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USA : l’Aléna divise les agriculteurs

novembre 17, 2017 8:23, Last Updated: novembre 17, 2017 13:30
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En pleine renégociation de l’accord de libre-échange nord-américain Aléna, les maraîchers de Floride sont loin d’avoir les mêmes intérêts que les producteurs de céréales de l’Iowa, et chacun tente de faire entendre sa voix.

Depuis l’entrée en vigueur de cet accord entre les États-Unis, le Canada et le Mexique en 1994, les exportations de denrées alimentaires produites aux États-Unis vers le Canada et le Mexique ont bondi, passant de 8,7 milliards de dollars en 1992 à 39 milliards de dollars en 2017.

L’abaissement des barrières douanières a permis aux producteurs de maïs d’écouler plus facilement leurs récoltes toujours plus abondantes grâce à de nouvelles techniques.

« On a mis des années à développer des marchés, aussi bien aux États-Unis qu’à l’étranger », remarque Mark Recker, président de l’Association des producteurs de maïs de l’Iowa. « Si on se retire de l’Aléna, les taxes douanières vont soudainement augmenter et nous ne serons plus compétitifs. Le Mexique est déjà en train de chercher d’autres sources d’approvisionnement », prévient-il.

Mais les importations américaines de produits agricoles mexicains et canadiens se sont aussi envolées, passant de 6,5 milliards de dollars en 1992 à 44,5 milliards de dollars en 2016.

Myrtilles et brocolis en Georgie, pastèques au Texas, raisins et asperges en Californie, fraises, poivrons, tomates, courges et aubergines en Floride: la production de tous ces produits « s’est repliée en superficie et en valeur depuis l’entrée en vigueur de l’Aléna », assure Lisa Lochridge de l’Association des fruits et légumes de Floride.

Et le déclin s’est renforcé au cours des dix dernières années « après l’attribution par le gouvernement mexicain de subventions pour la production de fruits et légumes destinés au marché américain », ajoute-t-elle.

Les maraîchers du sud-est des États-Unis plaident en faveur d’une clause leur permettant plus facilement de lancer des poursuites contre les subventions ou le dumping.

« Si on commence à choisir des petites sous-sections de chaque industrie pour des règles et standards différents, alors on s’expose à des mesures de rétorsion de la part de nos partenaires de l’Aléna », rétorque Paul Mastronardi, patron de l’entreprise Sunset Grown.

Avec d’autres grands distributeurs de légumes et fruits basés plus à l’ouest du pays ou au Canada, ils ont récemment formés « La coalition des maraîchers pour l’Aléna ».

Les dissensions touchent d’autres secteurs.

Hope Pjesky élève du bétail en Oklahoma. Au moment où les prix des matières premières agricoles sont particulièrement bas, « les agriculteurs américains ne peuvent pas se permettre de perdre des clients », assène-t-elle.

Si la langue de bœuf ne fait plus recette aux États-Unis, elle est très appréciée au Mexique, donne en exemple l’agricultrice. « L’exportation de tous ces morceaux délaissés par les Américains ajoute à chaque animal une valeur de 250 à 300 dollars », avance-t-elle.

Mais pour R-Calf USA, qui se présente comme la plus grande fédération uniquement composée d’éleveurs de bétail dans le pays, l’Aléna est surtout préjudiciable aux ranchers américains.

« Les importations accrues de bœuf venant du Canada et du Mexique sans que l’origine soit spécifiée font baisser les prix aux États-Unis », assure-t-elle. L’organisation milite entre autres pour l’étiquetage obligatoire de l’origine des produits.

Les principales organisations agricoles du pays ne sont pas non plus sur la même longueur d’ondes.

Ainsi la position de la plus grande d’entre elle, l’American Farm Bureau Federation, est claire: « toute renégociation doit protéger les gains acquis pour le commerce agricole et veiller à éliminer toute barrière restante aux échanges avec le Canada et le Mexique ».

L’organisation National Farmers Union, qui dit représenter 200.000 agriculteurs, est elle en faveur d’une renégociation permettant de « restaurer la souveraineté des États-Unis sur ses politiques agricoles et alimentaires ».

Pour Juliette Majot, directrice de l’ONG Institute for Agriculture and Trade Policy (IATP), ces positionnements correspondent à des visions différentes de l’agriculture.

Les défenseurs de l’Aléna sont les promoteurs d’un système où « la seule façon pour un agriculteur de garder la tête hors de l’eau est d’acheter toujours plus de terre et de pratiquer une agriculture intensive », affirme-t-elle.

Résultat selon l’IATP: de 1992 à 2012, les États-Unis ont perdu 22% de leurs petites exploitations, le nombre de celles gagnant plus d’un million de dollars par an ont elles doublé.

R.B avec AFP

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