie.
L’utilisation du fichier SI-VIC pour les « gilets jaunes », révélée mi-avril par le Canard Enchaîné, avait conduit l’un des manifestants concernés, blessé à Paris lors de l’« acte 13 » du mouvement (le 9 février), à annoncer une plainte pour fichage « illicite ».
L’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP) avait rejeté ces accusations avant de reconnaître que le fichier nominatif SI-VIC avait parfois inclus « de manière inappropriée » des précisions de nature médicale – comme le fait que telle ou telle victime a été blessée par un tir de LBD ou un coup de matraque -, une pratique qu’elle avait dit vouloir « corriger ».
D. S avec AFP
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