Déportation vers la persécution

Écrit par Matthew Little et François Michaud, La Grande Époque
17.08.2005

Sort incertain d’une Chinoise déportée, les appels continuent pour une intervention politique

 

Des

pratiquants de Falun Gong ainsi que des soutiens à travers le monde

font appel au gouvernement canadien pour qu’il suspende la déportation

de Mme Hu Xiaoping en Chine où ils affirment qu’elle sera certainement

torturée ou même tuée.

Depuis mercredi 3 août, lorsque l’ordre de

déportation a été émis, une campagne pour tenter de renverser la

décision s’est mise en place. Le bureau du ministre de l’Immigration,

Joseph Volpe, confirmait vendredi que plus de 1 000 appels avaient été

reçus, lui demandant d’intervenir en faveur de Mme Hu.

Vendredi

matin, Hu Xiaoping, accompagnée d’agents de l’immigration et de la GRC,

a été embarquée sur le vol 199 d’Air Canada en direction de Vancouver,

pour ensuite partir vers Pékin.

Après son départ de Montréal, la

campagne pour suspendre la déportation s’est amplifiée. Les bureaux des

ministères de la Sécurité Publique et de l’Immigration ont été

submergés d’appels téléphoniques, de pétitions envoyées par fax et de

courriels. À 15 h 20, heure de son départ vers Pékin, il était toujours

impossible de confirmer si Mme Hu était à bord de l’avion.

Hu

Xiaoping avait fait une demande pour obtenir le statut de réfugié en

tant que pratiquante du Falun Gong, car la pratique de cette méditation

est interdite en Chine et sévèrement persécutée par le Parti communiste

chinois (PCC).

Selon son avocat, Me Bergman, le statut lui a été

refusé en raison de certaines barrières linguistiques et culturelles

qui l’empêchaient de bien comprendre les procédures. Mme Hu n’aurait

pas fourni les preuves nécessaires démontrant qu’elle ne pouvait être

expulsée en Chine.

M. Robert Gervais, porte-parole de l’Agence

des services frontaliers du Canada, a déclaré à la Presse Canadienne

qu’une évaluation des risques avait été effectuée avant d’émettre le

jugement. “Après avoir étudié la demande, il a été conclu qu’il n’y

avait aucun danger de l’expulser dans son pays d’origine.”

L’Association

de Falun Dafa du Canada (AFDC) croit qu’en retournant en Chine, Mme Hu

sera très certainement susceptible d’être “maltraitée”. “À cause de la

sévère persécution du Falun Gong en Chine, ceux qui participent

activement aux activités de groupe de Falun Gong à l’extérieur de la

Chine sont mis sur une liste noire et deviennent très susceptibles

d’être persécutés s’ils retournent en Chine”, a dit Xun Li, président

de l’AFDC.

Un cas similaire survenu précédemment laisse craindre

le pire pour Mme Hu. En mars dernier, M. Jiang Renzheng et sa famille

ont été déportés depuis l’Allemagne vers la Chine. Le département

allemand de l’immigration ne les avait pas évalués “à risque”. Un mois

après leur arrivée en Chine, M. Jiang a été enlevé de chez ses

beaux-parents et condamné à trois ans de travaux forcés, laissant

derrière sa femme et ses deux jeunes enfants.

Le département

allemand de l’immigration avait pris sa décision en se basant sur le

fait que M. Jiang avait commencé à pratiquer le Falun Gong seulement

une fois arrivé en Allemagne.

Quant à Mme Hu, Me Bergman

explique qu’elle pratiquait déjà le Falun Gong en Chine depuis 1996. En

1999, elle a été détenue dans un centre de lavage de cerveau et sa

maison a été saccagée par les autorités. Sous la pression de la

torture, elle aurait renoncé à la pratique, pour reprendre de plus bel

une fois arrivée au Canada.

Un autre facteur renforcerait la

possibilité des représailles. Hu Xiaoping a déclaré publiquement sa

démission du PCC en janvier dernier. Selon Hao Fengjun, un ancien

officier du “Bureau 610” (la gestapo chinoise) qui a fait défection en

Australie en juin dernier, le PCC recherche et persécute quiconque a

publiquement renoncé au parti.

Les fonctionnaires chinois

démentent régulièrement tout mauvais traitement des dissidents.

Cependant, une cour canadienne de l’immigration a récemment refusé le

statut de réfugié à un autre fonctionnaire chinois s’étant retiré du

Parti communiste chinois, Han Guangsheng,. Selon le tribunal, il aurait

été complice de crimes contre l’humanité. M. Han est un ancien chef du

bureau judiciaire de la ville de Shenyang dans la province de Liaoning

et était responsable de la gestion de quatre camps de travaux forcés et

de deux prisons dans le nord-est de la Chine. Les camps comptaient plus

de 500 pratiquants de Falun Gong. Han a toutefois déclaré qu’il avait

essayé, dans la mesure de ses fonctions, d’arrêter la persécution des

pratiquants. Son cas est en appel à la Cour fédérale.

L’ancien

député libéral, David Kilgour, qui siège maintenant comme indépendant,

a dit à la Presse Canadienne que le cas “fait hurler pour une

intervention […] Je m’inquiète énormément que nous placions tant

d’emphase sur notre relation commerciale avec la Chine et que les

droits humains soient mis de côté”.

M. Li a dit que l’AFDC prévoit plusieurs activités pour continuer l’appel.

“Même si Mme Hu a déjà été déportée en Chine, nous n’allons pas abandonner.”

Durant

la fin de semaine, des gens ont tenu des manifestations devant les

bureaux de la vice-première ministre, Anne McLellan, à Ottawa ainsi que

devant les bureaux de sa circonscription à Edmonton.