Soupçonnés d’avoir dissimulé plus de 13 millions d’euros d’avoirs au fisc, en particulier deux luxueuses villas au Maroc et dans les Caraïbes, les édiles de Levallois-Perret Patrick et Isabelle Balkany sont jugés à partir de lundi à Paris, notamment pour fraude fiscale et blanchiment.
Le tonitruant maire LR de cette riche commune de l’ouest parisien et son épouse, première adjointe, doivent comparaître pendant six semaines devant le tribunal correctionnel.
Une incertitude plane toutefois sur la présence à l’audience d’Isabelle Balkany, hospitalisée le 1er mai après avoir absorbé des médicaments et dénoncé sur Facebook une « instruction exclusivement à charge ».
« Je ne peux pas dire si elle sera là tout à l’heure. Elle va très mal », a déclaré à l’AFP son avocat Pierre-Olivier Sur, trois heures avant le début du procès.
Les juges d’instruction avaient débuté leur enquête en 2013 après des révélations de Didier Schuller, un ancien allié du couple.
Ils accusent aujourd’hui les Balkany de « blanchiment à grande échelle » entre 2007 et 2014 : d’avoir dissimulé au fisc des revenus et un patrimoine « occultes » à hauteur « au minimum » de 13 millions d’euros, en particulier deux propriétés cachées derrière d’exotiques montages financiers.
La première, la villa Pamplemousse, acquise en 1997 par une société constituée au Liechtenstein par une fiduciaire suisse, est sise à Saint-Martin, aux Antilles.
Isabelle Balkany, 71 ans, a fini par reconnaître qu’elle en était propriétaire, expliquant l’avoir achetée avec l’argent d’un héritage. Son époux, 70 ans, en est officiellement bénéficiaire depuis 2004.
La seconde propriété, la villa Dar Gyucy de Marrakech, est détenue depuis 2010 par une SCI marocaine propriété d’une société panaméenne, Hayridge. Cette dernière est au nom de Jean-Pierre Aubry, l’homme de confiance de Patrick Balkany à Levallois. M. Aubry et l’avocat Arnaud Claude devront répondre de leur « rôle central » dans le montage financer autour du riad.
Les Balkany, habitués des lieux, ont constamment nié en être propriétaires. Mais les juges sont formels: ils sont les « seuls bénéficiaires » du riad, où des peignoirs brodés aux initiales « PB » ont été retrouvés. Leur fils Alexandre comparaîtra pour avoir souscrit deux baux de location fictifs, permettant à ses parents d’affirmer qu’ils ne possédaient pas la villa.
Les enquêteurs ont fini par établir que le prix de vente officiel du riad, 2,75 millions d’euros, avait été payé par l’homme d’affaires saoudien Mohamed Al Jaber au moment où celui-ci négociait un super-projet immobilier à Levallois. Le promoteur sera jugé pour la « corruption active » du maire.
Par ailleurs, 2,5 millions d’euros de « dessous de table » ont été réglés via le compte singapourien d’une autre société panaméenne. Cet argent provient selon les enquêteurs d’une commission versée à Patrick Balkany par un industriel belge, George Forrest, contre son aide pour un contrat minier en Namibie. Ce que réfute M. Balkany.
Les investigations sont remontées bien au-delà de la période 2007-2014 qu’elles ciblent, sans pouvoir retracer l’origine de tous les fonds.
Les juges estiment que Patrick Balkany a été « à la tête d’un véritable réseau de sociétés offshore » mis en place dès la fin des années 1980, quand son ancien compère Didier Schuller déposait en Suisse des fonds occultes du BTP destinés à financer le RPR.
En 2016, le baron de la droite avait fini par admettre avoir détenu des avoirs non-déclarés en Suisse, un héritage selon lui.
L’enquête a aussi mis au jour les fortes sommes en liquide utilisées par le couple, notamment plus de 87.000 euros payés dans une agence de voyages.
La justice a saisi le riad, le produit de la vente de la villa Pamplemousse et le moulin de Giverny, où résident les Balkany en Normandie.
L’État, le fisc et les associations anticorruption Sherpa et Anticor occuperont les bancs des parties civiles.
Avec AFP
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