L’État était à la manœuvre lundi sur le site de Sanofi qui produit le Doliprane à Lisieux (Calvados) pour entendre les préoccupations des salariés et des syndicats face à l’arrivée pressentie d’un repreneur américain.
Le groupe pharmaceutique français a annoncé en fin de semaine dernière avoir choisi le fonds d’investissement américain CD&R pour lui céder potentiellement le contrôle de son entité de santé grand public, Opella, qui commercialise le médicament Doliprane.
Depuis, les syndicats et une grande partie de la classe politique s’inquiètent des conséquences d’une telle vente pour la souveraineté sanitaire et les 250 emplois du site normand.
Le ministre délégué à l’Industrie Marc Ferracci et le ministre de l’Économie Antoine Armand ont fait lundi le déplacement pour visiter l’usine et échanger avec le personnel.
L’avenir du Doliprane a mobilisé aussi le maire de Lisieux et plusieurs parlementaires, soit une trentaine de personnes, dont des syndicalistes.
L’option d’un repreneur américain est perçue « un peu comme une trahison envers la France et envers tous les salariés », a affirmé Johann Nicolas délégué syndical CGT Lisieux. « Notre première requête, c’est restons Sanofi ! », a-t-il lancé, interrogé par l’AFP. « Si le gouvernement ne met pas les mains là-dedans, je ne sais pas comment on va s’en sortir », estime-t-il.
En marge d’un déplacement au Mondial de l’auto à Paris, le président Emmanuel Macron a affirmé que le gouvernement avait « les instruments pour garantir que la France soit protégée » dans la perspective d’un changement au capital d’Opella.
« Des discussions » en vue d’un accord
Antoine Armand a dit avoir « entamé des discussions » avec les parties prenantes en vue d’un accord spécifique sur des « engagements extrêmement précis », qui seront « assortis de garanties » et « de sanctions ». Il a évoqué aussi « la possibilité d’un actionnariat public et d’une participation à la gouvernance dans le cadre de cet accord ».
Parmi les obligations exigées, Marc Ferracci cite « le maintien de l’empreinte industrielle et de l’emploi industriel » sur les sites français de production de Lisieux et Compiègne (Oise). Il est également question, selon lui, d’« engagements sur les volumes de production » et « sur la recherche et le développement » ainsi que la préservation de « l’écosystème des sous-traitants ».
« On rejoint totalement les prises de position des politiques qui parlent de souveraineté sanitaire », a indiqué à l’AFP, Humberto de Sousa, syndicaliste CFDT qui attend désormais que « ces engagements se traduisent par des actes ». Mais « on ne sait pas si les engagements tiendront si le conseil d’administration bascule côté américain », se méfie-t-il, se montrant inquiet pour les emplois face à « la recherche de rentabilité de ce fonds » repreneur.
Les syndicats ont prévu jeudi entre 13h00 et 15h00 un rassemblement sur le site de l’usine de Compiègne avec la venue de personnalités politiques, dont François Ruffin et Xavier Bertrand, selon le délégué syndical central d’Opella pour la CFDT, Adil Bensetra.
La vigilance reste de mise car l’approvisionnement en paracétamol a récemment connu des périodes de tensions. Sanofi a maintes fois tenu à dissiper les doutes en martelant que ce projet de scission permettrait « la création d’un nouveau champion mondial, le seul basé en France, dans le secteur de la santé grand public ».
« Nous gardons 50% du capital »
Opella emploie 1700 salariés en France. Le Doliprane est sa deuxième marque en termes de revenus, la France ne représente qu’environ 10% des ventes de cette entité qui a réalisé 5,2 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2023.
Il s’agit d’« un projet de croissance qui laissera sa place entière à Doliprane, tant dans nos pharmacies que dans nos usines », a répété à Lisieux, le président du conseil d’administration de Sanofi, Frédéric Oudéa. « Nous ne serons pas dans une logique de myopie. Nous allons regarder loin et nous protégeons le site de Lisieux comme le site de Compiègne », a-t-il assuré. « Sanofi souhaite être associé à ce projet, puisque nous gardons 50% du capital. Ce n’est pas une vente sèche », a-t-il ajouté.
Dans la bataille pour le Doliprane, le fonds CD&R était en concurrence avec une offre menée par le fonds d’investissement français PAI Partners adossé à des investisseurs internationaux.
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