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Xi Jinping envoie un avertissement à ses rivaux politiques en limogeant des cadres de la ville portuaire de Tianjin

septembre 16, 2016 9:51, Last Updated: septembre 16, 2016 10:04
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Analyse des informations

La ville de Tianjin, située sur la côte nord-est chinoise, exploite l’un des ports les plus actifs au monde. Son quartier central des affaires accueille des centaines de multinationales, dont une bonne partie des 500 entreprises les plus puissantes de la planète.

Mais aujourd’hui, les têtes de deux des hauts cadres de la ville viennent de tomber.

Le 10 septembre, l’organe disciplinaire interne du Parti communiste chinois, a annoncé que Huang Xingguo, maire de Tianjin et secrétaire du Parti par intérim, était placé sous enquête pour « violations graves de la discipline du Parti », une charge généralement synonyme de corruption. Dans l’organigramme du régime chinois, le rang de secrétaire du Parti étant supérieur à celui de maire, ces responsables sont de facto des leaders politiques.

Yin Hailin, adjoint au maire de Tianjin est tombé sous le coup de la même accusation le 22 août. Aucun remplaçant n’a été nommé à la place de Yin ou de Huang à ce jour.

Si le brusque renvoi des hauts responsables de Tianjin semble être lié à des malversations, le vrai motif serait plus politique. Huang et Yin appartiennent au réseau de la faction de l’ancien patron du Parti, Jiang Zemin, un groupe rival que le chef actuel du Parti Xi Jinping, n’a cessé de purger dans son élan pour consolider son contrôle sur le régime. Pendant des années, la ville de Tianjin semblait fonctionner en grande partie sans aucun contrôle, des cas de corruption ou des scandales surgissant régulièrement.

Cette année, Xi préparerait un dossier contre Jiang lui-même. Les destitutions de Huang et de Yin arrivent la veille d’un conclave au sommet du Parti, prévu pour le mois d’octobre, et pourraient servir d’avertissement aux alliés de Jiang.

Des connexions entre factions

Yin Hailin, 56 ans, est presque certainement une relation politique de Zhang Gaoli. Zhang, membre du puissant Comité Permanent du Politburo et ancien chef de la ville de Tianjin, est un allié connu de Jiang Zemin.

Yin Hailin, ancien maire adjoint de la ville de Tianjin (Beijing Television)

Lorsque Yin était directeur du bureau de la planification de la ville de Tianjin, Zhang occupait le poste de secrétaire du Parti à Tianjin. Le premier avait aidé le second à asseoir la nouvelle zone de Binhai, une zone économique prestigieuse. Cette zone héberge les bureaux de grandes entreprises internationales comme Airbus, Motorola, Rockefeller et Tishman Speyer.

En mai 2012, Yin a été nommé maire adjoint de Tianjin. Zhang Gaoli, qui avait été promu au Comité Permanent du Politburo en octobre de la même année, a conservé du pouvoir à Tianjin et aurait supervisé la promotion de Yin.

Huang Xingguo, 61 ans, maire de Tianjin en 2007 lorsque Zhang en était le chef politique, avait inévitablement établi des relations étroites de travail avec ce dernier.

Huang Xingguo, ancien maire de Tianjin et secrétaire du Parti par intérim. (Xinhua)

Pour certains analystes, Huang serait connecté à Xi Jinping parce que les deux avaient autrefois été collègues dans la province du Zhejiang ; Huang a également appelé Xi au mois de juin dernier « le principal » chef de file ou leader central.

Mais les liens entre Huang et Jiang Zemin semblent être plus profonds.

Selon Duowei News, un journal d’informations chinoises basé à l’étranger et connu pour divulguer des nouvelles sur les factions du Parti, lorsque Huang était secrétaire du Parti dans la ville chinoise orientale de Ningbo en 1998, il avait installé des grands portraits de Jiang à la sortie des autoroutes de la ville en signe de loyauté. Duowei révèle également que Huang Xingguo est membre du célèbre « gang de Shanghai » de Jiang.

Préparer le terrain

La purge brutale de Huang Xingguo et de Yin Hailin se produit à un moment qui servirait de levier à Xi Jinping sur ses rivaux politiques lors du prochain conclave politique.

En juillet, Xi avait annoncé l’ordre du jour de la 6e session plénière du 18e Comité Central du Parti. Elle serait consacrée à « la problématique majeure de la gouvernance stricte du Parti ». Les « organes dirigeants et les cadres dirigeants à tous les niveaux et plus crucialement les hauts cadres qui siègent au Comité Central, le Politburo et le Comité Permanent du Politburo », ont le devoir « de renforcer et de normaliser leur vie politique au sein du Parti ».

