La Z-machine : la plus grande découverte depuis l’invention du feu (suite)

Écrit par Jean-Pierre Petit (Collaboration spéciale)
31.07.2006

Après avoir présenté un résultat expérimental stupéfiant, l’auteur

évoque la façon dont cette découverte relance la course aux armements

et le problème de la dissémination des armes thermonucléaires en

donnant naissance à des engins nouveaux, n’utilisant plus la bombe A

comme « détonateur », dont l’explosif est une substance qu’on trouve

partout. Non-polluants, miniaturisables, ils n’engendrent pas de

radioactivité et sont donc dangereusement utilisables.

  • La Z-machine du laboratoire Sandia(攝影: / 大紀元)

 

Etant donné la place allouée, je n’ai pas la possibilité de rappeler le

contenu de l’article précédent, paru dans le numéro 81 de La Grande

Epoque, qui décrivait le

résultat récemment obtenu au laboratoire américain de Sandia sur la

« Z-machine ». Ce compresseur électromagnétique a permis de chauffer un

plasma de fer à une température dépassant trois milliards de degrés.

On

ne sait d’ailleurs toujours pas quelle est la cause exacte de cet

échauffement dont on peut lire l’évolution dans le temps sur la figure.

Cela ne peut être simplement l’énergie cinétique acquise par les ions

au cours de l’implosion, convertie en agitation thermique, étant donné

que la température continue de s’élever alors que l’état de compression

maximale ayant été atteint à t = 110 nanosecondes, le plasma entre en

expansion. Ces résultats ont été publiés le 24 février 2006 dans la

prestigieuse revue Physical Review Letters. Depuis, c’est le « silence

radio complet ». L’explication est simple. Cette manip, qui était au

départ destinée à produire une bouffée de rayons X, relève maintenant

du secret défense le plus épais. Pourquoi ? Parce qu’en plaçant une

fine aiguille d’hydrure de lithium selon l’axe du système et en portant

celle-ci à une température d’au moins 500 millions de degrés, se

dessine la route qui conduit à « la fusion pure », sans bombe A. Les

« bombes à hydrogène » ne fonctionnent pas avec un mélange de

deutérium-tritium, de deux isotopes de l’hydrogène, mais avec un

explosif solide : l’hydrure de lithium.

Sur le net, dans des

forums, on désinforme comme on peut en s’abritant prudemment sous des

pseudonymes. Cette « fusion pure » représente un danger pour ces

projets pharaoniques que sont ITER et Mégajoule. Si la fusion pouvait

être obtenue avec des manips 200 fois moins coûteuses, il faudrait tout

revoir, tout repenser. Impossible : trop d’intérêts sont en jeu. Alors

des « scientifiques préférant garder l’anonymat » nous déclarent

sentencieusement, sans justification que « ça ne peut pas marcher » en

discourant sur des plasmas totalement nouveaux, hyperdenses (déjà 90

millions d’atmosphères), soumis à un champ magnétique de 4.500 teslas,

portés à des températures dont il n’existe aucun équivalent dans le

système solaire, sièges de phénomènes de transferts d’énergie

totalement inédits.

C’est la porte ouverte vers une « fusion

inertielle » où des noyaux se trouvent lancés les uns sur les autres,

échauffés, confinés de manière fugitive : le plasma entre en expansion

aussitôt. Le tout est que les réactions de fusion aient le temps de se

produire, ce que ces gens réfutent par simple conviction. Cette voie

leur paraît sans avenir. Or, cela revient à nier le fonctionnement des

bombes à hydrogène, où tout se joue en quelques dizaines de

nanosecondes, lorsque l’explosif de fusion se trouve comprimé, tassé,

porté à une température de 500 millions de degrés. Cela revient à nier

l’existence des supernovae, qui sont aussi des machines fonctionnant

par confinement inertiel. Dans ces usines à créer les atomes de la

table de Mendeleiev, par compression, la température à cœur atteint dix

milliards de degrés. Dans une « Z-machine », la température croît comme

le carré de l’intensité électrique.

Les résultats évoqués plus

haut ont été obtenus en 2005 avec un générateur développant 18 millions

d’ampères. Son successeur, l’engin ZR qui entrera en fonction début

2007, développera 27 millions d’ampères. La température obtenue devrait

alors se rapprocher de ces dix milliards de degrés. Il faut être d’une

remarquable mauvaise foi pour nier que ces expériences, en nous plaçant

face à des conditions physiques que personne n’auraient jusqu’ici cru

réalisables nous ouvrent une extraordinaire boîte de Pandore. Ces

discours visent aussi à masquer que la Z-machine française, l’engin ECF

de Gramat, est à l’abandon depuis quatre ans, personne n’ayant envisagé

qu’un engin de ce genre puisse ouvrir une voie nouvelle vers la fusion.

