«Vingt-quatre heures sur le même brancard, sans rien manger»: la lettre ouverte de Madeleine Riffaud, ex-résistante

Par Emmanuelle Bourdy
21 septembre 2022 12:41 Mis à jour: 21 septembre 2022 12:41

L’ancienne résistante de la Seconde Guerre mondiale et journaliste, Madeleine Riffaud, âgée de 98 ans, dénonce dans une lettre ouverte publiée le 19 septembre dernier dans la revue Commune, la situation catastrophique du secteur de la santé. À l’hôpital parisien Lariboisière, elle a dû patienter sur un brancard durant 24 heures, sans aucune prise en charge.

Si Madeleine Riffaud dénonce les conditions déplorables du secteur de la santé dans une longue lettre ouverte adressée à Nicolas Revel, directeur de l’AP-HP (Assistance Publique-Hôpitaux de Paris), c’est notamment parce qu’elle y a vécu une expérience traumatisante. Désireuse d’agir à son niveau, elle veut profiter de cette malheureuse expérience, de sa notoriété et de ses relations pour alerter les pouvoirs publics.

« Mais personne n’arrivait. Jamais »

Le cauchemar de la nonagénaire a débuté le dimanche 4 septembre 2022, date à laquelle elle s’est rendue aux urgences de l’hôpital parisien « pour un examen important dû à un Covid long », explique-t-elle. Mais plutôt que d’être prise en charge, elle s’est retrouvée « couchée au milieu de malades qui hurlaient de douleur, de rage, d’abandon », soulève-t-elle. « Et les infirmières couraient là-dedans, débordées… Elles distribuaient des « J’arrive ! » et des « ça marche ! » « J’arrive, j’arrive ! ». Mais personne n’arrivait. Jamais », poursuit l’ancienne résistante dans sa lettre.

Indiquant sa cécité, Madeleine Riffaud décrit un « no man’s land » où elle n’a obtenu qu’un demi verre d’eau tiède après douze heures. Ne remettant pas en cause le personnel, qui est à bout et fait selon le peu de moyens dont il dispose, elle pointe du doigt les différents gouvernements, « qui se suivent et qui, au mieux, ne bougent pas », déclare-t-elle.

Au final, la nonagénaire est restée « vingt-quatre heures sur le même brancard, sans rien manger », ballotée d’un endroit à l’autre sans savoir où elle se trouvait et « sans aucune affaire, sans moyen de communication avec [ses] proches ».

« J’ai encore un peu de force, c’est pour la donner ! »

Reconnaissant que sa « mésaventure » est belle et bien « une histoire quotidienne dans l’hôpital en France », et que son sort « est celui de millions de Parisiens et de Français », pour autant, elle soulève n’avoir « jamais demandé de passe-droit de toute [sa] vie ». « Mon âge n’y change rien », pointe-t-elle encore, mentionnant même qu’il représente « une circonstance aggravante ». « On pensait que j’étais trop vieille pour que ça vaille la peine de me soigner (réflexe pris lors de l’épidémie de covid ?) » s’interroge-t-elle à ce propos, ajoutant que « si la pandémie de 2020 a changé quelque chose, c’est en mal : le personnel est épuisé. L’État les a tous abandonnés, soignants comme malades ».

Madeleine Riffaud, qui avait notamment réalisé une enquête en 1974 dans un hôpital parisien, constate que « les problèmes sont toujours les mêmes : manque de personnel qualifié, manque de crédit, l’écart se creuse entre la technique de la médecine de pointe et les moyens mis à sa disposition ». Cette année-là, elle avait d’ailleurs publié un livre intitulé Les Linges de la nuit. Celui-ci a d’ailleurs été réédité chez Michel Laffont en 2021.

La journaliste compte utiliser sa voix pour « continuer à [se] bagarrer, comme d’habitude », et pouvoir ainsi parler au nom de ceux qui n’en ont pas. « J’ai encore un peu de force, c’est pour la donner ! » conclut-elle.

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