L’Arménie et l’Azerbaïdjan ont entamé sous les auspices des États-Unis, lundi à Washington, de délicates négociations de paix à propos de l’enclave disputée du Nagorny Karabakh.
Les discussions, parrainées par le secrétaire d’État américain Antony Blinken, sont censées durer jusqu’à jeudi en présence des chefs de la diplomatie des deux pays, l’Arménien Ararat Mirzoyan et l’Azerbaïdjanais Djeyhoun Baïramov. « Nous estimons que la paix est possible entre ces deux pays. Et qu’un dialogue direct est clé ici » pour résoudre leurs différends, a déclaré à la presse le porte-parole adjoint du département d’État, Vedant Patel, se refusant à livrer tout détail sur la première journée de discussions.
Affrontements depuis 1990
Les deux pays du Caucase se sont affrontés lors de deux guerres au début des années 1990 et en 2020 pour le contrôle du Nagorny Karabakh, une région montagneuse majoritairement peuplée d’Arméniens qui a fait sécession de l’Azerbaïdjan il y a trois décennies. Les tensions, déjà vives, ont redoublé lorsque Bakou a annoncé le 23 avril avoir installé un premier point de contrôle routier à l’entrée du corridor de Latchine, seul axe reliant l’Arménie à l’enclave séparatiste déjà soumise à un blocus de plusieurs mois qui a provoqué des pénuries et coupures de courant.
L’Arménie a estimé que cela constituait une violation du cessez-le-feu négocié avec l’Azerbaïdjan.Des activistes azerbaïdjanais, qui bloquaient depuis mi-décembre ce corridor de Latchine, avaient annoncé vendredi dernier « la suspension temporaire » de leur action.
Ces négociations sous médiation américaine interviennent quelques jours après une tournée dans la région la semaine dernière de la cheffe de la diplomatie française, Catherine Colonna. Elle y avait exhorté l’Azerbaïdjan, un exportateur de gaz majeur, à rétablir immédiatement « la circulation sans entrave le long du corridor de Latchine », route vitale dans cette enclave du Nagorny Karabakh, et dit croire à un règlement pacifique malgré de profondes divergences entre les belligérants.
Dialogue franc pour « une paix juste et durable »
M. Blinken s’est entretenu lundi à huis clos avec les protagonistes réunis dans un centre de conférences au nom de l’ancien secrétaire d’État George Shultz, près de la capitale fédérale. Il les avaient déjà reçus dimanche soir pour un « dîner de travail ».
Un responsable américain s’exprimant sous couvert de l’anonymat a dit lundi s’attendre à des « discussions franches ». « Notre objectif est de nous assurer que les ministres s’assoient à la table et se parlent l’un à l’autre » pendant plusieurs jours, a-t-il ajouté, afin de tenter de parvenir « à une paix juste et durable ». Les négociations portent spécifiquement sur « un accord de normalisation des relations » entre les deux pays, a-t-il encore indiqué en soulignant que « toutes les questions sont discutées ».
« Rouvrir la route de Latchine » au plus vite
M. Blinken s’est entretenu du soutien des États-Unis au processus de paix entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan lors de conversations distinctes avec leurs dirigeants au cours du week-end. Auprès du président azerbaïdjanais Ilham Aliev dimanche, il a « exprimé la profonde inquiétude des États-Unis après l’installation par l’Azerbaïdjan d’un barrage routier à l’entrée du corridor de Latchine qui pourrait saper les efforts visant à instaurer la confiance dans le processus de paix », a rapporté le département d’État dans un communiqué. M. Blinken « a souligné l’importance de rouvrir la route de Latchine aux véhicules commerciaux et privés dès que possible », ajoute le communiqué. La veille, il s’était également entretenu avec le Premier ministre arménien Nikol Pachinian.
Le chef de la diplomatie américaine a maintenu des contacts à intervalles réguliers avec les dirigeants des deux pays. Il a déjà participé à deux réunions trilatérales en novembre dernier, puis en février dernier en marge de la Conférence sur la sécurité de Munich, sans que ces discussions n’aient permis de déboucher sur un accord.
Pour sa part, la Russie a déployé en 2020 au Nagorny Karabakh un contingent de soldats de la paix censé assurer la circulation sur le couloir de Latchine, mais son isolement sur la scène internationale en raison de la guerre en Ukraine limite sa marge de manœuvre. Les États-Unis et l’Union européenne se sont ainsi imposés comme médiateurs dans le processus de normalisation entre Bakou et Erevan.
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