Les profondeurs du cosmos ne sont plus insondables. Grâce aux dernières générations de satellites tels que Planck et Herschel, tous deux projets européens, les scientifiques sont aujourd’hui en mesure de dévoiler certains de ses mystères.
C’est le cas notamment des galaxies lointaines. Ainsi, l’équipe française qui pilote le travail de recueil et d’analyse des données de l’observatoire spatial Planck a découvert plus de 2 000 sources énigmatiques sur tout le ciel. Ce sont des zones où l’on a repéré des fortes concentrations de galaxies lointaines. Ces structures mystérieuses sont des sortes de cocons pour étoiles où le taux de formation des astres est extraordinairement élevé. Ces galaxies lointaines et très actives en formation stellaire peuvent aider les scientifiques à répondre à une problématique centrale en cosmologie : comment se forment les grandes structures dans l’Univers ?
Un peu de cosmologie, un soupçon d’astrophysique
Revenons aux origines, juste après cet évènement que les cosmologistes appellent le Big Bang, phase primordiale durant laquelle l’Univers était un plasma bouillonnant de matière chaude et de photons. Environ 400 000 ans après cet évènement, intervient une transition permettant aux atomes légers de se former et à la lumière de se libérer sous forme d’un rayonnement homogène, baptisé par les scientifiques le fond cosmologique.
Grâce au satellite Planck, il est possible d’observer ce rayonnement qui nous renseigne avec précision sur les premiers instants de l’Univers. Il nous permet par exemple de mesurer son âge de 13,8 milliards d’années avec une incertitude de l’ordre du pour cent. On a pu aussi mesurer la température de ce fond cosmologique : elle est de l’ordre de 2,7K (2,7 Kelvin est l’équivalent de moins 270 degrés Celsius). Enfin, les données de Planck nous indiquent que, dans son jeune âge, l’univers était très homogène.
C’est radicalement différent aujourd’hui : l’hétérogénéité est la règle avec la présence de galaxies (et en leur sein des étoiles, du gaz, de la poussière) et d’amas de galaxies (fortes concentrations de galaxies). Entre elles, quasiment du vide. Se pose donc la question de savoir comment ces structures hétérogènes se sont formées sous l’action de la gravitation. Les observations de Planck indiquent qu’il y avait, dans cette période clé de 400 000 ans après le Big Bang, des inhomogénéités extrêmement faibles. Ce sont elles qui constituent les prémices de ce que deviendront les grandes structures observées.
De quoi sont faites ces inhomogénéités ? Ce sont de petites surdensités de matière qui ont crû par un processus d’effondrement de la matière sur elle-même, par l’effet de la force gravitationnelle et malgré le phénomène d’expansion de l’univers. Ces « graines » se sont regroupées en de grandes concentrations appelées halos. Plus tard, elles deviendront les structures de l’Univers – amas de galaxies et galaxies.
Les halos sont essentiellement composés d’une substance mystérieuse : la matière noire. Sa force d’attraction aspire attire la matière dite ordinaire, (c’est-à-dire les atomes), qui se condense et se refroidit pour former des étoiles. Les halos et galaxies, relativement petits au début, fusionnent puis forment des systèmes de plus en plus massifs avec le temps. C’est, globalement, ce à quoi ressemble l’univers tel qu’il est décrit par la plupart des modèles de formation des structures en cosmologie. Ce schéma dit de formation hiérarchique n’a pas été remis en cause à ce jour par les observations des télescopes les plus perçants.
Vous avez dit galaxies ?
Ainsi, observer des galaxies ou les amas de galaxies, proches ou lointains, est un moyen de valider ou de remettre en cause les modèles d’univers, ou plus particulièrement les modèles de formation des structures.
Mais le cosmos est loin d’avoir dévoilé tous ses mystères. De nombreuses inconnues demeurent, avec en premier lieu l’existence et la nature de la matière noire. Encore hypothétique puisqu’il n’y pas eu d’observations directes, cette étrange matière noire a un avantage majeur : postuler qu’elle est là son existence permet de garder cohérent notre modèle d’univers. Mais existe-t-elle vraiment et sous quelle forme ? L’avenir nous le dira. Nous, astrophysiciens, considérons cependant sa présence comme acquise en raison du grand nombre d’observations astrophysiques qui la suggèrent. Par exemple celles de Planck confirment l’accord entre les mesures et le modèle cosmologique à un niveau encore jamais atteint.
Autres interrogations, celles portant sur les relations tumultueuses entre matière noire et matière ordinaire. On sait qu’il y a environ 5 fois plus de matière noire que de matière ordinaire dans l’univers et que les deux s’attirent mutuellement via la gravitation. C’est ici qu’entrent en scène les galaxies.
Comment les définir ? Une galaxie est un ensemble de matière noire et de matière ordinaire liées ensemble par la gravité, principalement sous forme d’étoiles, mais pas exclusivement puisqu’on trouve aussi du gaz et de la poussière interstellaire (des molécules plus ou moins complexes). Généralement, elles sont d’une masse totale de 1011 masses solaires et d’une taille de 100 000 années-lumière. Une galaxie peut être de formes différentes, principalement spirale ou elliptique.
L’un des mystères que les scientifiques essaient de percer est de savoir comment elles se sont formées. Comment la matière ordinaire s’est-elle condensée pour former des étoiles, des trous noirs ? Pourquoi et comment la formation d’étoiles a t-elle pu s’arrêter dans les galaxies à certains moments (sinon nous n’observerions plus de gaz) ? Pourquoi certaines galaxies sont très massives par rapport à d’autres ? Ont-elles « grandi » plus vite que les autres, et si oui pourquoi ? Et que dire des amas de galaxies, regroupant jusqu’à des milliers de galaxies baignées dans un gigantesque halo de matière noire et de gaz chaud ? Pourquoi un amas s’est-il formé à la place d’une hypothétique galaxie hypergéante de même masse et contenu ? Et quand les amas se sont-ils formés et comment ?
Réponse à certaines de ces questions dans notre prochain article sur les galaxies lointaines.
Hervé Dole, Professeur d’astrophysique et physique, Université Paris Sud – Université Paris-Saclay
La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.
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