Si l’on dispose d’une source de courant électrique sous très

haut voltage et très forte intensité, il est donc maintenant

envisageable de se passer de la classique « allumette » : la bombe A, à

fission, dont la puissance minimale est de 300 tonnes en équivalent

TNT. Si l’on parvenait à déclencher des réactions de fusion dans une

fine aguille de Li H, d’hydrure de lithium, celle-ci, faisant office de

détonateur pourrait alors propager la fusion à une charge de masse

illimitée. Mais comment disposer d’un générateur électrique affichant

de telles performances, sous un poids et volume suffisamment faibles

pour convertir le tout en bombe ? La réponse est à chercher dans des

travaux russes du début des années 50, impulsés par Andréi Sakharov.

Pour faire connaissance avec la panoplie de ces idées d’au-delà de l’Oural se référer à l'article disponible ici.

Il est difficile d’expliquer tout cela dans cet article. Nous essayerons

seulement de situer quelques idées-clés. Le maître-mot est l’induction.

Lorsqu’on soumet un conducteur électrique à un champ magnétique

variable apparaît en son sein un courant induit correspondant à la loi

de Lenz. Le corollaire est que si un conducteur électrique se déplace

dans un champ magnétique, un champ électromoteur, produit du champ

magnétique par la vitesse, se manifeste aussitôt.

Sakharov

imagina de communiquer à un conducteur une vitesse de dix kilomètres

par seconde à l’aide d’un explosif. C’est de la MHD, domaine où

celui-ci évoluait en maître incontesté, univers fantastique, peuplé

d’astuces, de montages plus étonnants les uns que les autres. Les

Russes ont de l’imagination à revendre. Par deux fois ils vont

stupéfier les Américains. En 1961, quand Sakharov révèle l’existence de

son générateur MK2. Principe : un condensateur se décharge dans une

bobine, une self. On obtient au départ un régime de « décharge

oscillante » où l’énergie électrique se balade d’un de ces deux

éléments à l’autre. Quand le condensateur est déchargé, que la tension

à ses bornes s’annule, cette énergie « est passée dans la self » qui à

son tour va restituer cette énergie électrique au condensateur dans une

sorte de va-et-vient. Donnons une image. Prenez une lame d’acier.

Coincez-là dans un étau en la maintenant verticalement. Lestez son

extrémité avec une masse M. Tirez sur cet ensemble. Vous réalisez un

apport d’énergie de flexion, de nature mécanique. Lâchez cette masse.

Vous obtiendrez des oscillations. Quand la lame d’acier est verticale,

elle ne contient plus aucune énergie de flexion. Où est-elle passée ?

Convertie sous forme d’énergie cinétique, emportée par la masse. Le

mouvement se poursuit. La tige fléchit, dans l’autre sens. Puis la

masse s’arrête : son énergie cinétique devient nulle. Où est-elle donc

passée ? Dans la flexion de la lame. Vous avez donc un système où l’on

dispose de deux systèmes de stockage de l’énergie, qui se la renvoient

l’un l’autre. Remplacez la lame de ressort par un condensateur et la

masse par une self et vous obtenez un circuit oscillant. Variante :

suspendez la masse à un fil accroché au plafond. Utilisez la lamelle

élastique pour lui communiquer un mouvement en vous arrangeant pour que

celle-ci arrive en butée quand elle est en position verticale, ayant

communiqué toute son énergie de flexion à la masse. Celle-ci poursuivra

alors un mouvement de rotation, toujours pendue à son fil, s’atténuant

progressivement du fait du frottement de l’air.

Vous obtenez

l’image d’un montage « crowbar » où l’on se sert d’un condensateur pour

« lancer » un courant électrique dans une self, que l’on court-circuite

sur elle-même quand le condensateur est déchargé. Ce courant

s’atténuera du fait des pertes par effet Joule (simulé par le

frottement de l’air). Un petit bout de savoir au passage, sous forme

vulgarisée. Nous n’aurons guère de temps et de place pour aller plus

loin. Quand le condensateur a « chargé la self » Sakharov, après

l’avoir mise en court-circuit entreprend de réduire la valeur de son

inductance L. Pour ce faire, il utilise un tube de cuivre empli

d’explosif. Positivement génial.

Il le met à feu à une extrémité.

Le cuivre, ductile, se dilate, arrive au contact des spires et les

court-circuite les unes après les autres, réduisant « l’inductance » de

cette bobine. Or, dans un tel montage, le produit de cette inductance

par l’intensité électrique est une constante, qu’on appelle «

flux magnétique ». En 1953, avec un montage digne d’une simple école

technique, pesant 150 kilos, dont 15 kilos d’explosif, Sakharov obtient

100 millions d’ampères. C’est cinq fois ce que délivre le générateur de

la Z-machine. Pour une bombe « à fusion pure », cela pourrait faire

l’affaire. Mais même avec un explosif rapide, cette décharge reste cent

fois trop lente. Pour faire imploser le « liner » sur l’aiguille

d’hydrure de lithium, il faut que tout se joue en cent milliardièmes de

seconde. On ne peut pas accroître la vitesse de détonation, qui

plafonne à dix kilomètres par seconde. En 1989, les Américains

découvrent une nouvelle machine, le Disk Explosive Magnetic Generator,

inventée par Chernyshev.