Cette annonce a été faite exceptionnellement tôt, puisque l’ordre du jour n’est généralement défini qu’environ une à deux semaines avant le début des sessions plénières d’octobre.

Pour Xin Ziling, un ancien fonctionnaire de la défense, en lien avec les voix modérées de la direction du Parti, Xi annoncera officiellement lors de la session plénière, l’ouverture d’une enquête visant l’ancien chef du Parti Jiang Zemin et Zeng Qinghong, l’ancien vice-Premier ministre chinois et facilitateur politique de Jiang.

En effet « le plus éclatant succès » de Xi Jinping lors de la soi-disant conférence de Beidaihe — une retraite informelle mais décisive de la direction, qui se tient traditionnellement entre la fin juillet et début août — aurait été de permettre aux plus hauts dirigeants « de parvenir à un consensus sur la résolution du problème Jiang Zemin-Zeng Qinghong », déclarait Xin à la station radio dissidente Sound of Hope en août.

Bien qu’une action à l’encontre des cadres de la trempe et de l’ancienneté de Jiang et Zeng serait sans précédent, elle s’est récemment révélée théoriquement possible avec une nouvelle série de règlements du Parti. Elle stipule que les cadres d’élite deviennent responsables des méfaits commis par leurs subalternes. Certains analystes estiment que ces règlements ciblent directement Jiang.

Cependant compte tenu de la complexité de la politique des élites du Parti, Xi pourrait chercher maintenant à s’assurer que ses rivaux au sein du Comité Permanent du Politburo, n’interféreront pas dans l’élimination de leur patron politique.

La récente purge du maire de Tianjin et de son adjoint pourrait servir à tester Zhang Gaoli et à s’assurer qu’il votera pour l’élimination de Jiang lors de la session plénière en octobre.

Zhang Dejiang (aucun lien avec Zhang Gaoli), le haut fonctionnaire chinois qui supervise Hong Kong et un allié de Jiang, est également en ligne de mire — les fonctionnaires anti-corruption enquêtent actuellement sur le Bureau de Liaison de Hong Kong, ainsi que sur les Bureaux des Affaires de Hong Kong et de Macao.

Pendant ce temps, les équipes anti-corruption auraient déjà ouvert des enquêtes sur Liu Qibao, le directeur du Département de la Propagande ; du moins d’après le magazine politique de Hong Kong Chengming, dont la fiabilité n’est pas toujours certaine. Liu Qibao est le protégé de Liu Yunshan, un allié de Jiang et membre du Comité Permanent du Politburo en charge de la propagande.

Une action officielle à l’encontre de Liu Qibao, avant le mois d’octobre serait probablement destinée à Liu Yunshan.

Jiang en ligne de mire

Xi Jinping a déjà commencé à agir directement contre Jiang Zemin et ses proches.

Jiang Zemin l’ancien dirigeant du Parti communiste chinois au Grand Palais du Peuple à Pékin, le 14 novembre 2012. (Lintao Zhang/Getty Images)

Du mois de mars au mois de mai, la police anti-corruption a balayé Shanghai, la ville fief de Jiang et ciblé plus de deux douzaines d’organismes gouvernementaux. Plus tôt, les enquêtes avaient visé les entreprises d’État liées à Jiang Mianheng et Jiang Miankang, les fils de Jiang Zemin.

La famille Jiang aussi semble avoir perdu une partie de sa liberté de mouvement.

En mars, l’avocat des droits de l’homme, Zheng Enchong, installé à Shanghai citaient des « sources extrêmement fiables », selon lesquelles Jiang Zemin et ses fils avaient vu leurs mouvements restreints. Zheng a longtemps bataillé contre des éléments « du gang de Shanghai » de Jiang et avait été placé en résidence surveillée pour ses efforts.

Certains signes indiquent que le vieux Jiang est en effet en difficulté.

Depuis l’hiver 2015, Jiang Zemin n’a fait aucune apparition publique. Fin juillet, il avait également omis d’envoyer des couronnes de fleurs aux funérailles d’un camarade décédé. Avant le 90ème anniversaire de Jiang au mois d’août, la police avait sommé ses partisans d’éviter toute célébration.

Dans le monde codé du régime chinois, ces mouvements sont de mauvais augures pour Jiang Zemin.

Version anglaise : Purge of Port City’s Executives Puts Xi Jinping’s Political Rivals on Notice

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