Willard Wigan, un micro-sculpteur au service de la haute horlogerie

15 juin 2015 13:38 Mis à jour: 7 novembre 2015 12:54

 

Quand on interroge le micro-sculpteur Willard Wigan sur son parcours artistique, il raconte toujours qu’il a fait ses débuts dans le monde microscopique à l’âge de cinq ans. Il fabriquait des maisons pour les fourmis parce qu’il pensait qu’elles avaient besoin d’un endroit pour vivre. C’est dans ce monde fantaisiste qu’il a trouvé refuge alors qu’il était en échec scolaire. Et c’est ainsi qu’il est devenu micro-sculpteur.

Willard Wigan, membre de l’Ordre de l’empire britannique, crée les sculptures les plus microscopiques au monde. Son œuvre a été qualifiée de « huitième merveille du monde ». Ses sculptures, souvent dans le chas d’une aiguille ou sur la tête d’une épingle, ne peuvent s’observer qu’à l’aide d’un microscope. Pour réaliser ses œuvres, l’artiste entre dans un état méditatif pour contrôler son système nerveux. Afin de réduire le tremblement de sa main, il sculpte entre deux battements de cœur. Il dispose d’une seconde et demie pour agir.

En 2007, pour le récompenser pour sa contribution artistique, la reine Elizabeth II lui a octroyé la décoration de Most Excellent Order of the British Empire (excellentissime ordre de l’Empire britannique). La reine acceptera également une œuvre en hommage à son jubilé de diamant, The Coronation Crown (la couronne du Sacre).

Willard, autodidacte, a suscité l’intérêt de nombreux micro-chirurgiens, nano-technologues et universitaires à travers le monde qui considèrent son travail à la fois source d’inspiration et de rupture du terrain dans les domaines artistique et scientifique. L’esprit rigoureux et inventif exigeant un travail microscopique a interpellé la marque prestigieuse des garde-temps Greubel Forsey. Depuis quelques années, l’artiste est invité à collaborer avec deux des meilleurs créateurs de garde-temps dans le monde, Robert Greubel et Stephen Forsey. Ensemble, les trois artistes, caractérisés par leur quête de perfectionnement, se sont lancés dans un voyage audacieux pour créer un nouveau chef-d’œuvre dans le monde de l’horlogerie, Art Piece 1.

La rencontre avec Greubel Forsey et Time Art Gallery

En 2011, Greubel Forsey crée la Time Art Gallery afin de rapprocher le monde de la haute horlogerie et l’art contemporain. L’idée a surgi suite aux réflexions des clients qui qualifient les garde-temps de Greubel Forsey d’œuvres d’art par excellence. En effet, les garde-temps sont un moyen d’expression pour Robert Greubel et Stephen Forsey.

« Nos montres véhiculent des valeurs qui sont autres que matérielles. On nous dit souvent que nos montres sont des œuvres d’art et que les œuvres d’art ont leur place dans les galeries et non dans les boutiques », explique Emmanuel Vuille, CEO de Greubel Forsey.

La Time Art Gallery peut être nomade ou sédentaire, elle produit des installations, expositions et autres événements parmi lesquels la marque peut citer Chapeaux ! en hommage à Robert Filliou et son « Principe d’équivalence » : Bien fait = mal fait = pas fait, ou encore la série des Art Pieces née de la collaboration avec l’artiste britannique Willard Wigan, maître de la micro-sculpture. Les sculptures de M. Wigan sont insérées dans le boîtier comme ce magnifique voilier d’or de la taille d’un grain de sable que le visiteur est invité à regarder à travers un système optique logé dans le flanc du boîtier, présentant l’Art Piece 1. Cette œuvre a déjà fait le tour du monde et a été exposée dans plusieurs musées et foires d’art.

 

: Art Piece 1, Golden Sails, 2013. (© Greubel Forsey)
Art Piece 1, Golden Sails, 2013. (© Greubel Forsey)

 

RENCONTRE avec Willard Wigan


Comment avez-vous commencé à travailler sur des miniatures ? Où avez-vous trouvé cette idée ?

Tout a commencé pendant mon enfance. À l’école, j’ai souffert de problèmes d’apprentissage. J’ai découvert que j’avais un don qui me permettait de créer de petites sculptures. Je chérissais ce don, et tout au long de ma carrière, j’ai mené mon travail à l’échelle la plus petite que possible. Ce n’était jamais une idée en soi. C’était juste un camouflage pour compenser mes difficultés d’apprentissage.