Comme pour ce générateur MK2, ceux-ci

n’en avaient pas suspecté l’existence jusqu’à ce qu’ils l’aient vu de

leurs yeux. N’entrons pas dans les détails. Ceux qui en sont curieux

les trouveront sur mon site à l’adresse indiquée. Focalisons-nous sur

l’idée générale. Avec un explosif, il faut amener à zéro un volume

emprisonné dans une surface faite de cuivre. Pour raccourcir le temps,

il faut que l’explosif travaille sur une plus courte distance quand il

écrase l’objet. Faut-il diminuer ses dimensions ? Cela réduirait

d’autant la puissance délivrée. Le Russe a une idée renversante de

simplicité. Son « liner » n’a plus une forme cylindrique. Imaginez « un

accordéon de révolution ».

Le volume intérieur ressemble alors à

un empilement de disques communiquant selon l’axe du système. Coulez

maintenant de l’explosif autour de tout cela. Quand la mise à feu est

opérée, tous les disques sont écrasés en même temps, très vite puisque

leur épaisseur est faible. Explosif, liner de cuivre, champ magnétique,

conjuguez le tout : vous obtenez un générateur de haute tension et de

forte intensité « à la Russe ».

Voici ce type de générateur

DEMG, installé sur le site Arzamas 16. En 2004, celui-ci délivrait 35

millions d’ampères, avec un poids total de quelques centaines de kilos.

Couplez au « liner à fils », ajoutez  « l’allumette » , la fine

aiguille d’hydrure de lithium faisant office de détonateur, reliée à

une charge de Li H quelconque et vous avez un schéma de « bombe à

fusion pure ». Pour développer ce concept vous n’aurez nul besoin de

vous procurer de l’uranium, de l’enrichir laborieusement, de fabriquer

votre première bombe A, comme les Iraniens. Tout cela deviendrait

beaucoup plus simple, beaucoup plus rapide et beaucoup moins cher. De

plus, ces bombes seraient merveilleusement propres, écologiques,

pourrait-on dire. De véritables « bombes vertes » dont l’explosion ne

produirait que de l’hélium (voir cet aspect de fusion « a-neutronique

dans le précédent dossier).

C’est  « kill me cleanly » (Tuez-moi

proprement). Pas de radioactivité, pas de déchets. La bombe idéale,

moins polluante qu’une bombe chimique. Un jour, on s’entretuera avec de

l’hélium. L’hydrure de lithium ? On en trouve à 60 dollars le kilo.

L’eau de mer en contient 0,17 gramme par mètre cube. Bref, il y en a

partout. Que faut-il de plus ?

Du cuivre, un explosif de bonne

qualité, un peu d’électronique et c’est tout. Réjouissons-nous. L’arme

thermonucléaire sera peut-être un jour à la portée de pays comme le

Grand Duché du Luxembourg, voire la Principauté de Monaco. Aucune

limitation dans le monstrueux : vous mettez autant d’hydrure de lithium

que vous le voulez. A l’inverse, l’engin est miniaturisable. Un jour

des drones de la taille d’une guêpe, guidées par micro-GPS (qui existe

déjà, vous le savez très bien) emporteront à des centaines de

kilomètres de distance des micro-bombes, issue des nanotechnologies,

d’une puissance équivalant à plusieurs kilos de TNT.

Tout cela

s’inscrit dans notre futur technologique. Celui-ci serait-il à nos

portes ? Pourquoi le

Los Angeles Times

a-t-il annoncé le 15 juin 2006

qu’on avait confié aux deux équipes américaines de « web designers » (

concepteurs de bombes ) situées à Los Alamos et à Livermore la tâche de

plancher, dans la fièvre, sur « un nouveau type de bombe qu’on n’aura

pas besoin d’essayer ».

Pourquoi,

au même moment le Congrès approuve-t-il le remplacement des 6.000

ogives nucléaires de l’arsenal américain ? Pourquoi la Chambre des

Communes anglaise a été peu de temps après saisie d’un projet

similaire ? Pourquoi cette petite phrase de Bush, en 2005, dans son

discours sur l’Etat de l’Union où il laisse entendre que les Etats-Unis

pourront dans un avenir relativement proche s’affranchir du pétrole en

tant que source d’énergie ? Pourquoi des bruits circulent-ils, évoquant

un spectaculaire raccourcissement des durées des voyages spatiaux, du

fait de l’émergence d’un nouveau type de propulsion ?

La fusion

pure permet d’envisager des moteurs fusées à très forte impulsion

spécifique, qui bouleverseraient totalement notre astronautique, ce qui

sera l’objet du dossier suivant. Le quatrième volet de ce tour

d’horizon traitera de la façon dont cette fusion par confinement

inertiel pourrait donner naissance à un générateur MHD d’électricité,

équivalent, dans le domaine de la fusion, au moteur à explosion, ITER

faisant figure, quant à lui, de « machine à vapeur du 3e millénaire ».

Texte et illustrations : Jean-Pierre Petit

Vous pouvez visiter le site de l'auteur, ici.