Elle se décrivait comme une « villageoise » chanceuse d’avoir été choisie par le chef d’État. La Première dame du Zimbabwe Grace Mugabe, a révélé sur le tard une inextinguible soif de pouvoir qui a poussé le régime de son mari dans le gouffre.
Ex-secrétaire du président Robert Mugabe, Grace, 52 ans, a longtemps été considérée comme une femme frivole, sans intérêt pour la politique.
Profitant de la santé vacillante de son époux nonagénaire, elle s’était imposée ces dernières années dans le premier cercle du pouvoir et ne cachait plus son intention de prolonger la dynastie Mugabe, en lui succédant le jour venu.
« J’étais très jeune quand j’ai commencé à vivre avec le président Mugabe. Mais il a été patient avec moi et il a pris le temps de faire de moi la femme que je suis aujourd’hui », déclarait-elle en 2012 pour ses premiers pas dans l’arène politique.
Être une Mugabe n’a toutefois pas suffit à la porter jusqu’aux instances suprêmes. « Être président ne se transmet pas sexuellement », rappelait samedi dernier une pancarte pendant les manifestations historiques organisées pour obtenir le départ de « Grand-père » et de « Lady Gaga ».
Au contraire, « son ambition l’a perdue », estime l’expert Shadrack Gutto de l’université d’Afrique du Sud. Selon lui, « elle n’a réussi qu’à accélérer la chute de son mari », en obtenant le limogeage de son principal rival il y a deux semaines.
Pour contrer l’ascension programmée de la Première Dame, l’armée a en effet pris il y a une semaine le contrôle du pays. Dans la foulée, tous ses soutiens ont, un à un, lâché le chef de l’État.
Mercredi, son parti la Zanu-PF a engagé une procédure de destitution contre lui, au motif qu’il avait « autorisé sa femme à abuser des ressources de l’État ».
Ce fut le « coup de Grace » pour Robert Mugabe qui, après 37 ans d’un règne sans partage, a remis sa démission.
Très impopulaire auprès des Zimbabwéens, Grace Mugabe a toujours souffert de la comparaison avec la première épouse du chef de l’Etat, la respectée Sally Hayfron Mugabe, une ancienne militante de la lutte contre le régime blanc, éduquée et très investie dans la sphère sociale.
Jeune dactylo à la présidence, elle a semble-t-il entamé sa relation avec le maître incontesté du Zimbabwe, de 41 ans son aîné, en 1987, alors que Sally luttait contre un cancer.
Des années plus tard, elle s’étonnera d’avoir été choisie, elle, « la villageoise ».
La liaison du chef de l’État n’est révélée qu’à la mort de sa première épouse en 1992.
Le couple, qui a déjà deux enfants, se marie en 1996 lors d’une luxueuse cérémonie à laquelle participe le président sud-africain de l’époque et héros de la lutte anti-apartheid Nelson Mandela. Un troisième enfant naîtra ensuite de leur union.
Longtemps, Grace se contente de jouer les Premières dames de luxe. Baptisée « Gucci Grace », « la Première acheteuse » ou encore « Disgrace », elle s’attire les critiques pour ses extravagantes dépenses et un goût prononcé pour les affaires financières.
Protégée par son époux, à la santé de plus en plus fragile, elle fait ses premiers pas sur la scène politique en 2014, en prenant la tête de la puissante Ligue des Femmes de la Zanu-PF.
La même année, elle s’en prend à la vice-présidente Joice Mujuru, alors pressentie pour prendre la relève de son époux.
Sans détour, la Première dame l’accuse de complot et de corruption et précipite l’éviction de celle qui était pourtant l’une des héroïnes historiques de la guerre d’indépendance.
Véritable pasionaria, elle parcourt le pays en fustigeant tous ceux qui ne se rangent pas derrière le chef de l’État.
Les observateurs de la vie politique locale la disent soutenue par un groupe de jeunes quadras ambitieux réputé pour ses actions violentes, baptisé par certains le « G40 ».
Forte de la protection de son mari, Grace Mugabe devient très redoutée au sein du régime, d’autant plus que ses coups de colère sont légendaires.
En 2009, elle frappe un photographe britannique qui prenait des photos d’elles dans un hôtel de luxe à Hong Kong. En août dernier, elle est accusée d’avoir agressé un mannequin à Johannesburg. L’affaire fait scandale et contraint l’Afrique du Sud à lui octroyer l’immunité.
Dans un entretien accordé depuis à la télévision publique sud-africaine SABC, elle a assuré ne plus se préoccuper de ce que les autres pensent d’elle. « J’ai la peau dure, ça m’est égal », dit-elle, « mon mari dit que l’ignorance est source de félicité ».
R.B avec AFP
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