Comment faites-vous pour arriver à contrôler vos battements de cœur ?

Je dois ralentir la respiration et le système nerveux central, ce qui me permet de contrôler le battement de cœur.

Pensez-vous qu’il soit possible d’aller plus loin dans le dépassement des limites humaines ? Est-ce au fond une recherche personnelle ?

En tant qu’artiste, je souhaite toujours relever des défis. Est-ce que je peux rapetisser encore plus ? Puis-je intégrer plus de détails encore dans une sculpture à une échelle si microscopique ? Je suppose que c’est une quête personnelle mais que chaque artiste peut comprendre.

Quel est l’esprit qui unit votre travail à celui de Greubel Forsey ?

C’était une vision en commun et le désir de créer quelque chose qui s’approche le plus possible de la perfection. C’est le même esprit qui nous unit, la même mentalité.

J’ai d’abord été contacté par quelqu’un qui me disait que Robert Greubel souhaitait me rencontrer afin d’envisager de collaborer avec lui et son partenaire Stephen Forsey. L’idée était de créer une pièce historique jamais vue auparavant dans le monde de l’horlogerie.

La Cène (2013). (© Willard Wigan)
La Cène (2013). (© Willard Wigan)

Comment la coopération s’est-elle passée ?

Le processus était un défi qui a exigé la synthèse de nombreuses compétences tant de la part des horlogers que de mon côté en tant qu’artiste. Par ailleurs, nous avons dû surmonter d’importants obstacles, comme par exemple la création d’un microscope spécial pour nous permettre de voir le travail, la mise en place d’une plate-forme stable pour tenir la sculpture en place, et finalement, l’insertion de toutes les caractéristiques et les fonctionnalités nécessaires de la montre pour avoir un garde-temps sur mesure.

 Y a-t-il une inspiration commune entre vous et Greubel Forsey ? En d’autres termes, est-ce que votre travail d’artiste a influencé la création des garde-temps et vice-versa ?

Je crois que le défi de créer quelque chose qui n’a jamais été fait auparavant était une source d’inspiration mutuelle. Je n’avais jamais envisagé que mon œuvre puisse être placée dans une pièce d’horlogerie. Une galerie portable en quelque sorte. C’est tout à fait révolutionnaire.

Avec quels matériaux travaillez-vous ?

Tout dépend de l’œuvre que je crée. J’utilise l’or, le kevlar, le sable, des attaches autobloquantes et du nylon pour ne citer que quelques matériaux.

Combien de temps faut-il pour fabriquer une œuvre entièrement ?

Le temps dépend de l’œuvre que je crée. En moyenne, il me faut entre 6 semaines et 3 mois. Des œuvres exceptionnelles comme La Cène peuvent parfois nécessiter plus de temps.

Le Colibri (2010). (© Willard Wigan)
Le Colibri (2010). (© Willard Wigan)

Combien de pièces au total y a-t-il dans la série Art Piece 1 et que représentent-elles ?

À ce jour, nous avons réalisé deux œuvres : Art Piece Golden Sails (Les voiles dorés) et Art Piece Robert Filliou.

Quels ont été les commentaires des amateurs de tradition horlogère sur Art Piece 1 ?

Ils sont tous stupéfaits de la création d’une telle pièce d’horlogerie. Dans la façon dont l’ensemble de la montre est construite, chaque partie complète l’autre : à partir de la micro sculpture, de l’intégration d’un microscope réglable dans le garde-temps, du mouvement du tourbillon, du cadran jusqu’à la finition exceptionnelle.

Quel est le message que vous souhaiteriez faire passer ?

Quand j’étais enfant, on m’a dit que je n’étais « rien ». Je veux que le monde sache à quel point ce « rien » est véritablement petit. « Rien », cela n’existe pas. Il y a toujours quelque chose, peu importe à quel point c’est microscopique. Juste parce que vous ne pouvez pas voir quelque chose à l’œil nu ne signifie pas que cela n’existe pas.

 

Pour en savoir plus : www.greubelforsey.com
Chronopassion  271, rue Saint-Honoré 75001 Paris

 

 

 

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