Le chômage des jeunes à Genève
Contrairement aux idées reçues, des recherches ont démontré que les jeunes étaient très motivés. Ils considèrent le travail comme LE moyen de s’intégrer dans la société, d’obtenir une reconnaissance sociale. C’est aussi par lui qu’ils pensent pouvoir construire leur identité et acquérir leur indépendance matérielle. Ce qui a changé, c’est leur relation avec le travail. |
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La Suisse est peu marquée par le chômage. Avec un taux moyen de 3,6 %, elle est l’un des pays les moins touchés par ce fléau. Mais Genève sort du lot avec 7,1 % de chômeurs. Cela représente 22 595 demandeurs d’emploi dont 15 759 ayant droit aux allocations chômage pour une population globale de 441.989 habitants. (www.geneve.ch/statistique). Trop souvent, des idées préconçues pèsent sur le dos des chômeurs, particulièrement sur les jeunes et les chômeurs de longue durée. D’une part, il est courant d’entendre dire que les chômeurs ne veulent pas travailler. C’est encore plus marqué en ce qui concerne les jeunes. Qui n’a pas entendu dire que les jeunes ne font que ce qui leur plaît, que tout leur est dû, qu’ils sont « je m’en foutiste » ? Qu’en est-il vraiment ? Monsieur Christian Lopez Guirland, directeur de OSEO Genève (oeuvre suisse d’entraide ouvrière) nous expose ses dernières recherches : Sur Genève, environ 10 % des demandeurs d’emploi sont des jeunes de moins de 25 ans. Bien qu’il n’y ait pas de statistique, il estime que l’on peut ajouter 400 à 500 jeunes non recensés. Environ 40 % de ces jeunes sont sans qualification, soit parce qu’ils n’ont pas terminé leur formation, soit parce qu’ils n’en ont pas trouvé. Ce phénomène a certainement toujours existé. Le problème actuel est que les exigences sont plus élevées, fermant les portes à la majorité des emplois. Il y a un autre fait préoccupant, ce qu’il appelle « la 2e génération précarité », la 1re étant apparue dans les années 90. Sur 30 jeunes interrogés, la moitié a des parents vivant d’aide sociale. Il y a donc une reproduction qui pose problème pour l’avenir. Lors de ses recherches, il a été agréablement surpris de voir que les jeunes étaient très motivés. Ils considèrent le travail comme LE moyen de s’intégrer dans la société, d’obtenir une reconnaissance sociale. C’est aussi par lui qu’ils pensent pouvoir construire leur identité et acquérir leur indépendance matérielle. Ce qui a changé, c’est leur relation avec le travail. Face à des emplois à durée déterminée, à la flexibilité et aux exigences qu’ils doivent assumer, ils deviennent plus pragmatiques. Ne trouvant souvent pas de reconnaissance pour leur engagement, ils considèrent le travail comme une fonctionnalité. Pour lui, le préjugé négatif des adultes vient de leur méconnaissance de la réalité actuelle. Une partie de la population vit d’emplois précaires, particulièrement chez les jeunes. Ils doivent souvent faire leur expérience à travers ce parcours qu’on peut qualifier d’« éclaté ». Les entreprises s’accordent pour dire que les formations en apprentissage sont plus performantes, que les jeunes sont bien mieux encadrés. Pour certaines petites entreprises, la surcharge administrative que cela implique les empêche de prendre des apprentis. Les conclusions de son travail sont une série de propositions. Pour le canton : favoriser la mobilité des jeunes au niveau intercantonal par une aide financière. Permettre aux jeunes de moins de 26 ans, sans qualification qui ont à charge une famille, d’accéder à une formation en leur allouant une bourse. Dès 26 ans, l’assurance chômage prend le relais. À partir d’octobre, une organisation de parrainage, Mentora, verra le jour. Il s’agit de former professionnellement des parrains bénévoles susceptibles d’encadrer les jeunes adultes dans leur démarche vers un emploi. Le Mentora est basé sur une expérience québécoise. Monsieur Lopez Guiland a collaboré avec plusieurs associations à Montréal qui lui ont permis de mettre au point cette structure. Vers la fin de l’année se déroulera également un « semestre de motivation » en collaboration avec l’office cantonale de l’emploi. Durant une période de 6 à 12 mois, les jeunes sans emploi pourront participer à des ateliers pratiques, des groupes de recherche d’emploi et d’autres activités. Ce coach en construction sera ouvert aux jeunes de 16 à 25 ans. Monsieur Schwaab du syndicat UNIA secteur jeunesse nous expose son point de vue : Environ 8 % des jeunes sortant de la scolarité obligatoire ne trouvent pas de formation professionnelle. La plupart sont dirigés vers des solutions transitoires telles que les stages ou des écoles post-obligatoires ne délivrant aucune formation professionnelle. Pire, certains se retrouvent sans rien. On compterait environ 900 jeunes désoeuvrés sur Genève. Pour lui, les entreprises pensent à court terme. Elles oublient que former des jeunes apporte un plus à la société. Si un investissement de départ est nécessaire, l’apprenti devient rentable bien avant son diplôme. D’autre part, Il est important d’assurer la relève. Former des jeunes, c’est s’assurer d’avoir des employés qualifiés. Dans les années 80, une entreprise sur trois formait des apprentis. En 2006, ce n’est plus qu’une entreprise sur cinq qui assure cette formation si caractéristique à la Suisse. Les multinationales implantées sur le canton auraient la possibilité de prendre des apprentis mais elles ne connaissent pas cette filière. Il est donc important de les informer. Les jeunes veulent travailler, ouvrons-leur les portes. Quand Monsieur Schwaab entend les critiques émises sur les jeunes, il répond : « Ce n’est pas ce que j’ai constaté. De tout temps, les nouvelles générations ont été critiquées de la sorte. Concrètement, le niveau requis aujourd’hui est supérieur à ce que l’on demandait par le passé. Comme les entreprises ont le choix, elles deviennent exigeantes et demandent beaucoup, notamment par le biais d’examens payants pour débuter une formation. » Les conseils qu’il donne aux jeunes sont : Commencez suffisamment tôt votre recherche de formation. N’hésitez pas à vous renseigner auprès de l’office d’orientation pour choisir votre métier. Ne vous fixez pas sur un seul métier. Bien qu’il soit important de choisir un emploi qui vous plaise, certaines voies offrent très peu de débouchés. Lorsque vous vous présentez, mettez en valeur vos compétences extrascolaires. Si vous ne trouvez pas d’emploi, inscrivez-vous au chômage. Plus de la moitié des jeunes dans cette situation ne le font pas. Ils perdent leur accès aux prestations et ne sont pas recensés dans les statistiques.
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